Premier ministre du Zimbabwe depuis hier, le leader de l'opposition a la tâche ardue de reconstruire un pays en ruine. Le leader de l'opposition au Zimbabwe Morgan Tsvangirai, est devenu hier Premier ministre de son rival de toujours, l'octogénaire président Robert Mugabe, avec lequel il va devoir trouver un moyen de travailler à la reconstruction d'un pays totalement en ruine. «Moi, Morgan Richard Tvangirai, jure de servir au mieux le Zimbabwe dans les fonctions de Premier ministre», a déclaré le chef du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), en prêtant serment devant Robert Mugabe. «Moi, Morgan Richard Tsvangirai jure d'être fidèle à ce serment d'allégeance envers le peuple du Zimbabwe», a-t-il ajouté lors d'une cérémonie au siège de la présidence à Harare. Ses deux vice-Premiers ministres, le chef d'une faction dissidente du MDC Arthur Mutambara et la vice-présidente du MDC Thokozani Khupe, ont prêté serment dans la foulée. Leur gouvernement d'union doit être formé demain conformément à un accord de partage du pouvoir signé le 15 septembre, en vertu duquel Robert Mugabe restera le chef de l'Etat. L'accord vise à sortir le pays de l'impasse politique née de la défaite du régime aux élections générales de mars 2008, qui a précipité l'effondrement de l'économie et des services publics. Plus de la moitié des Zimbabwéens sont menacés de famine et le délabrement des infrastructures sanitaires a généré une épidémie de choléra dont 3400 personnes sont mortes en cinq mois. L'hyperinflation défie l'entendement, à plusieurs milliards pour cent, vidant monnaie nationale, salaires et revenus de toute substance. La production est au point mort. Un des hommes-clés du gouvernement, qui doit entrer en fonction demain selon un calendrier fixé par la Communauté d'Afrique australe (Sadc), est Tendai Biti, le secrétaire général du MDC, connu pour ses déclarations enflammées. Au ministère des Finances, il devra convaincre les donateurs internationaux de délivrer les milliards de dollars d'aide indispensables à la reconstruction. Le MDC a longtemps refusé de rejoindre un gouvernement où il aurait été sous le contrôle de l'Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (Zanu-PF), le parti du président. Le parti garde en mémoire une première expérience de partage du pouvoir, dans les années 80, qui s'était conclue par l'absorption du parti de Joshua Nkomo, rival de Robert Mugabe au moment de l'accession à l'indépendance en 1980, et le massacre de dizaines de milliers de Ndebele, l'ethnie de Nkomo dans le sud du pays. Il faudra du temps pour convaincre la communauté internationale d'accorder sa confiance, note Daniel Silke, un analyste sud-africain indépendant. «Ce n'est que le début d'une route longue et difficile.» Comme pour lui donner raison, la délégation de l'Union européenne (UE) à Harare a salué avec une grande prudence la prestation de serment de Morgan Tsvangirai. L'UE «se tient prête à soutenir le rétablissement économique et social du Zimbabwe, une fois que le nouveau gouvernement montrera des signes de respect pour les droits de l'Homme, l'Etat de droit et la stabilisation macro-économique», a-t-elle dit dans un communiqué. Si MM.Mugabe et Tsvangirai ne parviennent pas à travailler ensemble, la perspective d'élections anticipées est évoquée. En attendant, M.Mugabe, qui aura 85 ans fin février, reste à la tête du pays qu'il dirige d'une main de fer depuis 29 ans.