A force de se focaliser sur l'équipe nationale, on n'obtiendra rien de sérieux dans ce sport. L'ES Sahel dans la Ligue des champions d'Afrique, le CS Sfax en Coupe de la CAF, le football tunisien règne sur le football de club continental (le club sfaxien a remporté, 4-2, le match aller de la finale de la Coupe de la CAF chez les Soudanais d'El Merreikh. Il serait fort étonnant qu'ils se fassent piéger chez eux, au retour, la semaine prochaine). Il aurait très bien pu en faire de même dans la Ligue des champions arabe si quelques-uns de ses meilleurs clubs avaient daigné y participer. Même si cela peut paraître dur pour nos amis sétifiens, il est heureux que, la saison dernière, l'ES Sahel, le CS Sfax, le Club Africain ou l'ES Tunis n'aient pas pris part à la compétition arabe. Avec la participation d'un seul de ces clubs, il n'est pas du tout certain que l'Entente de Sétif aurait décroché le titre arabe. La vérité est cruelle mais il faut la dire. De toutes les manières nous ne sommes pas les premiers à affirmer que la coupe arabe est dévalorisée. Les pays d'Afrique n'y engagent pas leurs meilleurs clubs en dehors de l'Algérie et du Maroc et ceux-ci ne passent pas pour être de grands fournisseurs de champions à l'échelle continentale. Il n'y a qu'à voir pour cela le palmarès de la Ligue des champions d'Afrique depuis sa création où l'on s'aperçoit qu'hormis le succès final du Raja de Casablanca, lors de la première édition en 1997, plus aucun club de ces deux pays n'est parvenu à remporter ce trophée si convoité et qui, aujourd'hui, ouvre les portes du championnat du monde des clubs de la Fifa à son vainqueur. Ce constat est plus que révélateur du grand ratage que notre football est en train d'effectuer au niveau de ses clubs. Et quand ceux-ci vont mal, cela se répercute inévitablement sur l'équipe nationale dont le rendement est affaibli. Pendant ce temps, la FAF est soumise à une très grosse pression pour qu'elle recrute un entraîneur national en vue des échéances 2010 que sont la Coupe du monde et la CAN. Il est coutumier de dire que les bonnes leçons sont rarement retenues. En ce domaine, nous sommes des spécialistes, disons de bien mauvais élèves qui pensent toujours qu'on peut bâtir du concret à partir du néant. Récemment, l'ex-star de l'équipe du FLN et de l'AS Saint-Etienne, Rachid Mekhloufi, disait que notre tort était de nous focaliser sur l'équipe nationale. «Oublions-là pendant quelques années et orientons nos efforts et notre argent vers la formation. C'est la seule solution pour sauver notre football», avait-il affirmé et il s'adressait à un parterre d'auditeurs comprenant le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, et le ministre de la Jeunesse et des Sports, Hachemi Djiar. Il voulait toucher ce que l'on nomme les «décideurs», mais le sont-ils réellement? On dit cela parce que des responsables du secteur du sport, il y en a eu depuis des lustres et tous avaient fait le constat que tout était biaisé à la base du football, c'est-à-dire au niveau de ses clubs mais jamais aucun d'eux n'a changé quoi que ce soit dans le système. L'anarchie et le manque de contrôle n'ont fait, au contraire, que s'accentuer. Ajoutons le bricolage qui consiste à faire du n'importe quoi au niveau des catégories des jeunes. Ce n'est pas pour viser le ministre actuel que nous disons cela. Lui vient tout juste de prendre le train en marche et il en est au stade des évaluations. Dans le fouillis du football algérien, on en est à espérer voir une équipe nationale se qualifier à la Coupe du monde ou à la CAN. La FAF a vu défiler de bons présidents de la dimension d'un Omar Kezzal, Mohamed Raouraoua ou Hamid Haddadj actuellement, mais que peuvent-ils faire lorsqu'on les oblige à monter à la va-vite une équipe nationale qu'il faut qualifier à une échéance internationale? La précipitation a rarement donné de bons résultats. Seul le travail consciencieux, élaboré dans le temps avec des moyens conséquents est porteur d'espoir. Chez nous, les échecs se suivent et dès que l'un survient on demande à la fédération de «dégommer» l'entraîneur national et de le remplacer par quelqu'un d'autre qui puisse mener loin l'équipe nationale. Nous avons remarqué que le staff technique qui vient d'être recruté pour cette équipe nationale va coûter cher au trésor public. Nous ne disons pas cela en visant les compétences d'un Rabah Saâdane. Lui-même sait que nous bricolons et que notre championnat ne forme plus de joueurs au grand talent. Au lieu de perdre notre temps à aller chercher un entraîneur national, on aurait mieux fait de consacrer tout l'argent investi dans le staff technique de l'équipe nationale à la formation de jeunes. Le dicton, chez nous, dit: «Imite mais n'envie pas». Il n'y a aucune honte à prendre le modèle tunisien pour exemple. Des trois pays du Maghreb que sont l'Algérie, le Maroc et la Tunisie, le nôtre est le seul à ne pas avoir de centre national de formation en football. Après la débâcle de leur équipe nationale en phase finale de la CAN 1994 qu'ils avaient organisée, les Tunisiens avaient lancé un vaste projet de restructuration de leurs clubs. Ils avaient instauré le professionnalisme ouvert seulement à douze clubs au départ avec tout ce que cela suppose comme moyens d'accompagnement, à savoir base d'entraînement et centre de formation pour chacun des ces clubs. L'ES Sahel, nouveau champion d'Afrique des clubs, dispose d'un patrimoine à faire pâlir d'envie bien des clubs européens. Un patrimoine qui s'étend sur un espace de 22 hectares où sont érigés les centres d'entraînement et de formation du club. Il est loin le misérable petit hectare qu'on a voulu donner à des clubs de l'Algérois et qui n'était, finalement, qu'un leurre. Après cela, il ne faut pas se demander pourquoi ce football réussit si bien en Afrique en ce moment puisque l'équipe nationale de Tunisie se qualifie régulièrement à la phase finale de la Coupe du monde et qu'elle sera au rendez-vous africain du Ghana en janvier 2008. Le dernière anecdote, elle nous est venue de Billal Dziri, l'ex-international et actuel joueur de l'USM Alger qui nous racontait qu'un jour son équipe préparait un match de Coupe d'Afrique contre le célèbre ES Tunis en s'entraînant sur le terrain du stade de Bologhine. «Nous partagions ce jour-là ce terrain avec deux autres équipes de divisions inférieures, nous avait-il dit. Saïd Allik, notre président, était du côté de la ligne de touche en train de suivre nos exercices. Je me suis approché de lui et je lui ai dit: ´´Imagines un peu que le président de l'EST, Slim Chiboub, vienne à l'improviste et s'aperçoive comment on est en train de s'entraîner. Il risque de tomber à la renverse´´.»