Parmi les personnes décédées, figurent 42 civils et 1 gendarme. La sanguinaire main terroriste a de nouveau frappé. Cette fois-ci, c'est l'Ecole supérieure de la Gendarmerie nationale (Esgn) des Issers, dans la wilaya de Boumerdés, qui a été prise pour cible. L'attentat, perpétré hier matin, a fait au moins 43 morts et 45 blessés. Parmi les personnes décédées, figurent 42 civils et un (1) gendarme, précise le communiqué du ministère de l'Intérieur, ajoutant que 32 blessés sont des civils et 13 autres sont des gendarmes. Il était environ 7h28 lorsqu'une voiture de marque Toyota Hilux s'arrêta devant la file de jeunes en attente devant l'établissement. Ces derniers, alignés en une queue de plusieurs mètres, tout au long de la clôture de l'Ecole supérieure de la Gendarmerie, attendaient l'ouverture des portes pour s'inscrire au concours d'accès à l'Esgn. Un homme sort de la voiture, en prenant le soin de la refermer derrière lui. Dans la file, où s'impatientaient près de quatre-vingts jeunes, dont la plupart des bacheliers, l'homme s'arrêta au milieu. Hormis ceux devant lesquels il s'arrêta, nul ne prêta attention à cet intrus arrivé à l'improviste. Il est 7h30. A ce moment-là, l'horloge du temps décida de s'arrêter et une assourdissante explosion se produisit. L'homme s'est fait exploser. La voiture, qui était en stationnement a volé, elle aussi, en éclats. Apparemment, elle était également bourrée d'explosifs. L'explosion a été entendue à plus de quarante kilomètres à la ronde. Dans l'explosion, le souffle de la bombe a tout drainé sur son passage. Le mur de clôture de l'Ecole s'est abattu. En ce mardi, la circulation était fluide. Une voiture de marque Peugeot 307, soufflée par la bombe, a été presque pulvérisée. Les corps du couple qui se trouvait à bord, étaient introuvables. Un bus, assurant la desserte Oran-Tizi-Ouzou a vu toutes ses vitres voler en éclats. Les 19 personnes qui voyageaient à bord, sont toutes blessées. De la villa, de style colonial, qui est en face de l'Ecole, on ne voit que les murs éventrés. Le toit s'est effondré. Les dégâts matériels sont considérables. Fort heureusement, ses occupants en sont sortis indemnes. On n'a enregistré qu'une personne blessée. Sur le lieu de l'explosion, un trou de près d'un (1) mètre est perceptible. La route des Issers est devenue noire. Elle est jonchée de cendres et de suie. «Ce sont tous des jeunes à la fleur de l'âge» nous raconte un citoyen. «Je les ai vus. Ils ne dépassent pas les vingt ans», ajoute-t-il. D'autres témoins affirment que la plupart de ces jeunes sont de nouveaux bacheliers. «Ils ont choisi de s'engager dans la Gendarmerie pour défendre leur pays. Ils sont morts innocents. Ils n'avaient même pas d'armes à la main. Ce sont des anges», clame un vieux, les joues ridées. «Ils (les terroristes) veulent nous faire croire qu'ils font du djihad. Non! Non! Les vrais personnes qui font du djihad ne tuent pas les anges! Il n'y a que les lâches qui osent perpétrer un acte aussi barbare» ajoute, en larmes, notre interlocuteur. «Parmi eux, il y a certainement Mohamed», ajoute-t-il. Qui est-ce? «C'est un jeune de Chlef. Il voulait rejoindre les rangs de la Gendarmerie. Il n'avait pas où aller. Je l'ai hébergé» raconte le vieillard. Approché, le receveur du bus assurant la desserte Oran-Tizi-Ouzou, a l'air abattu. Il nous montre ses deux bras. Ils sont traversés par des égratignures. «Je vais bien. Je peux le dire, puisque les personnes qui voyageaient avec nous sont sorties indemnes. Elles sont certes blessées, mais rien de grave quand, après l'explosion, on découvre que l'on est toujours en vie. Voilà l'essentiel», a-t-il estimé. Aux alentours, les gendarmes, qui ont redoublé de vigilance, sont à bout de nerfs. Le stress, la peur, l'angoisse, mais surtout la tristesse et l'abattement sont visibles sur leurs visages. La police scientifique est à pied d'oeuvre. Elle est assistée par les éléments de la Protection civile. Les ambulances aux klaxons assourdissant, gyrophares actionnés, partaient et revenaient, de vers les hôpitaux les plus proches. Ceux de Thenia, Bordj Menaïel et de Tizi Ouzou. A l'hôpital de Bordj Menaïel, les ambulances arrivent une par une. Les urgences reçoivent de plus en plus de blessés. Ils sont à quatre, dans des salles spacieuses. Interrogé, un blessé, après nous avoir regardé quelques instants, finit par lâcher: «Je ne peux rien vous dire, de crainte de mentir. Il n'y a que ceux qui ont assisté de si près à l'attentat qui peuvent vous parler.» Et, après un bref silence, il continue: «...ceux là sont morts!». La phrase provoque des frissons. Une infirmière, visiblement touchée, tente de cacher ses larmes. A l'entrée de l'hôpital, des citoyens viennent s'enquérir de leurs proches. Une liste de blessés a été établie. Cela facilite la tâche aux préposés à la réception. Les Issers a vécu une journée des plus amères. La petite ville paisible tente de panser ses blessures. Ce mardi 19 août 2008 restera certainement gravé dans sa mémoire. Tout comme les hommes, les villes ont également une mémoire. Croyez-y.