Les chiffres renseignent assez sur l'état de dégradation de la relation entre l'administration et les citoyens. C'est la fracture. Le fossé ne cesse de s'élargir entre l'administration et les citoyens en Algérie. Une étude scientifique établie par l'institut de sondage Abassa met en lumière le fait que plus de la moitié des Algériens sont insatisfaits de la gouvernance. Cette enquête révèle que 72% des Algériens sont mécontents du fonctionnement des institutions de la République. La même étude, intitulée L'Algérien dans sa ville, évalue le nombre d'Algériens satisfaits à 6% seulement. Les résultats de l'enquête placent l'Algérie dans le rang des pays les plus bas en termes de rapport entre citoyens et gouvernants. Comparativement à quelques pays de référence démocratique cités par l'enquête, tels l'Italie, la France, la Grande-Bretagne, la Norvège, l'Allemagne, l'Algérie se situe au plus bas niveau. Les indices de satisfaction dans ces pays oscillent entre 40 et 70%. L'interrogation fondamentale de ce sondage a porté sur la qualité de la vie des Algériens dans leurs cités, leurs rapports aux services publics, aux administrations locales et nationales, leurs relations quotidiennes à leur environnement de proximité et à leur vécu quotidien. Pour mieux décortiquer la relation citoyen-administration, l'Institut Abassa s'est focalisé sur les opinions exprimées sur les trois plus importantes institutions locales: APC, daïra et wilaya. L'enquête montre bien que la dégradation relationnelle est flagrante tant entre citoyens et responsables locaux qu'entre administration et personnels de l'APC. Sur l'ensemble des personnes interrogées, la moyenne du chiffre négatif cumulé est de plus de 66%. En revanche, les très satisfaits ne représentent que 5,2%. En comparaison, le taux des mécontents ne dépasse pas les 8% dans les pays démocratiques, souligne l'étude. La mésentente citoyens-APC est constatée, notamment, au niveau de la qualité d'accueil, le respect, la politesse, l'écoute, la prise en charge de la requête, de l'accueil téléphonique, le délai d'attente et la satisfaction de la requête. Ce sondage dresse un même tableau concernant le rapport avec les services de daïra. Cette dernière qui est considérée comme une représentation directe et permanente de l'Etat, n'a pas bonne presse auprès de l'opinion publique. Le rejet de cette institution étatique tend à se généraliser au sein de la société. Le sondage observe les mêmes grandes tendances constatées au niveau des APC. Les chiffres négatifs cumulés sont de l'ordre de 69,1%. Les sondés satisfaits ne dépassent pas les 5,5%. Idem pour le rapport avec les services de wilaya. Cette représentation officielle de l'Etat est sévèrement jugée. Elle est très mal appréciée. Les opinions négatives sont de 68,2%. Les personnes satisfaites sont de 5,4% seulement. Globalement, l'étude cerne les motifs de satisfaction des sondés dans quelques services, comme les commerces, les cafés, les restaurants, et les services publics de fourniture en eau, gaz, électricité, les écoles et les services médicaux. Les motifs d'insatisfaction sont nombreux et vont des services de la santé publique, les transports publics, les loisirs et distractions, les parcs publics de la ville, les espaces verts, le manque de salles de cinéma, de musées et de théâtres. Concernant la vie de l'Algérien dans sa ville, l'enquête fait ressortir que près de 40% des Algériens déclarent vivre mal, voire très mal dans leurs villes. La majorité d'entre eux cherche à s'expatrier à n'importe quel prix. Se référant aux réponses des interviewés, les résultats de ce sondage proposent quelques mesures pour une vraie gouvernance de la cité. Les citoyens revendiquent des responsables crédibles et sincères, notamment au niveau des discours des gestionnaires. L'étude suggère, entre autres, d'introduire une vraie stratégie de médiation et de communication en direction des jeunes. L'Institut Abassa confirme que le présent sondage a été réalisé dans des conditions professionnelles les plus strictes en termes de rigueur scientifique et de fiabilité quant à la pertinence de ses résultats. Ainsi, ces chiffres témoignent fortement de l'état de dégradation de la relation administration-citoyens. En réalité, l'étude ne fait que confirmer une évidence. Le faible taux de participation aux dernières élections législatives et locales illustre le manque de confiance des citoyens par rapport aux institutions de l'Etat.