Alors que Christopher Ross est attendu aujourd'hui à Tindouf, le Maroc campe sur ses positions et ne jure que par son projet de large autonomie. Le moins que l'on puisse dire c'est que la visite de l'envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU, entamée depuis mercredi au Sahara occidental risque d'être sérieusement contrariée. L'arrivée de Christopher Ross à Rabat, a en effet, été précédée par une déclaration inopportune du porte-parole du ministère français des Affaires étrangères. «Comme vous le savez, en adoptant la résolution 1813 en avril 2008, le Conseil de sécurité a appelé les parties au réalisme et à l'esprit de compromis afin de permettre aux négociations d'entrer dans une phase intensive et substantielle. Nous considérons à ce titre que le plan d'autonomie présenté par le Maroc en avril 2007 est une base de négociations pour aboutir à une solution négociée raisonnable entre les parties dans le cadre des Nations unies», a déclaré dans un point de presse le porte-parole du quai d'Orsay le 18 février 2009 concernant l'importance que revêt la tournée du diplomate américain pour la France. La diplomatie française s'est-elle alignée sur les déclarations de l'ancien envoyé spécial dans la région? Peter Van Walsum avait soutenu en avril 2008 que l'indépendance du Sahara occidental était «irréaliste». Il a été mis fin à ses fonctions au mois d'août 2008. La France a déjà pris fait et cause pour le plan d'autonomie présenté par le Maroc. Un projet qui ne laisse aucun espoir à la tenue d'un référendum qui puisse permettre au peuple sahraoui de se prononcer librement sur son indépendance, comme le stipulent les résolutions votées par le Conseil de sécurité (1754, 1783 et 1813). C'est précédé par un tel climat que les consultations ont commencé jeudi à Rabat pour Christopher Ross. Le Premier ministre marocain Abbas El Fassi, qui l'a reçu à dîner en présence des leaders de formations politiques siégeant au Parlement mais aussi du secrétaire général du Conseil royal consultatif pour les affaires sahariennes (Corcas, tribus sahraouies soumises au trône marocain), a tenté une «démonstration de force» pour prouver que l'unanimité autour du projet d'autonomie marocain est sans appel. L'envoyé spécial de Ban Ki-moon pour le Sahara occidental a-t-il été impressionné? Il s'est surtout rendu compte de l'entêtement du royaume alaouite à ne voir de solution au conflit du Sahara occidental qu'à travers leur petit bout de lorgnette: l'autonomie des territoires sahraouis, rien de plus. La priorité de l'envoyé spécial de Ban Ki-moon consiste à ramener les belligérants, le Front Polisario et le Maroc, autour de la table de négociations. Et c'est en ce sens qu'il s'est entretenu avec le ministre marocain des Affaires étrangères, Taïeb Fassi Fihri. La veille de l'arrivée de Christopher Ross à Rabat, Khaled Naciri, porte-parole du gouvernement marocain, avait laissé entendre que «Christopher Ross rencontrera au Maroc la même disponibilité d'esprit et de bonne foi demandées par le Conseil de sécurité pour faire avancer le processus de négociations». Le climat était pourtant tout autre mercredi soir. «Le Maroc ne pourra jamais faire de concession en ce qui concerne la souveraineté nationale de ses territoires», avait déclaré le président du Rassemblement national des indépendants qui s'est fait l'écho des autres partis marocains. A Tindouf, qui sera aujourd'hui la seconde étape de sa tournée, Christopher Ross entendra un autre son de cloche. Celui des réfugiés sahraouis. «Nous attendons de M.Ross de relancer les pourparlers entre les deux parties en conflit, le Polisario et le Maroc, en vue de parvenir à une solution juste et durable du conflit qui garantisse le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination», a souligné le ministre sahraoui des Affaires étrangères, Mohamed Salem Ould Salek. Un message dont doit tenir compte la diplomatie française, car il est en phase avec la légalité internationale et les résolutions votées par le Conseil de sécurité de l'ONU.