Cela ne tombera pas du ciel. L'hommage rendu par le président de la République laisse cependant entrouvertes les portes de l'espoir. S'il existe une seule corporation en Algérie à qui il est difficile de donner des leçons de patriotisme, c'est bien celle qui regroupe toute la famille de la presse. A peine est-elle sortie d'un combat, que la voilà obligée d'en livrer un autre. La jeune et fragile histoire de la presse algérienne se confond dans la longue lutte contre le colonialisme. 132 ans. Cela forge la personnalité la plus réfractaire à la liberté, à la liberté d'expression. Spoliations, tortures, exécutions sommaires...toute la panoplie du parfait colonisateur, du tortionnaire est mise en application. Testée sur des êtres humains considérés tout juste comme des sous-hommes. Comment sortir de ces ténèbres, de cette longue nuit noire? Les moyens de communication manquaient aux Algériens. Il fallait exploiter ceux de l'ennemi. Comment? Par l'action psychologique. Chaque revers subi par l'armée d'occupation française devait avoir un large écho à travers les médias (radio, journaux...) coloniaux. La presse algérienne prend racine, elle se forge dans les maquis. Il fallait informer, informer le monde de cette longue nuit coloniale qui n'avait que trop duré. Ce qui a fait dire au chef de l'Etat: «Cette élite éclairée, qui a bravé moult dangers et difficultés, a su se montrer digne d'une appartenance algérienne authentique. Forte d'une position constante et d'une détermination à toute épreuve, elle a forcé le respect du monde entier, tant elle n'a jamais abdiqué devant le colonialisme ni devant le terrorisme», a déclaré M.Bouteflika dans un message adressé à la presse nationale à l'occasion de la Journée mondiale de la liberté d'expression. La presse algérienne a trempé dans de l'acier. Elle a têté au sein de la révolution. Le «virus» est bien là. Il lui a été inoculé par une génération de femmes et d'hommes exceptionnels. L'heure de la maturité a-t-il enfin sonné? La presse écrite dite «libre» est née dans le sillage des événements d'Octobre 88. Elle n'a pas eu le temps de dire «ouf». Elle a fait face au terrorisme et au projet d'une République islamiste. Elle l'a payé cher, très cher. 63 journalistes l'ont payé de leur vie. Ils ont été assassinés. Yefsah, Djaout, Mahiout, Abderrahmane Chergou, Naïma Hamouda... la liste est longue, trop longue. «Je m'incline, de nouveau, à la mémoire des dizaines de journalistes et des travailleurs de la presse, que nous avons tous perdus et je rends, de nouveau, hommage à la résistance exemplaire de la presse algérienne durant la tragique épreuve que notre pays a traversée...», a souligné Ahmed Ouyahia dans un hommage rendu aux journalistes tombés sous les balles et les bombes assassines du terrorisme. La reconnaissance, enfin la reconnaissance. Pouvoir exercer son métier avec moins de contraintes. Le rêve est permis. Le sillon est déjà tracé et nul ne peut entraver le cours de l'histoire. L'entente cordiale entre les pouvoirs publics et la presse est un but à atteindre. La presse nationale est au rythme des soubresauts qui secouent la scène politique, sociale et économique du pays. En essayant, tant bien que mal, d'accomplir sa mission, le journaliste dérange. Corruption, détournements...Il ne fait que son travail quand il met au grand jour de telles «affaires». Une épée de Damoclès est suspendue au-dessus de sa tête: la diffamation. Le délit de presse. Comme pris à son propre piège, il se retrouve dans les tentacules d'une justice prompte à appliquer la loi. Sommes-nous arrivés, aujourd'hui, à un tournant? La force du quatrième pouvoir sera-t-elle enfin consacrée? Cela ne tombera certainement pas du ciel. D'autres sacrifices nous attendent bien que l'hommage rendu à la corporation par le président de la République laisse entrouvertes les portes de l'espoir. «Les journalistes algériens sont en droit d'être fiers des acquis obtenus en faveur de leur noble profession, acquis qui leur ont donné la pleine mesure de révéler les vérités à l'opinion publique et clamer haut et fort leur position», a souligné M.Bouteflika.