En Islâm, la Sunna est la deuxième source de la Loi - ensemble de prescriptions juridico-religieuses constituant ce que l'on appelle Ouçoûl el-Fiqh, les «racines» de la Loi -, la première étant le Coran (texte sacré de valeur absolue) dans lequel il est indiqué que le Prophète Mohammed (QLSSSL) sert de modèle à tous les Musulmans: «Vous avez dans le Messager d'Allah un excellent modèle (à suivre) pour quiconque espère en Allah et au Jour dernier et invoque Allah fréquemment [Coran 33.21].» La Sunna est alors une règle invitant les Musulmans à l'«Imitation du Prophète». Plus usuellement, le vocable Tradition a fini par désigner l'ensemble des données servant de fondement à la Sunna. La Sunna signifie «conduite, manière d'agir, paroles, actions, silences, abstentions», tout ce qui se rapportait au Prophète et qui était exprimé par les récits, ahâdîth (sing. hadîth), transmis par ses Compagnons «à la seconde génération des croyants, celle des Suivants, qui la confièrent eux-mêmes aux Suivants des Suivants». Les souvenirs des uns et des autres sont devenus, dans la suite, les «dires» (ahâdîth) du Prophète, reconstitués par six sources traditionnelles différentes. Une critique sévère s'est imposée pour en dégager «les traditions» dont l'authenticité paraissait incontestable. Par exemple, sur 200.000 hadîth, El-Boukharî (810-870) a tiré un recueil de 7397 hadîth tenus pour authentiques. Ce recueil est L'Authentique, eç-Çahîh, très souvent publié et commenté. Il en est de même pour le Çahîh de Mouslim (819-875) qui compte 7225 hadîth². Quatre recueils principaux ont également gagné l'estime et le respect des docteurs de la Loi; leurs auteurs sont Ibn Mâdjah, Aboû Dâoud, at-Tirmidhî et an-Nassâ‘ï. Il existe d'autres recueils de ahâdîth. Pour répondre aux problèmes nouveaux posés par l'évolution de la communauté primitive, on s'enquit des usages pratiqués du temps du Prophète, on interrogea les Compagnons sur ses dits, faits et gestes et on recueillit un ensemble de «traditions» (ahâdîth) qui servit de base à la science juridique et constitua une «loi de tradition orale se superposant à la loi écrite» (H.Massé). [...] Ceux qui s'écartaient de ces principes se rendaient coupables d'«innovation» (bid'‘a), mot qui finit par prendre le sens d'hérésie et se confondre avec l'incrédulité; l'observance de la Sunna en vint ainsi à caractériser les membres fidèles de la communauté. [...] Les Sunnites sont les tenants de la doctrine officielle. Le hadîth est un «dire» remontant soit au Prophète, soit aux Compagnons et dont le texte (matn) est appuyé sur une chaîne [appelée isnâd] de garants successifs; «X a rapporté de Y qui le tenait de Z qu'Il (le Prophète) ou tel compagnon a dit (ou fait, ou tacitement approuvé...). On commença dès l'époque omayyade à rassembler les hadîths; mais ce n'est qu'au ixe siècle que furent composés, par des auteurs en majorité persans, des recueils complets de traditions, classés, les uns par matière, les autres d'après l'ordre chronologique des personnages auxquels remonte la chaîne. [...] Ces auteurs n'eurent pas seulement à rassembler et classer les hadîths, mais à éliminer tous les apocryphes, qui au ixe siècle étaient devenus fort nombreux de l'aveu même des musulmans. [...] Pour faire la critique des ´´traditions´´, les auteurs musulmans s'obligèrent à contrôler leur chaîne: ils les classèrent en ´´authentiques´´ (çahîh) et en ´´assez bons´´ (hasan), distinguèrent aussi ceux dont la chaîne est continue, interrompue ou relâchée, ceux qui sont connus par une ou plusieurs filières de garants. [...] Parfois, on nomme également ´´hadîth´´ l'ensemble de la Tradition, et ´´science du hadîth´´ (‘ilm el-hadîth) la branche d'études qui en traite.» Avant le hadîth, à proprement parler, il y a la Tardjouma (la rubrique) soit l'objet ou le centre d'intérêt du propos. Le hadîth comprend deux parties: 1-l'Isnâd (où l'on cite, et en les faisant parler, tous les garants de la chaîne, exemple): A nous a rapporté d'après B, d'après C,...que X l'avait informé qu'il avait entendu Y dire: J'ai entendu Omar Ben El Khattâb (QDSSDL) dire du haut de la chaire qu'il avait entendu l'Envoyé de Dieu (QLSSSL) s'exprimer en ces termes [2-Le matn rapporte exactement les termes]: «On ne jugera des actions que selon les intentions.» «Chacun ne sera rétribué que selon ce qu'il a entendu faire. A celui qui a accompli l'hégire pour obtenir quelque bien en ce bas monde, ou pour épouser une femme, son hégire lui sera comptée selon ce qu'il recherchait alors.» Cette brève et élémentaire histoire des ahâdîth empruntée à diverses sources a pour seul objet, comme le veut ce célèbre hadîth, «de faciliter et non de rendre les choses difficiles» et, par ainsi, encourager le lecteur à consulter les ouvrages spécialisés.