Cannes servira-t-elle d'espace de rencontre cinématographique pour la paix au Proche-Orient? Le Festival international du film s'ouvre sur la situation au Proche-Orient avec la programmation de plusieurs films traitant de la situation dans la région. Cannes reste sensible au conflit, même si la sélection des films s'est faite avant l'invasion des troupes de Tsahal dans la région. C'est Amos Gitai qui ouvre le bal avec Kedma, un film qui retrace la création de l'Etat d'Israël pour mieux cerner les origines du conflit au Proche-Orient. Amos Gitai est un cinéaste israélien de gauche, qui a toujours été contre l'occupation des territoires, mais qui a soutenu l'idée d'un Etat israélien. Par ailleurs, on retiendra le passage du dernier film de Ghassab Salhab Terra incognita un cinéaste libanais né au Sénégal, auteur d'un premier film magnifique Beyrouth fantôme. Cette fois, il retrace l'itinéraire de quatre bourgeois libanais qui tentent de reconstruire leur vie dans Beyrouth, sept fois détruite, sept fois reconstruite. Apparemment Le Proche-Orient est au coeur du Festival de Cannes et Le mariage de Rana de Hany Abu-Assad s'inscrit dans le cadre de la première coproduction de la Fondation du film palestinien et du ministère de la Culture palestinien avec la société néerlandaise Augustus Film. Le film est projeté dans le cadre de la Semaine internationale de la Critique, section parallèle du Festival. Autodidacte, Hany Abu-Assad a travaillé en tant qu'ingénieur aéronautique avant de se tourner vers le cinéma où il a collaboré avec son compatriote Elia Suleiman, dont le dernier film Intervention divine est en compétition pour la Palme d'or. Son film raconte la course contre la montre d'une jeune Palestinienne, Rana (Clara Khoury), qui a dix heures pour retrouver et épouser l'homme qu'elle aime, contre l'avis de son père. Un Roméo et Juliette au temps de l'Intifada, dit le réalisateur présent à Cannes. Rana va se heurter aux barrages militaires à Jérusalem, esquiver les pierres que jettent des gamins sur les soldats, s'effacer devant le cortège funèbre d'un Palestinien, assister à la démolition d'une maison... Avec l'espoir que son amour sera plus fort que toutes les barrières que dressent les hommes, mais en ramassant aussi sa pierre. Hany Abu-Assad a tourné à Jérusalem-Est et à Ramallah en Cisjordanie en pleine Intifada au moment où le ministre du Tourisme israélien a été assassiné. Ce film est inspiré de l'histoire réelle d'une écrivaine. Mais le film qui risque d'attirer l'attention du jury et qui concourt pour la Palme d'or c'est bien sûr Intervention divine d'Elia Suleiman. Le cinéaste, très sollicité en Amérique où il a vécu treize années, a refusé toute proposition d'outre-Atlantique pour se concentrer sur une coproduction franco-israélienne. Intervention divine raconte une histoire d'amour entre un couple déchiré par la géographie et qui est obligé d'aller sur le parking d'un check-point entre Jérusalem et Bethléem pour se rencontrer. Durant le tournage du film Suleiman avait interdit aux techniciens et acteurs israéliens qui travaillent avec lui de parler hébreu et d'utiliser l'anglais comme langue commune pour communiquer avec le reste de l'équipe du film composée essentiellement de Palestiniens, d'Américains et de Français. Le Festival de Cannes va t-il servir la paix et faire taire les armes en donnant les moyens à la pellicule de s'exprimer. Verdict à la clôture de la manifestation.