La marche à laquelle a appelé, hier, l'Union générale des étudiants libres (Ugel) a été empêchée par les services de l'ordre. Aucun incident n'a eu lieu. La solidarité algérienne avec le peuple palestinien change de forme. Après les dénonciations et les meetings dans les salles fermées des officiels, la rue et l'université s'agitent. En se réveillant sur les foudres qui tombent sur les foyers palestiniens, les étudiants ont décidé de casser la monotonie des timides réactions algériennes. Aux environs de 10 heures du matin d'hier, des groupes d'étudiants ont commencé à se rassembler au niveau de la fac centrale d'Alger pour marquer leur soutien au peuple palestinien. A l'ordre du jour, une marche pacifique à laquelle a appelé l'organisation estudiantine Ugel. A 11 heures, ils étaient déjà des centaines à se rassembler à l'intérieur de la fac. Au fil des minutes, le mouvement grandit et d'autres étudiants rejoignent la foule. Entre-temps, les agents de sécurité ont procédé à la fermeture des deux portails d'entrée de l'université Ben Youcef Ben Khedda. Un impressionnant dispositif sécuritaire a été déployé dans le périmètre immédiat pour parer à toute éventualité. A l'intérieur, ça chauffe. Les étudiants demandent l'ouverture du portail pour marcher pacifiquement vers l'ambassade de l'Egypte en Algérie. Les services de l'ordre sont intransigeants et refusent toute négociation. Même les journalistes étaient empêchés de parler aux organisateurs. Des dizaines d'autres étudiants sont bloqués à l'extérieur. «Les images des enfants agonisants qu'on voit à travers les chaînes satellitaires étrangères réveillent en moi un esprit révolutionnaire et j'ai envie de leur arracher les yeux», nous a déclaré un étudiant. «C'est inadmissible le silence complice des dirigeants arabes qui sont unanimes à ne jamais être unanimes», a ajouté un autre. En ce moment, la foule scande à tue-tête des slogans hostiles à Israël et d'autres glorifient la résistance palestinienne. «Israël assassin», ont-ils entonné des minutes durant. Les étudiants, portant des portraits des leaders politiques et armés de Hamas ont brûlé le drapeau israélien.Devant le refus des policiers, les étudiantes ont riposté en lançant des youyous tandis que les étudiants tentaient de défoncer le portail. «On est instruits de ne laisser personne ni entrer ni sortir», a expliqué un policier. «Vive la Palestine, Palestiniens martyrisés, point de défaite, point de capitulation, frappe ô Qessam, aujourd'hui c'est le jour de la vengeance, avec corps et âme, on soutient Ghaza...», sont entre autres slogans scandés par la foule. Les étudiants n'ont pas manqué d'appeler les dirigeants arabes à réagir. Aucun chef n'a échappé à leur colère. Ya Mobarak ya haggar, ya djaban, ya aâmid amrica, hukam khwana, vous avez vendu El Aqsa avec le dollar...ont-ils encore clamé à gorge déployée. Aux policiers qui les empêchaient de sortir, les étudiants ont répondu par des slogans du style «Ulac Smah Ulac, ô vous les policiers, nous sommes aussi des musulmans...» La situation a commencé déjà à prendre de l'ampleur. Les policiers ont du mal à maîtriser la foule qui s'est constituée aux alentours de la fac. Au niveau de la place de la Grande Poste, des centaines des citoyens se sont rassemblés. Et ça a failli dégénérer, n'était l'intervention des forces de l'ordre. Les propriétaires des locaux environnants ont compris que cela pourrait déraper et échapper aux policiers et certains d'entre eux ont vite baissé rideau. A 12 heure 30 minutes, un renfort des forces anti-émeute était arrivé. Matraque à la main, ils étaient sur le qui-vive et prêts à réprimer le moindre mouvement. Ce qui a accentué la colère des étudiants qui n'ont pas pu franchir le portail. Curieusement, peu de temps après, un terrain d'entente a été trouvé entre les deux parties. Les policiers ont acheminé les étudiants protestataires dans des bus au Palais du peuple pour participer au sit-in de solidarité avec les Palestiniens qui devait y avoir lieu.