Le recours à l'action de rue pour dénoncer des insuffisances locales et se faire entendre est devenu systématique. Des milliers d'usagers de la Route nationale 26 ont dû, hier, faire un long détour pour rallier la capitale des Hammadites. Et pour cause! Cet important axe routier a été fermé à la circulation dès le petit matin par les habitants de Oued Ghir. Ces citoyens frondeurs ont tenu à exprimer leur ras-le-bol. L'eau, le gaz, l'électricité et les routes sont autant de revendications soulevées à travers cette manifestation qui tend à se généraliser en basse Kabylie. Autant les revendications étaient légitimes au même titre que l'acte de manifester, autant cette manière de faire est contraignante non pas pour les responsables qui ont failli à leur mission, objet de contestation, mais pour des usagers qui n'ont aucun rapport avec le conflit. Hier, la colère des usagers de cette Route nationale s'est ajoutée à celle des habitants frondeurs pour donner lieu à un cocktail explosif. Le recours à l'action de rue pour dénoncer des insuffisances locales est devenu ces jours-ci systématique. Si de par le passé on réfléchissait par deux fois avant d'opter pour la fermeture d'une route, aujourd'hui, la décision est prise en un quart de tour. Les manifestations locales ne portent pas leurs fruits. Il faut toucher le maximum de gens et gêner le plus possible pour se faire entendre par une administration «sourde», expliquait hier un manifestant qui rappelle si bien les différentes initiatives entreprises avant de recourir à l'action du jour. Il est vrai reconnaît-il que la blocage de la route pénalise beaucoup plus des gens qui n'ont rien avoir avec le problème posé mais, estime-t-il encore, c'est le seul moyen d'alerter les autorités de wilaya. De leur côté les usagers s'indignaient du manque de considération à leur égard. «Nous restons solidaires avec ces gens qui manifestent mais il faut qu'ils sachent que nous n'avons rien à voir dans le règlement de leurs problèmes», indiquait hier un usager obligé à continuer son chemin à pied jusqu'à Béjaïa. À l'heure où nous mettons sous presse, des milliers de véhicules sont restés bloqués sur une distance de 20 kilomètres. Les appels que nous avons reçus durant toute la matinée témoignent à eux seuls de «cette catastrophe», pour reprendre les termes de l'un de nos interlocuteurs. La population de basse Kabylie s'énerve. Un signe d'un malaise grandissant. On ne trouve plus d'oreille attentive. Les élus sont plus préoccupés par les tiraillements que par leur mission essentielle, celles de soulager leurs concitoyens d'un quotidien difficile. Les actions de rue se multiplient un peu partout en Kabylie et déjà des voix s'élèvent pour parler de «manipulation». Mais un ras-le-bol généralisé existe. Il suffit de visiter les communes, y compris celles de grands centres urbains pour s'en rendre compte. L'incompétence côtoie allégrement l'insouciance pour aboutir à un état des lieux, qui, à lui seul, explique cette colère.