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«C'était une mère courageuse et généreuse»
ENTRETIEN AVEC LE FILS DE JOSEPHINE BAKER
Publié dans L'Expression le 19 - 07 - 2009

Il sera présent ce soir à la salle Cosmos Alpha à l'occasion de la projection du film L'autre Joséphine, à 19h.
L'Expression: Tout d'abord une question somme toute banale, la question qu'on pose à tous les enfants de stars. Cela vous fait quoi d'être le fils de Joséphine Baker?
Brahim-Brian Baker: Quand on est gamin, cela ne fait rien du tout. Quand on est plus mûr, on se rend compte qu'on est regardé parfois autrement. Avec la maturité on pense à l'héritage que notre mère nous a laissé et ce n'est pas tant la célébrité du nom mais plutôt celui de son éducation, sa philosophie qui importe. Je reste admiratif de ma mère. En dehors de sa célébrité, ce qui marque c'est son courage et sa générosité. Sans doute que pendant sa jeunesse (à l'époque des années folles), elle a dû bien profiter elle -même de son succès car elle sortait d'une famille misérable aux USA. Mais vite dans les années 1930 et surtout à partir de la Seconde Guerre mondiale, elle a pris conscience de ce qui se passait partout dans le monde et des problèmes entre les hommes. Elle s'est beaucoup engagée contre la violence et dépensé énormément de sa personne, de son temps, son énergie et son argent. Elle a même été ruinée à une période de sa vie, alors qu'elle a été très riche. Pour nous, ruinés c'était toutefois passer d'un château dans le sud de la France, aux Champs Elysée, à Paris. Petits, on étaient encore jeunes pour réaliser qu'elle avait un gros creux financier...
Ma mère, en fait, était métisse, de père blanc et de mère noire, donc métisse. Mais comme elle vivait, enfant, avec sa mère, elle se entait plus noire.
Elle était une Noire, vous êtes un Arabe, double exclusion surtout dans les années 1980 où les manifestations contre le racisme faisaient rage, comment ressentiez-vous cela?
Moi, j'avais aussi des frères indiens, noirs, jaune du Japon, blanc de la Finlande etc. Finalement, ceux qui se sentaient vraiment dans le ton, c'étaient mes frères français. Même mon frère Moïse, a qui ma mère faisait porter la kippa, ne se sentait pas tout à fait comme tous les autres Français du sud de la France. On était une famille pas tout à fait comme les autres. Mais comme on était ensemble, on ne se posait pas tant de questions.
Que faites-vous aujourd'hui pour perpétuer la mémoire et l'héritage de votre mère?
La chose principale, c'est qu'il y a eu la création d'une association Joséphine Baker qui essaye de pérenniser l'esprit, les valeurs et les actions de notre mère. En dehors de ça, j'ai écrit un livre à l'occasion du centenaire de sa naissance. Une biographie à hauteur de ce qu'on a vécu ensemble c'est-à-dire, elle et toute la tribu Arc-En-Ciel. Quand il y a des projets de films fiction ou documentaires comme il y en a deux qui se préparent actuellement eh bien, j'y participe au maximum, en donnant un coup de main que ce soit livre, disque, film, reportage télé ou radio etc.
Vous dites dans le film qu'il y avait deux Joséphine Baker..
J'aurais pu dire 2 ou 3 ou 4. On peut dire qu'il y a l'artiste qui a couru sur presque tout le siècle puisqu'elle a commencé dans les années 1920 et a terminé à Paris en 1975 à Bobino, juste avant de mourir et puis il y a la femme, dans laquelle on trouve la mère qui s'occupait de 12 enfants, la militante engagée qui a fait la guerre, qui s'est engagée auprès de Martin Luther King, qui a fait des conférences, un peu partout dans le monde. Il y a donc l'humaniste, l'idéaliste et un peu l'utopiste, celle qui disait que la fraternité universelle c'est possible. Aujourd'hui, si elle était encore parmi nous, elle continuerait à retrousser les manches pour abolir les frontières q'elle n'aimait pas. Elle rêvait de voir un jour la planète entière sans frontières ni passeports.
S'il y avait nne chose pour laquelle vous lui seriez redevable, ce serait quoi?
En dehors du fait qu'elle nous ai élevés, je lui suis redevable du fait qu'elle m'ait choisi et adopté en plus de me donner des frères et soeurs, de l'amour et de la tendresse, mais aussi une éducation et des principes.
Quelle est l'image qui vous a marqué à tout jamais?
Prier sur scène pendant un concert ou à la fin d'une chanson. Ce n'était pas du cinéma. Elle était croyante à sa façon. Elle croyait en un dieu unique. Elle disait qu'on n'avait pas besoin qu'on soit dans un temple, une mosquée ou une église pour prier. D'ailleurs, elle nous a tous élevés sur la base de la religion d'origine. Nous avons eu pour cela des précepteurs qui nous ont appris un peu la langue, la culture et la religion d'origine. Après, c'était libre à nous de choisir. Moi, je crois à une force mystérieuse. Je parle «chouyia» l'arabe.
On ne peut clore cette interview sans évoquer Michael Jackson qui vouait un grand amour pour les enfants, un peu comme votre mère, qu'en pensez-vous?
Moi je sais que Michael Jackson a entendu parler de ma mère par sa marraine artistique qui était Diana Ross. Elle lui a beaucoup parlé de ma mère. D'ailleurs, Diana Ross devait interpréter il y a 20 ans le personnage de Joséphine Baker dans une fiction. Cela ne s'est pas fait. Depuis, il y a un téléfilm américain réalisé et un projet de film cinéma actuellement. On parle de la comédienne américaine oscarisée Halle Béry. Mais il est évident que Diana Ross a beaucoup parlé et appris à Michael Jackson sur Jospéhine Baker. Il y a aussi un point commun entre eux. Tous deux se sont beaucoup investis dans les actions pour les enfants malheureux et autres. Ce sont deux Noirs américains qui ont eu une vie relativement difficile mais qui,de par leur célébrité, ont essayé de faire des choses positives. Notamment pour la jeunesse et l'enfance que ce soit dans leur pays ou ailleurs.


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