Même si les exécutions sont gelées, les condamnations à la peine capitale continuent d'être prononcées par des tribunaux. Y a-t-il pire torture que celle d'attendre la mort? Des dizaines de détenus attendent qu'ils soient exécutés depuis 1993, date de la suspension de la peine de mort en Algérie. Selon des sources non confirmées par le ministère de la Justice, les prisons algériennes comptent près de 200 détenus condamnés à mort. Le débat sur la peine de mort est loin d'être clos en Algérie. Rappelons qu'un projet de loi portant abrogation de la peine capitale est depuis plusieurs années, au niveau du département de la Justice. Pourquoi le projet n'a pas encore vu la lumière jusqu'à ce jour? Le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (Cncppdh), Me Farouk Ksentini, explique tout simplement ce retard par le fait qu'il y a des réticences exprimées par certaines parties qui sont à l'origine de ce blocage. «C'est une démarche essentielle à la constitution d'un Etat de droit et à la réalisation du processus de réforme de la justice», précise le président avec obstination. Ce dernier souhaite que l'Algérie soit le premier pays arabe qui procédera à l'abolition de la peine de mort. Il rappellera, en ce sens, que notre pays a ratifié plusieurs conventions internationales. Donc, la suppression de cette peine s'avère, aux yeux de Ksentini, de plus en plus, une exigence pour que l'Algérie puisse s'adapter aux standards du droit international et se libérer de toutes les contraintes. Le président d'honneur de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (Laddh), maître Ali Yahia Abdennour, dans un entretien accordé à L'Expression, a déclaré: «Avant de prendre une décision il faut une consultation générale entre hommes de justice et de religion. Il faut relancer le débat pour la suppression. Il n y'a pas de texte de loi. Cette question est bloquée pour des raisons politiques et religieuses (la loi du talion). Cependant, on a condamné à mort des prisonniers qui n'ont pas commis de crimes comme dans le monde entier.» «La peine capitale a été abolie dans l'écrasante majorité des pays. Et comme nous devons adapter notre législation dans le cadre de la mondialisation, il est nécessaire d'en faire autant», cette déclaration a été rapportée par l'agence américaine Associated Press. La dernière exécution en Algérie remonte à 1993. Il s'agissait de celle d'un pilote d'Air Algérie et d'un de ses complices impliqués dans l'attentat à la bombe de l'aéroport d'Alger. Cet attentat avait fait plus d'une quarantaine de morts, rappelle-t-on. En 2004, le Premier ministre Ahmed Ouyahia s'est prononcé pour l'abolition de la peine de mort. En 2006, un projet de loi visant à abolir la peine de mort a été étudié par le ministère de la Justice, puis par le Parlement. Il a été très largement soutenu par Me Farouk Ksentini, fervent partisan de l'abolition. «Peu de temps avant l'annonce de ce projet de loi, le plus célèbre des condamnés à mort algériens, Abdelhak Layada, cofondateur du GIA, avait été gracié et libéré», ajoute la même source. Et d'enchaîner «mais le 17 octobre 2006, les députés se sont prononcés contre l'abolition de la peine de mort. Seuls les députés du Parti des travailleurs (PT) se sont exprimés en faveur de l'abrogation de la peine capitale, tandis que les membres des autres partis représentés au Parlement, ont voté contre. La peine de mort est donc maintenue dans le Code pénal de notre pays.» En 2003, 40 condamnations à mort ont été prononcées en Algérie. En 2004, au moins 24 personnes ont été condamnées à mort. Des condamnations sont régulièrement prononcées en Algérie, souvent par contumace. Pour rappel, l'Algérie s'apprête à abolir la peine de mort. Cette peine n'est plus appliquée dans notre pays depuis 1993, contrairement à nos voisins comme le Maroc, la Tunisie, la Libye, l'Egypte... Notre pays a ratifié le Pacte international sur les droits civils et politiques, le premier Protocole additionnel du Pacte, la Convention sur les Droits de l'enfant, et enfin signé la Convention contre la torture et les traitements et punitions cruels, inhumains ou dégradants.