Le réalisateur s'interroge sur l'état de l'institution scolaire et sa mission de diffusion de la connaissance et du savoir... La 30e édition du Festival des trois continents(Asie, Amérique latine et Afrique) qu'abrite annuellement la ville de Nantes, a vu décerner un prix à l'Algérie qui a participé avec deux longs métrages. Mascarades de Lyès Salem qui n'a cessé de glaner des prix n'a rien eu cette fois, tandis que le film documentaire de Malek Bensmaïl la Chine est encore loin a décroché le prix spécial du jury du festival. Dans l'école de Tiffelfel, nichée au coeur des gorges de Tighanimine dans les montagnes des Aurès, la caméra des Malek Bensmaïl égrène le livre des jours des élèves, de leurs instituteurs et de villageois. Malek Bensmaïl est, en effet, parti à la rencontre de lieux chargés d'histoire. Mais occulté dans les manuels scolaires il s'agit de Tiffelfel où était en poste le couple d'instituteurs Monnerot, les toutes premières victimes de l'insurrection du 1er Novembre 1954. Le réalisateur s'interroge, en outre, sur l'état de l'institution scolaire et sa mission de diffusion de la connaissance et du savoir que le Prophète de l'Islam recommandait d'aller quêter "jusqu'en Chine" (Wa laou fil Sin), citation qui a inspiré son titre au film. Cinquante ans plus tard, Malek Bensmaïl est revenu dans ce petit village chaoui filmer le quotidien morose de ces enfants qui fréquentent cette école où enseignait le couple d'instituteurs français tombés sous les premières balles du déclenchement de la guerre de Libération. C'est à l'école que se forme les mentalités, se forgent les esprits. Culture identitaire, perte de repère historique sur son propre passé national, tout comme pèse cette menace de disparition de notre patrimoine tel qu'il est véhiculé par ce vieux gardien du temple qui sillonne le film comme un fou, une âme en peine...ce sont là les sujets développés dans ce documentaire, s'imbriquant les uns dans les autres, malgré leur pseudo-éloignement. La Chine est encore loin de Malek Bensmaïl sonde, cette fois, le pouls humain via son école pour y déceler ce qui ne va pas. Ce documentaire fait une radioscopie du malaise social partant de ses enfants, cette élite de demain. Produit par Philippe Avril-qui était présent à Alger lors des journées cinématographiques algéro- françaises- ce documentaire, qui avait pour titre originel Poussière d'école, est une coproduction franco-algérienne, réunissant, outre Unlimited, Cirta Films et l'INA, 3 B Production et l'Entreprise publique de la télévision algérienne. La Chine est encore loin décrit, en effet, l'état d'abandon d'un système qui a échoué à former les bons citoyens de demain. Un sujet utile. Le néant est à notre porte. Ces paysages panoramiques doublés de ce silence qui traîne en longueur est la force patente de ce film qui témoigne paradoxalement du désenchantement d'un pays. La Chine est effectivement bien loin..