Ces laissés-pour-compte de la politique s'en vont en guerre pour un putsch virtuel n'existant que dans leurs délires. Après un passage fort remarqué de Chérif Belkacem et Ghozali au forum d'El-Youm, le premier nommé vient de récidiver à travers une interview d'une rare virulence confirmant qu'il y a bel et bien campagne contre le chef de l'Etat à la faveur du troisième anniversaire de son élection et de la 22e commémoration du printemps berbère. Sans doute, donc, le mois d'avril sera une période charnière dans la vie politique et institutionnelle de notre pays. Deux anniversaires, de fort grande importance, s'annoncent à moins d'une semaine l'un de l'autre. Le 16 avril, Bouteflika bouclera trois années d'exercice aux commandes de la plus haute institution de l'Etat. Quatre jours plus tard, interviendra le 22e anniversaire du printemps berbère, test décisif s'il en est. Ce dernier renseignera sur le degré d'efficacité des mesures prises par le Président en faveur de la Kabylie. Ce n'est donc pas un hasard si les armes sont affûtées tous azimuts et si les détracteurs (visibles) du Président mettent les bouchées doubles quitte, ce faisant, à prêter le flanc à des contradictions qui devraient leur être fatales. Chacun s'intéresse de près au bilan du Président. Tout y passe. A commencer, comme de juste, par la concorde et le bilan sécuritaire. Les bombes ayant explosé hier à Birkhadem, soit dit en passant, doivent être une aubaine à mettre à l'actif des attaques qui ne manqueront pas de fuser durant les jours à venir. A défaut d'avoir réussi à faire de la capitale l'épicentre de la protesta sociale, celle-ci n'en sera pas moins la ville la plus touchée par les bombes et, donc, par l'insécurité. Il est vrai, ce disant, que même si personne ne peut contester l'existence d'une poudrière sociale, nul non plus, ne pourra dire qu'à l'égal d'octobre 88, des boute-feux s'amusent régulièrement à allumer les mèches de sorte à ce que le calme ne soit jamais entièrement rétabli en Algérie. La sortie, hier dans les colonnes d'un quotidien réputé pour ses attaques contre Bouteflika, de Chérif Belkacem donne le la de ce que seront les attaques et les critiques à l'adresse du Président de la République. L'heure des bilans critiques, voire vitriolés, a fait long feu. Ni cet homme ni ses comparses Sid-Ahmed Ghozali et Ahmed Benbitour ne recourront à la méthode utilisée durant la campagne (ratée) de l'année dernière. A en croire la sortie de Chérif Belkacem, plus ou moins conforme à d'autres qui l'avaient précédé, Bouteflika serait le principal, ou plutôt le seul facteur aggravant de la crise algérienne. Sans être l'homme providentiel, que chacun est en droit d'attendre sans qu'il existât point, le chef de l'Etat a eu sa revanche de 99 à travers le plébiscite référendaire du 13 janvier 2000. En clair, il n'est ni plus ni moins légitime que tous les autres présidents qui l'avaient précédé. Il demeure, cependant, le seul que l'on cherche à «dégommer» vertement en recourant à la plus vile des dictatures qu'on peut concevoir. Chérif Belkacem, ainsi que d'autres voix aussi insignifiantes, des paumés de l'ère du parti unique, fait dire à la Kabylie, au mouvement des ârchs, à la plate-forme d'El-Kseur, ce qu'elles n'ont jamais dit. Il leur fait endosser la revendication du départ de Bouteflika, se sachant, lui et les autres, sans la moindre représentativité. Il ajoute, non sans raisons, il faut le dire, que ni les partis, ni le Parlement, ni la société civile ne peuvent assumer la période de transition (seconde du nom) qui en résulterait. Mais, là, il omet de préciser qu'un président, quel qu'il soit, ne peut rien faire seul et que tous les acteurs cités plus haut se sont bornés à tenir le rôle de spectateur. Il s'agit là, au demeurant, d'une pratique courante sous nos cieux. Les plus inactifs, les moins engagés dans le combat au côté du peuple et pour le pays, sont les plus grands critiques, les meilleurs détracteurs de ceux qui, ne l'oublions pas, ont au moins le mérite d'avoir travaillé, ou à tout le moins essayé de le faire. Mais, tout cela n'est rien par rapport à la cerise sur le gâteau empoisonné que l'on nous propose. Tout en reprochant au Président ses démarches pacifistes et, suprême ironie, la permission donnée aux ONG de renouer avec notre pays, Chérif Belkacem appelle de tous ses voeux à un putsch militaire. Il propose même à cette institution de prendre en main officiellement les affaires de la République. L'ANP devrait, ce faisant, s'appuyer à l'avenir sur des compétences comme celles de Chérif Belkacem, sans doute pour exorciser les démons qui assaillent le pays. Pareilles sorties n'honorent nullement leurs auteurs, ni leurs vecteurs, prétendument défenseurs acharnés de la démocratie en Algérie. Elles montrent toutefois tout l'essoufflement qui gagne le camp des détracteurs de Bouteflika. Est-ce la crainte du démon islamiste qui les conduit à se réfugier dans les bras d'une armée républicaine et qui n'en demandait pas tant? Ils oublient, volontairement ou pas, les énormes sacrifices consentis pour que le terrorisme islamiste perde enfin sa légitimité via les élections de 95, 96 et 97. Un pronunciamiento remettrait simplement au goût du jour les suffrages odieux de 91. Dur de trouver meilleur allié de l'ex-FIS en dehors de ces gens et de leurs relais médiatiques. Cette campagne, qui s'annonce plus violente que celle de l'année dernière, nécessitait forcément des acteurs idoines, des gens ne craignant pas le ridicule, capables de dire tout et n'importe quoi. Or, qui n'a pas entendu parler des frasques de Chérif Belkacem à Paris, du temps où il trônait encore au défunt Conseil de la Révolution? Benbitour et Ghozali n'en mènent pas plus large. Le premier ne semble pas avoir digéré son départ précipité de la chefferie du gouvernement alors qu'on voyait à l'oeil nu l'insuffisance de sa prestation politique. Le second, outre ses démêlés personnels avec Bouteflika quand Ghozali trônait à la tête de la Sonatrach, a laissé de fort mauvais souvenirs après un court passage à la tête de l'Exécutif. Les trois, donc, traînent des relents de vengeance personnelle et des velléités putshistes héritées de leurs passés respectifs. Ce choix, ainsi exprimé, montre toute l'ampleur du mépris nourri par eux à l'adresse du peuple algérien et de la souveraineté dont il est le seul et unique détenteur. Car, serait-ce trahir quelque secret que de dire que même si les six candidats ne s'étaient pas retirés au dernier moment, Bouteflika, avec tous les partis et organisations qui le soutenaient, était quand même sûr de passer, quand bien même nous eussions peut-être été forcés d'aller vers un second tour entre l'actuel Président et Ahmed Taleb Ibrahimi. Les vecteurs médiatiques de cette campagne, qui ne fait que commencer, ne pouvaient, eux aussi, que se prêter au jeu attendu qu'ils sont grisés par un précédent coup d'Etat médiatico-politique. Dans tout cela, hélas, personne n'a eu l'idée de penser que Bouteflika a hérité de la crise la plus grave que l'Algérie ait eu à connaître depuis son indépendance. Ainsi, n'est-elle pas près de se laisser entraîner dans une nouvelle machination. Chérif Belkacem, Benbitour et Ghozali prennent leurs désirs pour des réalités. Leur appel à un putsch, paru sur plusieurs journaux à la fois, foule aux pieds la sacro-sainte démocratie et les principes inaliénables de la souveraineté populaire.