L'accusé est revenu sur son propre parcours, l'ayant mené du Pakistan à Londres, passant par le Nigeria. Le procès intenté à Rachid Ramda, alias Abou Farès, se poursuit à la Cour d'assises de Paris. Soupçonné de complicité présumée dans trois des attentats de 1995 dans la capitale française, Rachid Ramda continue de nier en bloc toutes les inculpations qui lui sont imputées. Lors de la séance de mardi dernier, l'accusé a longuement évoqué ses années de militant au sein du FIS dissous. Pendant plus de deux heures, l'accusé est revenu sur son propre parcours, l'ayant mené du Pakistan à Londres, passant par le Nigeria. Il a, par là même, dressé l'autoportrait d'un militant politique dont le destin a soudainement basculé lorsque, en 1992, le gouvernement algérien a décidé de dissoudre le FIS (Front islamique du salut). Après cela, explique-t-il, il n'aura de cesse de «restituer les droits dénigrés» par le régime algérien. «On caressait le rêve qu'il y ait un gouvernement islamique» en Algérie, ajoute l'accusé. Rachid Ramda dit pratiquer, depuis son enfance, un Islam traditionnel. Ce rêve s'est néanmoins envolé lors de l'interruption du processus électoral, alors que l'ex-parti dissous était pressenti pour conquérir le devant de la scène politique en Algérie. Fin 1991-début 1992, Rachid Ramda vit au Pakistan où il est parti deux ans plus tôt pour venir en aide aux réfugiés afghans fuyant la guerre civile. Parallèlement à son action humanitaire aux côtés de médecins, il ne «néglige pas son activité politique», dit-il. Peu avant de quitter l'Algérie, sans l'accord parental, précise-t-il, Ramda a en effet adhéré à l'ex-FIS. «J'ai eu le sentiment que ce parti pouvait réaliser quelque chose». «Pourquoi partir au Pakistan au moment où ce parti est en plein devenir?», s'étonne le président. L'accusé donne des réponses floues, restant très imprécis sur un séjour de six semaines dans le Nord musulman du Nigeria. Il veut à l'époque quitter le Pakistan et à tout prix éviter le retour en Algérie où «la loi punissait toute personne membre d'un parti interdit». «Où rentrer? Que faire?». Vint alors la période londonienne où il arrive avec un faux passeport en février 1993, selon lui, afin d'établir «un rapport sur ce qu'il observe». Pas un mot sur le ou les donneurs d'ordre. Ramda tombe rapidement dans les filets de la police. Il est arrêté pour séjour illégal et passe trois mois en prison. A sa sortie, il fréquente un quartier de Londres peuplé d'islamistes algériens, certains ayant le statut de réfugié politique auquel il aspire. Comme d'après lui, les médias occidentaux passent sous silence les «massacres» perpétrés contre les islamistes en Algérie, il «distribue dans les mosquées» la revue Al-Ansar, qui sera bientôt considérée comme le bulletin de propagande du GIA (Groupe islamique armé). «Je me sentais dans le devoir de faire quelque chose». Selon l'accusation, Ramda était non seulement distributeur mais aussi rédacteur à Al-Ansar. Il aurait été «l'interlocuteur privilégié» en Europe de Djamel Zitouni, ´´émir´´ du GIA qui a revendiqué les attentats de 1995, dont celui du 25 juillet contre le RER B de la station Saint-Michel, ayant fait 8 morts et environ 150 blessés; celui perpétré le 6 octobre contre des stations Maison-Blanche, ainsi que dans le RER C à la station Musée-d'Orsay le 17 octobre qui avaient fait des dizaines de blessés. Soulignons que le procès de Rachid Ramda doit durer un mois. Il encourt la réclusion criminelle à perpétuité.