La communauté estudiantine de Béjaïa, déjà en état de révolte, s'est montrée choquée et offensée. L'effroyable double attentat terroriste qui a frappé dans la matinée de mardi la ville d'Alger, n'a pas laissé indifférente la communauté estudiantine de l'université de Béjaïa. Les étudiants ont, dès l'annonce de la nouvelle macabre, suspendu leur manifestation de protestation du jour qu'ils organisaient sur la RN 9. Dans la soirée, ils sont revenus à la charge à travers une imposante marche silencieuse, voulue à la mémoire des victimes de la double déflagration, dont beaucoup étaient leurs camarades de l'université d'Alger. Dans une organisation parfaite, faite de plusieurs carrés entourés par des cordons de sécurité, étudiantes et étudiants ont marché de leurs résidences au siège de la wilaya dans un silence qui témoigne de toute la tristesse qui les animait. Bougies allumées tenues en main, la procession estudiantine s'est ébranlée dans un calme funèbre. Choc, stupeur et désarroi se lisaient dans le regard de tout un chacun. Désemparés, ils n'ont de pensée que pour les victimes, sachant pertinemment que nul n'est à l'abri. Arrivée à hauteur du siège de la wilaya, les marcheurs ont marqué un temps d'arrêt. Une minute de silence fut observée à la mémoire de toutes les victimes des attentats à la voiture piégée perpétrés dans la matinée à Alger. Dans une courte prise de parole, le représentant des comités de résidence «U» dénoncera avec la plus grande fermeté ce double attentat terroriste. Tout en exprimant la solidarité estudiantine à l'égard des familles des victimes, l'orateur s'inclinera à la mémoire des morts. Sur ce, il décrétera «de deuil» la journée d'hier. Un autre membre du comité précisera que leur «action se démarque totalement de celle de l'Ugel» qui, aux yeux des étudiants de Béjaïa «n'est pas dénuée d'arrière-pensées politiques». En un mot, les étudiants de Béjaïa ne tiennent pas à ce que «leur action soit exploitée à des fins politiciennes». Une prudence tout à fait légitime, lorsqu'on sait le détournement fait maintes fois de l'expression populaire et corporatiste. Suspension temporaire de mouvements de protestation, gel des cours ont marqué la vie estudiantine, hier, dans les deux campus où régnait un climat de tristesse et de révolte. Au sein de cette communauté en recueillement, c'est la totale incompréhension face à l'évolution fâcheuse de la situation sécuritaire de notre pays. Des interrogations fusaient de partout sans pour autant trouver de réponse à ce malheur qui colle au corps comme une seconde peau. Dans un pays riche et vaste, les gens meurent de faim, par balle, ou victimes d'attentats terroristes. Bien qu'en deuil, le comité des résidences s'attelait à la rédaction de la demande d'audience au wali de Béjaïa. Une délégation devrait rencontrer le chef de l'exécutif afin d'organiser sous conditions une réunion de concertation et de dialogue pour dimanche prochain. Les étudiants frondeurs de l'université de Béjaïa exigent, comme condition de concrétisation de cette réunion «la présence d'une commission interministérielle (Enseignement supérieur et Finances), le wali, le recteur et le directeur général des oeuvres universitaires», afin, précise-t-on, que «toutes les revendications puissent être abordées avec les responsables concernés directement».