Alors que les responsables centraux multiplient les signes de bonne volonté en direction des citoyens de Kabylie, force est de constater que les politiciens de la région ne semblent pas l'entendre de cette oreille. Le boycott systématique de toute autorité en visite à Tizi Ouzou et Béjaïa ne peut être interprété que comme une détermination des partis politiques représentés dans ces deux villes à couper court à tout contact avec les pouvoirs publics centraux. Une attitude que certains observateurs n'hésitent pas à qualifier de «quelque peu populiste», le but étant de caresser dans le sens du poil la Coordination des ârchs, dont beaucoup d'animateurs à ce jour, refusent tout dialogue avec le Chef du gouvernement. En effet, selon les mêmes observateurs, le refus des élus locaux de la wilaya de Tizi Ouzou d'accorder le bénéfice du doute au nouveau wali sous prétexte que le pouvoir «tergiverse» dans la satisfaction des revendications des populations de Kabylie, ne peut être recevable du fait que le premier rôle de ces élus n'est autre que d'oeuvrer au développement économique et social des communes dont ils ont la charge. Ces élus persistent à mettre en avant leur pleine solidarité avec la Coordination des ârchs et relèguent au second plan l'importante enveloppe débloquée par l'Etat qui se monte, pour la seule wilaya de Tizi Ouzou, à 12 milliards de dinars. Un citoyen de Béjaïa a confié à L'Expression, à juste titre d'ailleurs: «J'ai l'impression que tout le monde dans la région craint de dire autre chose que ce qu'affirment les animateurs des ârchs. Pour ne pas être en reste, les élus des partis politiques ont complètement oublié leur mission originelle pour ne se consacrer qu'au jeu de coulisses, histoire de rester coûte que coûte dans l'air du temps.» Dans la situation exceptionnelle que vit la Kabylie, la mission des élus locaux serait de faire pression sur la hiérarchie, non pas pour appuyer des revendications largement prises en charge par un mouvement revendicatif, mais de demander plus d'argent pour amorcer le décollage réel de la région, nous a assuré en substance un cadre de l'Etat qui ne comprend pas pourquoi aucun responsable politique en Kabylie n'a eu l'idée d'engager un débat sérieux sur le plan de la relance économique. La Coordination des ârchs, qui a inscrit dans sa plate-forme un plan de sauvetage économique de la région, donne l'impression de ne pas être sensible à la décision d'octroyer 12 milliards de dinars à Tizi Ouzou. La fixation sur le départ des gendarmes semble avoir un véritable effet d'aveuglement sur des animateurs qui, de plus en plus déconnectés des réelles aspirations de la majorité silencieuse, décident d'eux-mêmes ce qui est bon et ce qui ne l'est pas pour plus de 7 millions d'âmes. Autant d'Algériens qui vivent dans une région démunie sur les plans minier et agricole. L'oppositionnisme des partis et de la Coordination des ârchs est-il l'émanation d'une volonté populaire de refuser le dialogue et l'argent de la relance économique pour une histoire de retrait d'un corps constitué de la Kabylie? Cette question restera sans réponse en l'absence d'un sondage sérieux. Toujours est-il que le citoyen est en droit d'être informé sur tout ce qui a trait à sa région. Il est important de le mettre au courant en toute objectivité des tenants et aboutissants d'une situation qui semble servir de trop-plein à des politiciens en mal de popularité. C'est aussi cela le devoir des élus locaux.