Le président de la République a été officiellement sollicité pour prolonger le délai de la Charte. «Ce qui est interdit aujourd'hui, serait peut être autorisé demain. La réconciliation nationale n'est pas le Coran et les juristes qui ont participé à l'élaboration des textes de loi, ne sont pas dupes. Il faut seulement laisser le temps au temps» M Merouan Azzi, le président de la Cellule nationale chargée du suivi de la mise en oeuvre des textes de la Charte pour la paix, a apporté cette précision en réponse aux critiques dont fait l'objet le projet du Président. Il cite principalement le chapitre relatif au rejet des plaintes déposées contre les services de sécurité. Azzi dispose-t-il d'information qui confirme l'intention du Président de revoir ce dispositif? L'invité du Forum d'El Moudjahid s'est montré peu prolixe. Il s'est contenté d'assurer que «tous les dossiers ayant trait à la tragédie nationale sont sur le bureau du Président de la République». Par ailleurs, le conférencier a dévoilé le contenu d'une correspondance adressée par ladite cellule au Président de la République en septembre et dans laquelle ce dernier est sollicité officiellement pour prolonger le délai d'application de la Charte. Azzi affirme cela en reconnaissant qu'au niveau de la justice, les portes de la Rahma ne sont pas fermées. «L'Etat a opté pour la stratégie du dialogue et des négociations avec certains groupes terroristes pour convaincre le plus grand nombre de terroristes à déposer les armes. C'est dans cet objectif que s'inscrivent les négociations avec Mokhtar Benmokhtar, ou celles menées auparavant avec Madani Mezrag», soutient-il. Par ailleurs, ajoute-t-il: «Le combat armé sur le terrain reste la seule alternative contre ceux qui persistent à rejeter la main tendue du peuple». Les attentats de Dellys et de Batna sont commis, selon lui, par cette même partie qui veut saboter le projet présidentiel. «Une simple analyse des faits, nous permet de conclure que ces attentats ont été commis juste au moment où le Président de la République était sur le point de légiférer de nouvelles mesures dans le cadre des prérogatives que lui confère l'article 47 de la Charte», avance-t-il. Dans un autre volet, M.Azzi a donné un bilan sur l'application de la Charte. Il souligne que 2226 personnes ont bénéficié de l'extinction des poursuites. Cela concerne, entre autres, les individus qui se sont rendus aux autorités depuis le 13 janvier 2000, date de forclusion des effets de la loi portant Concorde civile, les personnes qui ont mis fin à leur activité en remettant les armes en leur possession, ceux recherchés sur le territoire national ou à l'étranger, et les personnes impliquées dans des réseaux de soutien au terrorisme. Près de 500 cas restent en suspens. Sans toutefois en révéler les raisons, M.Azzi affirme que leur sort sera traité par les cours lors des prochaines sessions criminelles. Hattab en fera-t-il partie? Azzi atteste que le sort de Hattab est entre les mains du Président. Il y a deux voies pour gérer ce dossier. La première est celle de la justice. «Le fondateur de l'ex-Gspc sera présenté à la justice. Une fois le verdict final prononcé, le chef de l'Etat pourrait, s'il juge bénéfique pour le pays, décider de l'amnistier.» La deuxième voie est proprement politique: Bouteflika peut aussi décider de recourir à l'article 47 de la Charte pour annoncer sa grâce sans jugement. Deux arguments confortent, par ailleurs, la deuxième. Premièrement «Hattab a publié des communiqués de soutien à la réconciliation nationale en 2005». Deuxièmement, «ce dernier avait déposé les armes de février à août 2006». Concernant maintenant les disparus, il fait savoir qu'au niveau de la cour d'Alger, 5500 dossiers ont été traités et 90% des familles ont reçu leur indemnisation. Si toutes les familles des disparus seront indemnisées, le cas des familles des terroristes abattus est lié à la situation financière de ces dernières. «Seules les familles qui n'ont pas de revenus seront prises en charge par l'Etat. Les autres ne seront pas indemnisées», une donne ignorée par beaucoup d'entre elles. La Présidence de la République a été saisie, aussi, pour le cas des catégories non incluses par la Charte: des individus acquittés par la justice après avoir passé plusieurs années en prison. M.Azzi s'est montré très optimiste, laissant entendre que des mesures seront prises au profit de ces catégories. Les choses s'annoncent compliquées pour les prisonniers de Reggane, dont la majorité ne possèdent aucune preuve écrite sur leur détention dans ce camp de sécurité.