En dépit de cette alarme, on continue encore à badiner avec un phénomène qui peut s'avérer pandémique au moindre relâchement. La menace qui pèse sur l'Algérie est toujours présente, le virus de la mort peut gagner du terrain. Au port d'Oran, la lutte contre la grippe porcine se fait de manière très dérisoire, reposant sur l'usage des produits utilisés lors du dispositif de la lutte contre la grippe aviaire et un seul appareil de détection des températures du porteur du virus. C'est l'aveu qui fait en ce sens quelques minutes après l'accostage d'un bateau venu d'Alicante par ce médecin qui a annoncé, fièrement, la maîtrise de la situation par le service de la médecine des frontières et affirmé que les «virucides désinfectants sont les mêmes que ceux qui ont été utilisés dans le cadre de la lutte contre la grippe aviaire». Pouvons-nous combattre un virus aussi dangereux avec des produits destinés à un autre virus? Aucune suite n'a été donnée à notre question, le médecin interrogé a affiché un silence catégorique. La loi de l'omerta règne en maîtresse des lieux au niveau de l'Entreprise portuaire d'Oran. Tout renseignement fourni pourrait être fatidique. Que ce soit au port ou à l'aéroport d'Oran, le même constat a été observé. Le dispositif de la lutte contre la grippe porcine n'est pas tout à fait reluisant vu les procédés dépassés et non encore développés. Mieux encore, ces mêmes procédés s'appuient sur des techniques visuelles faute d'équipements fiables. Le traitement, en fin d'après-midi de lundi, du bateau venu d'Alicante a été plus que révélateur de l'absence flagrante des moyens de pointe de détection du virus mortel. Tout porte à le croire vu que la stratégie adoptée et mise en application est appuyée par un seul et unique appareil détenu par un seul médecin. En effet, dès que le bateau a accosté, les médecins se sont aussitôt mis à leur besogne routinière. L'opération est simple, les membres de l'équipe médicale effectuent des «scans visuels». En quête des symptômes du virus, ils se faufilent entre passagers les scrutant des yeux un par un. «Nous connaissons parfaitement tous les signes de la grippe porcine», a indiqué un autre médecin. «A la moindre suspicion, nous avertissons, discrètement, nos responsables, une ambulance hautement médicalisée et spécialisée arrive, le sujet est aussitôt pris en charge», a-t-il enchaîné ajoutant qu'aucun détail n'est omis. «Nous avons scruté plus de 1000 passagers, aujourd'hui», a fièrement affirmé un autre médecin qui n'a rien trouvé de mieux à faire que de dissimuler son badge de peur que nous divulguons son identité. Et une autre blouse blanche d'enchaîner: «le scan visuel est fiable en attendant l'arrivage des thermo-scans promis». De l'autre côté du bateau, le défilé des voitures est incessant. D'autres médecins ont pour mission la désinfection des véhicules et s'assurent que le virucide «Rotuluve» a bel et bien gagné les roues de toutes les voitures déchargées. Le «Rotuluve» est un produit qui a été utilisé dans la lutte contre la grippe aviaire. En plus de ce produit, un autre, appelé «Pédéluve», est réservé aux passagers devant emprunter à pied la passerelle du bateau. Dépourvus de tous les moyens technologiques, ces médecins qui affrontent le virus de la mort se battent, à eux seuls, contre vents et marées. Plusieurs cas de grippe porcine ont été signalés un peu partout. L'alerte est maximale. En dépit de cette alarme, on continue encore à badiner avec un phénomène qui peut s'avérer pandémique au moindre relâchement. Occulter cette réalité est une négligence systématique. Les équipements promis tardent à venir. Pourtant leur installation a été annoncée il y a plus d'un mois. En fin de compte, la montagne accouche d'une souris, aucune suite n'a été donnée hormis les quelques coups médiatiques en trompe-l'oeil. Selon un médecin des frontières, le port d'Oran sera bientôt bénéficiaire d'un ou de deux thermo-scans. La mission de lutte contre la grippe porcine s'avère très rude. Les habitants de la partie ouest du pays encourent une véritable catastrophe. Les moyens usités étant lamentables, le ton est donné à la vigilance. «Il faut faire très attention», a indiqué un médecin. Tout sujet soupçonné doit être signalé et aussitôt transféré au niveau de l'hôpital de référence, l'Etablissement hospitalo-universitaire d'Oran. Toutes les brèches sont colmatées. La traque reprend de plus belle ailleurs, tandis qu'en Algérie, on continue à occulter le degré de dangerosité du virus A/H1N1 qui risque de prendre de l'ampleur.