En Algérie, ce n'est que depuis deux ans que le module «communication» est devenu obligatoire pour tous les étudiants de 3e année de magistrature. Comment réussira-t-on à concilier une presse libre avec une justice indépendante? A quel point les médias servent-ils de trait d'union entre la justice et les citoyen? En termes plus clairs: où commence la liberté du journaliste et où se termine celle du magistrat? C'est, en effet, autour de ces questions qu'a tourné la session de formation, en direction des magistrats, animée hier à l'Ecole supérieure de la magistrature, par David Sellers, spécialiste américain dans la communication judiciaire. Pour cet expert, «il est une nécessité absolue que le journaliste soit mis au courant de toutes les affaires qui se déroulent dans les tribunaux». Suivant le raisonnement de M.Sellers, on déduit aisément que les médias jouent un rôle prépondérant dans l'approfondissement de la relation existant entre les magistrats et les citoyens, en ce sens qu'ils servent de trait d'union. Se référant à la législation américaine, David Sellers, également juge fédéral, a souligné qu'il est «du droit des médias d'avoir des informations sur la majorité des affaires, même si celles-ci sont encore en instruction». Il a également précisé que les caméras de télévision sont autorisées à filmer les diverses audiences qui se déroulent dans les tribunaux. En dépit de toutes les largesses que la législation américaine accorde aux médias, il n'en demeure pas moins qu'il existe des cas d'exception où l'accès à l'information relève quasiment de l'impossible. Il s'agit, selon David Sellers, des cas d'affaires relevant, notamment, du secret d'Etat. Où en est la relation entre les deux parties, en Algérie? En effet, le pays est «novice» dans ce genre d'affaires. De la relation qui doit exister entre les médias et les magistrats, on n'en parle que depuis le lancement de la réforme de la justice, entamée en 2000. Et jusqu'en 2005, il n'y avait que les magistrats, en exercice, qui avaient accès à ce genre de formations. «Ce n'est que depuis deux ans, soit depuis 2005, que le module de "communication" est devenu obligatoire pour tous les étudiants de 3e année de magistrature», a indiqué Hocine Mabrouk, directeur général de l'Ecole supérieure de la magistrature, hier, dans un point de presse animé en marge de la session de formation destinée aux magistrats algériens. Pour M.Mabrouk, «la programmation de ce module et le fait de l'avoir imposé aux étudiants de 3e année n'attestent que de la concrétisation de la politique menée par le gouvernement algérien dans le cadre de la réforme de la justice». Plus clair, le directeur général de l'Ecole supérieure de la magistrature a indiqué que l'ouverture de la justice aux médias est devenue nécessaire, d'autant plus que cela sert, à plus d'un titre, à éviter les rumeurs pouvant nuire, aussi bien, à la profession de journaliste qu'à celle de magistrat. Il faut dire, dans ce cas précis, que les informations rapportées par les médias peuvent, dans certains cas, influer sur le cours de certaines affaires, notamment en ce qui concerne la décision que pourrait prendre le magistrat. En ce sens, David Sellers a, tout en insistant sur la nécessité que la Constitution protège le magistrat (comme c'est le cas aux USA), souligné l'obligation de mettre à la disposition du journaliste les moyens nécessaires susceptibles de l'aider à mener à bien sa mission. «Parce que les professionnels des médias ne sont pas nécessairement spécialisés dans ce genrede secteur», a argumenté M.Sellers.