C'est ce que semblent préconiser les services de sécurité pour en finir avec la mafia du sable et ses ramifications. D'aucuns estiment qu'il faut passer à la manière forte. Cela est exprimé en substance par l'actuel commandant du groupement de la Gendarmerie de Boumerdès. Une idée toutefois qui va dans le même sens que celle exprimée par les autres acteurs civils soucieux de la préservation et de la protection de l'environnement. Selon notre interlocuteur, durant le mois écoulé, il avait fallu d'abord interpeller et capturer 16 individus connus par les services de sécurité, pour ensuite parvenir à mettre la main sur 4 pilleurs pris en flagrant délit. C'est avec cette méthode que les pilleurs ont pu être localisés, arrêtés, présentés au parquet et leur matériel saisi. L'ex-chef de brigade de Legata, dit El Meki, employait pour sa part une autre méthode contre la mafia sévissant à Mandoura. Elle consistait à effectuer des patrouilles nocturnes sur la plage pour immobiliser les camions surpris en flagrant délit, les pneus des engins passés aux baïonnettes des gendarmes. C'est ainsi que beaucoup de camions utilisés dans le vol du sable du rivage, furent saisis et mis en fourrière, dans cette région réputée être un point noir. Cependant, la mafia du sable, qui a le bras long, s'est ingéniée à faire muter cet agent de sécurité qui lui causait, à l'évidence, beaucoup de torts. Et voilà les pilleurs de sable qui peuvent continuer leurs méfaits. Mafia et terrorisme Aux dires de nombreux témoins au fait des grands et petits secrets entourant le pillage du sable, l'assassinat de l'ex-chef de brigade de Sidi Daoud, aurait été commandité par la mafia du sable en 2002. Tout récemment, le chemin emprunté par la patrouille de la Gendarmerie de retour d'une mission d'intervention contre les pilleurs de sable, a été miné par des engins explosifs explique notre interlocuteur, illustrant la connivence existant entre les terroristes et la mafia du sable. Il y a près de 10 jours, un carambolage a été provoqué par un pilleur de sable pour pouvoir fuir. Filé par une patrouille de la gendarmerie, le chauffeur du camion poursuivi n'a pas trouvé mieux que de déverser le chargement du sable sur la chaussée provoquant un immense carambolage, ayant causé d'importants dégâts à une dizaine de véhicules; le bilan de cette collision fait état de 9 personnes blessées. Exprimant les appréhensions des gendarmes en fonction dans les barrages fixes, notre source indiqua que presque toutes les herses ont été détruites, par les chauffeurs de camions GBH qui ne reculent devant rien. Ces pilleurs ou leurs chauffeurs, recrutés parmi les repris de justice n'hésitent pas à foncer sur les barrages fixes de la Gendarmerie. Aussi, les moyens de la lutte ont-ils été renforcés pour faire face à cette situation. Dès lors, une réorganisation a été effectuée par la Gendarmerie de Boumerdès, multipliant les barrages fixes lesquels passent de 14 à 38 alors que les sections spécialisées (SSI) passent de 2 à 8 afin de mieux quadriller le territoire et faire face à une mafia du sable qui utilise tous les moyens du grand banditisme pour parvenir à ses fins. La quantité de sable récupérée, durant la période des mois de juin et juillet 2008, est de l'ordre de 67m3 de sable et le bilan d'intervention fait état de 15 camions saisis et 16 personnes arrêtées. Selon le commandant du groupement de Gendarmerie, la lutte contres le terrorisme et la mafia du sable est appuyée par 6 hélicoptères mis à leur disposition par le commandement régional de Blida. Le même responsable a admis l'existence de difficultés sur le terrain de la lutte contre la mafia du sable, forte d'une connexion avérée avec les groupes terroristes de l'ex-Gspc. Ces phalanges nourries par la mafia du sable font, au même titre que les terroristes, régner l'insécurité notamment au niveau des différents points noirs, consistant à tenir