Depuis samedi, face à une intense pression de l´Inde mais aussi, et surtout, de Washington, les autorités pakistanaises ont arrêté 16 personnes proches ou directement liées au groupe interdit Lashkar-e-Taïba. Le Pakistan a assuré hier qu´il ne livrerait à l´Inde aucun éventuel suspect dans les attaques de Bombay et qu´il les jugerait lui-même si nécessaire, mais s´est dit prêt à faire face à une nouvelle guerre si New Delhi décidait d´une action militaire, même ciblée. Depuis samedi, face à une intense pression de l´Inde mais aussi, et surtout, de Washington, les autorités pakistanaises ont arrêté 16 personnes proches ou directement liées au groupe islamiste pakistanais interdit Lashkar-e-Taïba, accusé par New Delhi d´avoir organisé et perpétré les attaques coordonnées de Bombay, qui ont duré près de trois jours fin novembre et fait 163 morts. Parmi eux figurent, selon l´Inde, l´un des principaux organisateurs présumés des attaques, Zaki-ur-Rehman Lakhvi. «Ces arrestations ont lieu dans le cadre de notre propre enquête. Même si les accusations (indiennes) contre eux sont démontrées, nous ne les livrerons pas à l´Inde», a déclaré le ministre pakistanais des Affaires étrangères, Shah Mehmood Qureshi, dans un discours à Multan, dans le centre du Pakistan. «Nous les jugerons nous-mêmes en vertu de la loi pakistanaise», a-t-il ajouté. L´Inde a remis une liste de suspects au Pakistan, son rival de toujours, et exige qu´il les lui livre, en menaçant à demi-mot de représailles dans le cas contraire. L´Inde et le Pakistan, deux puissances militaires nucléaires, se sont déjà affrontés dans trois guerres depuis leur création, en 1947. Les Etats-Unis tentent à la fois de faire pression sur le Pakistan pour qu´il collabore «pleinement» et d´apaiser l´Inde en assurant qu´Islamabad, également victime d´une vague sans précédent d´attentats islamistes depuis 16 mois (plus de 1500 morts), ferait tout pour punir les coupables. Ce qu´Islamabad a effectivement promis à plusieurs reprises. Mais la presse indienne bruisse depuis plusieurs jours de rumeurs de frappes indiennes ciblées sur des camps d´entraînement de combattants islamistes de l´autre côté de la frontière, si les forces pakistanaises n´agissent pas elles-mêmes. «Nous ne voulons pas la guerre mais nous sommes totalement prêts pour le cas où elle nous serait imposée», a averti M.Qureshi, ajoutant: «Nous n´oublions pas nos responsabilités pour défendre notre terre». «Ceci est un message clair: nous sommes pour l´amitié, nous chérissons la paix et nous voulons la stabilité de la région, mais cela ne doit pas être interprété comme de la faiblesse», a-t-il conclu. C´est la première fois depuis le début de la crise indo-pakistanaise consécutive aux attaques de Bombay qu´Islamabad emploie un langage aussi ferme. A peine de retour d´une mission-éclair dans les deux pays pour tenter d´apaiser les tensions, la secrétaire d´Etat américaine Condoleezza Rice a estimé que les arrestations des derniers jours représentaient «un geste positif», selon son porte-parole Sean McCormack. «Il n´y a aucun doute, le Pakistan a fait un pas positif», a renchéri la Maison Blanche par la voix de sa porte-parole, Dana Perino. L´enjeu est de taille: le 13 décembre 2001, l´attaque du Parlement indien à New Delhi par un commando islamiste, qui avait fait 10 morts, avait été attribuée par l´Inde au Lashkar-e-Taïba, et avait conduit les deux pays au bord d´une quatrième guerre, évitée de justesse notamment grâce à la diplomatie américaine. Aujourd´hui, la situation est encore plus dramatique et ni les Etats-Unis, ni l´Inde, ni le Pakistan ne peuvent se payer le luxe d´une guerre, estiment unanimement les experts de la région, les diplomates, mais aussi de hauts responsables pakistanais. Le Pakistan a averti qu´un simple mouvement de troupes indiennes vers la frontière impliquerait automatiquement le retrait de son armée des zones tribales pour un redéploiement à la frontière indo-pakistanaise. Ce que les Etats-Unis, empêtrés dans les combats contre l´insurrection des taliban qui gagne en intensité en Afghanistan, verraient évidemment d´un mauvais oeil.