La secrétaire d'Etat américaine a mis à profit une tournée euro-orientale pour relancer une diplomatie US malmenée par les décisions unilatérales de l'ère Bush. La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, qui a achevé hier une tournée trépidante de huit jours sur trois continents, a officialisé la nouvelle politique américaine de la main tendue, en direction des amis des Etats-Unis comme de leurs adversaires. De Jérusalem où elle a annoncé l'envoi de deux émissaires à Damas, à Bruxelles où elle a invité l'Iran à participer avec les Etats-Unis à une conférence sur l'Afghanistan et approuvé la reprise du dialogue entre l'Otan et la Russie, ou encore à Genève où elle a convenu avec son homologue Sergueï Lavrov de donner un «nouveau départ» aux relations russo-américaines, Mme Clinton s'est appliquée à marquer la rupture avec la politique d'isolement de l'administration Bush. Et lundi en Egypte, première étape africaine de cette tournée, c'est elle qui s'est avancée vers son homologue syrien Walid Mouallem, pour échanger quelques mots avec lui en marge d'une conférence de donateurs pour la bande de Ghaza. Le lendemain, elle annonçait aux côtés de son homologue israélienne Tzipi Livni l'envoi de deux émissaires américains en Syrie pour tenter d'ouvrir le dialogue avec ce pays que Washington accuse notamment d'avoir commandité l'assassinat du Premier ministre libanais Rafic Hariri en 2005. «Nous n'avons aucun moyen de prédire l'avenir de nos relations avec la Syrie», a-t-elle noté. «Mais je pense que cela vaut le coup d'y aller et d'entamer ces conversations préliminaires». Mme Clinton a aussi proposé la tenue dès la fin du mois d'une conférence internationale sur l'Afghanistan, suggérant que l'Iran, devenu le principal adversaire des Etats-Unis y soit invité. Alors que l'Iran avait boudé en décembre dernier une réunion internationale sur l'Afghanistan organisée par la France, elle l'a appelé à participer à cette conférence, estimant qu'il y avait «de nombreuses raisons» de le faire, dont le problème de l'opium afghan qui l'inonde. Mme Clinton n'a pas réservé son message d'ouverture aux adversaires des Etats-Unis. Elle a aussi promis aux Européens de relancer le partenariat transatlantique qu'ils espéraient après les tensions provoquées. «La leçon que nous avons tirée est claire: nous tirons de la force l'un de l'autre», a-t-elle ajouté. A Ankara, porte de l'Asie, elle a annoncé la prochaine visite du président Barack Obama, qui a promis de prononcer un grand discours à l'adresse du monde musulman. Forte de son expérience de la campagne présidentielle américaine, elle a séduit ses auditoires par sa franchise, sa volonté affichée d'ouverture et de dialogue et la candeur avec laquelle elle a reconnu, au cours d'une discussion publique avec de jeunes Européens à Bruxelles, les erreurs passées des Etats-Unis, aussi bien en matière d'environnement que de gestion économique. Elle a aussi multiplié les apparitions sur les télévisions locales et les petits gestes symboliques comme la remise d'un «bouton de remise à zéro» à M.Lavrov pour briser la glace, ou encore les visites rituelles mais appréciées aux mausolées de Yad Vashem, à Jérusalem, ou d'Ataturk à Ankara. Il n'y a qu'un dossier sur lequel Mme Clinton est apparu hésitante: le processus de paix israélo-palestinien, pourtant sérieusement menacé par l'arrivée probable au pouvoir d'un gouvernement israélien ultra-conservateur. L'ex-sénatrice de New York, fief de la très puissante communauté juive américaine, a limité au strict minimum ses critiques à l'encontre de la relance de la colonisation juive, qu'elle a simplement qualifiée d'«improductive», justifiant son quasi-silence par le fait que le gouvernement israélien n'est pas encore formé.