Il y a des pays sans sondage : je ne vous souhaite pas d'y vivre. » Cette citation est de Denis Delmas, président d'un institut de sondage français TNS Sofres. Il est possible que cette phrase puisse susciter de ce côté-ci de la Méditerranée des réactions de stupéfaction, mais elle renseigne on ne peut mieux sur le rôle utile et surtout vital des instituts de sondage dans la réflexion de l'opinion de la population. Le rôle d'éclairage qu'offre le sondage est encore plus palpable à l'approche d'un rendez-vous électoral. Dans la chaudière de la campagne électorale, le sondage devient un outil déterminant pour connaître la tendance évolutive du choix des électeurs. Pour un parti politique, savoir où se situe sa « cote » de popularité est un repère qui peut l'aider à savoir où et comment doit-il orienter son discours. Pour les médias, les sondages sont un formidable moyen d'analyser une réalité sociale qui s'exprime par les chiffres. Quant à l'opinion publique, qui est la principale source consultée par le sondage, il s'agit d'une tribune d'expression à saisir mais sous couvert de l'anonymat. En Algérie, l'utilisation du sondage est aléatoire, voire presque inexistante. N'obéissant pas à une périodicité et une constance dans la parution, les sondages en Algérie sont souvent le fruit d'initiatives personnelles, apparaissant une fois par hasard. Exception faite, toutefois, des sondages tenus secrets et conçus par certaines officines publiques, qui sont réguliers et surtout précis mais sont gardés confidentiels. Pour le sondage non confidentiel, deux instituts de sondage ont fait parler d'eux en Algérie, à savoir l'institut de Mohamed Abassa et l'institut Immar. Même s'ils ont tenté par le passé de s'impliquer dans le monde politique, ils n'ont toutefois pas réussi à gagner en fiabilité. Les résultats des enquêtes menées ont toujours fait l'objet de contestations. En l'absence de données chiffrées avant que les résultats du vote ne soient connus, et pour pallier ce manque de données et de statistiques reflétant la réalité des tendances politiques, certains médias recourent à leurs propres moyens de sondage en interrogeant un échantillon de la population. Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) n'a pas attendu que le boom des instituts de sondage fasse son apparition en Algérie pour recourir à cette technique de collecte de l'information. Contacté hier, Abderrezak Makri nous a confié que son parti a établi son propre sondage sur un échantillon de 14 wilayas du pays. Les résultats de ce sondage seront rendus publics aujourd'hui lors d'une conférence de presse que tiendra Boudjerra Soltani. A la question de savoir pourquoi ne pas avoir demandé les services d'un institut indépendant, Makri répondra qu'aucune offre n'a émané d'aucun institut. Pour Djelloul Djoudi du Parti des travailleurs (PT), l'existence même d'instituts de sondage est une nouvelle. « Pourquoi ça existe en Algérie », nous dira-t-il. Si du côté du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), cette existence n'est pas niée, la fiabilité par contre de ces instituts est entamée. « Il n'y a aucun sondage qui tienne du pragmatisme et obéissant à des données scientifiques », estime Mohcine Belabes, chargé de communication de ce parti. Ce dernier ajoute un autre argument freinant le recours du RCD aux instituts de sondage, et c'est « l'argent ». Il est vrai que l'opération de sondage, remplissant les critères d'objectivité et de fiabilité, nécessite un engagement financier important. C'est même souvent la raison qui justifie l'hésitation de s'offrir les services d'un sondeur.