Dieu le priva de la vue mais cela ne l'a pas empêché de croquer la vie à pleines dents, à sa manière. Il a trouvé une raison de vivre inépuisable dans l'art de la chanson et de la poésie. Mais ce n'est pas tout, puisque Malik Kazoui estime que l'art sans l'instruction, ce n'est pas suffisant. Il poursuit ainsi des études de langues étrangères afin d'être au diapason de la modernité. Lors de notre rencontre, ce jeune de 22 ans nous a impressionnés. Quand il raconte son parcours, on penserait qu'il a vécu soixante ans. La raison, c'est son irruption précoce dans le monde de l'art. Il a eu l'avantage de fréquenter des artistes dès son enfance. Brahim Tayeb a été le premier artiste qu'il a approché. Non pas pour lui apprendre à chanter mais à lire et à écrire. Brahim Tayeb était son voisin et l'ami de son père. Avant d'entrer à l'école spécialisée de Hydra, Malik Kazoui avait déjà fait ses premiers pas dans la maison du savoir grâce à Brahim Tayeb. A 9 ans, il s'inscrit à l'école de Boukhalfa, près de Tizi Ouzou. Ce retour au bercail lui permet d'accéder à l'art par la grande porte. Le comédien et animateur à la chaîne de télévision berbère Brtv, Kamel Tarwiht, découvre son talent un 14 mars, Journée du handicapé. Une semaine plus tard, Kamel Tarwiht offre l'occasion à Malik de monter sur scène pour la première fois. Un vrai bonheur puisque notre jeune artiste a accompagné une idole: Hacène Ahrès en première partie. L'artiste de Larbaâ Nath Irathen a été émerveillé par l'enfant. Puis vient un autre épisode non moins enrichissant. Il s'agit du partage de la scène avec un autre grand chanteur: Zedek Mouloud. Ce dernier était impressionné de découvrir que les textes chantés par Malik étaient sa propre composition. Malik, en se remémorant cet épisode de sa vie, est ému. Il exprime sa profonde gratitude aux deux chanteurs Hacène Ahrès et Mouloud Zedek dont le coup de main est précieux et inoubliable. Malik Kazoui, en revenant sur ses débuts, ne peut pas se retenir de citer ses trois poètes préférés. D'abord, l'incontournable Lounès Matoub, ainsi que Si Moh et Mouloud Zedek. Pourquoi spécialement ces trois artistes? Malik estime qu'une grande sincérité se dégage de leur poésie. En parlant des chansons de ces artistes au riche répertoire, Malik évoque l'émotion qui s'y dégage. Mais il insiste pour dire que la chanson kabyle la plus profonde, la plus émotive et la mieux interprétée est Dewraghten asmi teheyragh de Lounès Matoub. Il apprendra plus tard que quand Matoub avait enregistré cette magnifique chanson d'amour, il pleurait en même temps de chagrin. Un artiste qui fait de Matoub un modèle ne peut que réussir surtout que Malik Kazoui est bien entouré. Des jeunes amoureux de la musique l'assistent et l'accompagnent dans chacun de ses pas. Il s'agit de Amirouche, son manager mais surtout de plusieurs musiciens qui savent partager autre chose que l'argent. Malik Kazoui est aussi poète. A dix ans, il a écrit son premier texte. Il écrit sur tous les thèmes inhérents à la vie quotidienne jusqu'à ce que les feux de l'amour, qui n'épargnent personne, ravagent son coeur. Il élargira alors sa thématique en s'ouvrant sur les sentiments dans ses vers. En musique, ses deux amis Sofiane et Nourredine lui donnent un coup de main, notamment en écoutant les premiers jets de ses compositions. Son manager Amirouche, qui l'a accompagné à notre bureau, nous a affirmé que Malik a une vision très large des choses et un grand sens de l'analyse. Dans les autres cultures, Malik aime Paul Eluard et Charles Baudelaire. Kazoui poursuit ses études juste pour s'instruire car sa vie, il la conçoit uniquement dans l'art et uniquement dans ce domaine. Il dit qu'il est né pour la chanson et la poésie et pour rien d'autre. S'il a une longue liste de bons souvenirs, il est marqué à vie par un seul mauvais souvenir: «J'ai rencontré Lounès Matoub pour la première fois le 16 mars 1998 à Tizi Ouzou. J'avais 11 ans. Nous avons longuement discuté avec lui. Avant de se quitter, il m'a lancé une promesse»: «Quand je reviendrai de France, je m'occuperai de toi», et il a enchaîné en direction des personnes qui m'accompagnaient: «C'est moi qui vais m'occuper de ce garçon». C'était leur dernière rencontre.