Yahia Djouadi placé par Droukdel à la tête de la «zone 9», demanderait une rançon contre la libération des deux touristes autrichiens pour répondre à la crise financière que connaît le Gspc. Que cache le retour aux kidnappings des ressortissants et/ou touristes étrangers par les groupes terroristes? De la plus spectaculaire prise d'otages de mai 2003 au kidnapping des deux touristes autrichiens, les pistes sont les mêmes. Et la méthode est presque similaire aussi. Il n'y a pas de fumée sans feu. Il faut s'attendre à une demande de rançon, s'accordent à dire certaines de nos sources sécuritaires. Pourquoi? Il y a, en premier lieu, une crise financière aiguë qui ruine les cellules de Abdelmalek Droukdel. Le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc), dans un communiqué diffusé récemment sur Internet, n'a pas caché, pour la première fois, sa détresse, en raison d'un manque flagrant en logistique, plus précisément en argent, nourriture et médicaments. Le communiqué porte le «seing» d'un dénommé Abou Mohamed El Athmani. Cette situation, d'après nos sources, véhicule de fortes hypothèses quant au recours des ravisseurs à la demande d'une rançon. La même mise en scène a été faite en mai 2003, mais l'armée algérienne était intervenue alors pour la libération d'une trentaine d'otages kidnappés par le Groupe salafistes pour la prédication et le combat, appelé depuis septembre 2006 «Al Qaîda au Maghreb islamique». Dix-sept des 32 touristes, de nationalités suisse, allemande et néerlandaise, avaient été libérés au nord de Tamanrasset grâce à l'intervention réussie de l'armée algérienne. Aucune rançon n'a été versée par l'Algérie, tandis que le reste des autres otages avaient été libérés, le 18 août de la même année, à Kidal, une région touarègue malienne, après le versement par Berlin d'une rançon de près de 5 millions d'euros, selon certaines informations qui n'ont jamais été confirmées par Berlin. Le meneur de troupeau, à cette époque-là, n'était autre que le redoutable terroriste du désert dit «Abderrazak El Para», de son vrai nom Amari Saïfi, arrêté au Tchad en 2004 et remis aux autorités algériennes. Il est actuellement en détention, en attente d'un procès qui tarde à avoir lieu. Cinq ans après, les terroristes recourent aux mêmes moyens de pression. Deux touristes autrichiens ont été enlevés le 22 février dernier en Tunisie. Mais cette fois-ci, tout porte à croire que la cheville ouvrière de cette prise d'otages n'est autre que Yahia Djouadi, alias Abou Amar, chef de la katiba Tarik Ibn Ziad. Dans notre édition d'hier, certaines sources sécuritaires nous ont indiqué que le kidnapping pourrait porter encore les empreintes de cette katiba qui active dans les régions sahariennes et qui est chargée, par Abdelmalek Droukdel, de collecter l'argent, les armes et les explosifs pour les besoins d'alimenter ses groupes terroristes. Cette katiba est à l'origine de l'assassinat des huit gendarmes à El Oued, le 3 février dernier. Yahia Djouadi, dit Abou Amar, chef de file des quarante terroristes que compte la katiba, est aussi à l'origine de l'attaque qui a ciblé, en novembre de l'année dernière, un avion militaire à l'aéroport de Djanet (Illizi, dans le Sud-Est algérien), même si d'autres sources sécuritaires ont mis aussi sur la piste un certain Hamadou Abid, alias Abdelhamid Abou Zaïd, originaire d'El Oued et élément redoutable de l'équipe d'Amari Saïfi alias Abderezak El Para. Mais les premiers éléments de l'enquête des services de sécurité algériens attestaient de la crédibilité de la piste de Yahia Djouadi. Le Gspc qui avait d'ailleurs revendiqué l'attentat, a précisé aussi que son commanditaire était le nouvel «émir» du Sahara, Yahia Djouadi. Abou Amar a été installé en août dernier par Abdelmalek Droukdel et active dans la zone frontalière entre la Mauritanie, le Mali et l'Algérie. La reconstitution du puzzle permettrait d'imputer au groupe de Yahia Djouadi le kidnapping des deux touristes autrichiens, d'autant que les dernières informations laissent croire que les deux victimes auraient été acheminées vers le Sud, plus précisément aux pays du Sahel où sévissait Yahia Djouadi. La sale besogne peut être accomplie aussi en collaboration avec deux autres katibas qui activent près de la frontière algéro-tunisienne, à savoir Oum al-kamakim et Al-fath al-moubine. Avant d'être en août chef de la zone 9, Abou Amar a été «conseiller militaire» et proche collaborateur de Abdelmalek Droukdel. D'après certaines de nos sources, très au fait de la situation sécuritaire, Yahia Abou Amar, sous les ordres de son chef Droukdel, avait déjà tendu une embuscade aux unités de l'ANP (Armée nationale populaire) dans la «zone II» (Kabylie). Pour ainsi dire, la carrière sanguinaire d'Abou Amar a commencé dans le proche entourage de Abdelmalek Droukdel pour atteindre, par la suite, les pistes si risquées de la bande sahélo-saharienne, qualifiées aussi de «sentiers de la mort». Son déplacement au Sahara est venu en réponse à la crise que connaissait le Gspc en matière d'armes et d'explosifs. Et maintenant en argent. D'où la forte présomption d'une demande de rançon.