à distance les services de sécurité et marquer leur territoire. Dans ce contexte, plusieurs points et zones noirs ont été recensés par la gendarmerie de Boumerdès. Il s'agit de Chouichan, El Hadj Ahmed Ouled Ghnim, à Zemmouri, des localités boisées, réputées être à la fois des bases arrières de l'ex-Gspc et repères de la mafia du sable. A cela s'ajoutent El Aardja et Bounoua à Cap Djinet, Mizrana, près de Dellys et Mandoum, un lieudit situé entre Zemmouri et Legata, à l'embouchure de Oued Isser. Toutefois, le problème de l'extraction illicite des agrégats de oued Sebaou, serait réglé à 99%, selon le commandant du groupement de gendarmerie, puisque la décision de cessation des activités de pas moins de 11 sablières, a été prise récemment. Les exploitants de ces sablières ont été sommés de lever leur matériel dans un délai ne dépassant pas une quinzaine de jours. Pour plus d'efficacité, la Gendarmerie a associé à cette décision, les services de la commune et de la daïra de Baghlia. Sur un autre plan, les gendarmes ont procédé à la fermeture définitive de 38 pistes aux alentours de la forêt de Chouicha, à Zemmouri et de 18 autres à Ouled Ghnim et à Boudouaou El Bahri. Les pistes en question sont utilisées par les pilleurs généralement pour contourner les barrages des services de sécurité, notamment ceux dressés par la Gendarmerie. L'environnement ravagé Ainsi, globalement, pour faire face à cette situation, la Gendarmerie, comme d'ailleurs le parquet général et la commission de sécurité de la wilaya se sont déclarés la guerre contre la mafia du sable. La société civile doit être également impliquée car l'extraction illicite du sable, les agrégats des lits des oueds, ainsi que d'autres carrières constituent un phénomène ravageur pour l'environnement. Le vol du sable est pratiqué au vu et au su de tout le monde et cela depuis maintenant des années: il ne manquera pas d'engendrer des catastrophe écologiques aux conséquences incommensurables. L'assèchement des nappes phréatiques, les plages qui perdent leur sable, l'érosion lente des ouvrages et ponts traversant les oueds, en sus de la montée des eaux saumâtres jusqu'aux surfaces des terres agricoles ne constitueraient que la partie visible de l'iceberg, indiquent experts et spécialistes. Dans ce contexte, le cas du pont de Baghlia, une commune dont le siège de l'APC est construit sur la rive de l'oued Sebaou, est édifiant. La mise à nu des fondations de cet ouvrage témoigne des ravages causés à l'oued alors que près de 8m de la partie enfouie des fondations sont actuellement visibles. S'il est laissé dans cet état d'érosion lente, le pont risque de s'écrouler à tout moment. Par ailleurs, beaucoup de lieux prisés par les pêcheurs se vident peu à peu de leurs poissons à Zemmouri, sous l'effet conjugué de la pollution et de l'extraction du sable. Situé à l'extrême-est de la wilaya de Boumerdès, Dellys semble plonger dans une torpeur profonde, laissant libre court à tous les opportunistes, entre autres les pilleurs de sable qui mettent à mal une ville réputée pour le charme discret de ses plages à l'exemple des Salines et Takdempt, lesquelles se dégradent à une grande vitesse. Il ne reste plus un grain de sable, rien que des cailloux et des tas d'ordure solides et ménagères. Les potentialités touristiques sont des faits étouffés dans l'oeuf, ne cessent de répéter les riverains, tout en se demandant pourquoi les pilleurs ou la mafia du sable jouissent toujours de l'impunité. Ainsi va l'antique Resuccurus, sous le joug de la mafia du sable et leurs complices. Les cratères visibles de loin, au niveau de la plage dite de Bounoua à Cap Djinet, sont aussi des traces indélébiles du massacre causé au rivage de la mer. Le même scénario est observé à Zemmouri et Boudouaou El Bahri. C'est dire que le majeure partie de la bande côtière de la wilaya de Boumerdès est touchée par ce phénomène destructeur.