Cette oeuvre a été une preuve supplémentaire du talent d'un réalisateur chevronné et déterminé. Après la publication d'un premier ouvrage inédit de feu Azzedine Meddour intitulé Dernières nouvelles, voilà que les éditions ANEP s'intéressent à nouveau au travail de cet imminent cinéaste, disparu trop tôt de la scène artistique et cinématographique alors qu'il promettait d'apporter beaucoup au cinéma algérien. Ainsi, un deuxième livre de cette grande figure de la réalisation est paru chez cette maison d'édition. Il s'agit en fait d'une réédition d'un livre, lu sûrement par beaucoup, dont l'histoire a été adaptée au cinéma et réalisée par feu Azzedine Meddour et qui a donné naissance à un chef-d'oeuvre cinématographique qui lui a valu le Grand Prix du public à Montréal. La montagne de Baya, a été une preuve supplémentaire du talent d'un réalisateur chevronné et déterminé, que rien ne pouvait arrêter. Ainsi, ni le drame, ni les problèmes administratifs, ni la conjoncture sécuritaire n'ont pu avoir raison de sa détermination. Et, malgré toutes les péripéties par lesquelles il est passé, malgré l'accident qui s'est produit sur le chemin du tournage et qui a coûté la vie à treize personnes de l'équipe du tournage et en a blessé vingt-cinq, malgré tous les obstacles et les freins mis sur sa route, «Baya» a quand-même pu émerger et voir le jour. Après Douleur muette, Entre nous, Le chacal doré, La légende de Tiklat, Polisario année 15, Djurdjura et Ô combien je vous aime, La montagne de Baya est son chef-d'oeuvre, une belle réalisation qui le fera triompher au Festival de Venise. Dans une présentation de l'ouvrage sorti à l'ANEP, écrit par Kamel Gaya Zennadi, qui était l'assistant de feu Azzedine Meddour, qualifiera cette oeuvre de «fresque historique peinte dans une dimension plastique des plus originales», c'est en fait une «oeuvre dans laquelle se retrouvent deux données essentielles de ses réalisations: l'histoire et la mémoire.» La montagne de Baya, ce roman, ce film, cette réalisation cinématographique qui a bousculé les rangs et révolutionné le cinéma algérien a été surtout un moyen d'afficher publiquement et sans peur, son refus et sa révolte, le refus de la fatalité et la révolte contre l'injustice. Le personnage principal de ce roman, Baya, est une femme qui symbolise justement ce défi, ce refus et cette révolte. Par son obstination, son entêtement à refuser tout ce qui pourrait nuire à son honneur et sa volonté de vaincre l'injustice et le déshonneur, le personnage de Baya incarne en fait, une légende et représente aussi «le ferment d'un renouveau qui porte une nouvelle dignité» selon les propres mots du défunt Tahar Djaout qui l'assimilera aux autres héroïnes qui, «depuis Sophonisbe, ont jalonné l'histoire de l'Algérie» et ont lutté «contre les forces toujours aux aguets qui veulent empêcher le pays d'avancer à la rencontre de l'histoire et de la modernité». Tout au long de cette fresque historique où s'entremêlent courage, peur, défi, défaite, amour, déception et victoire, les personnages de Baya, Djendel, Mahmoud, Aldjia, Belaïd, Madjid, Mouloud et les autres, nous entraînent dans un périple fulgurant qui se termine certes tristement avec la mort de Djendel mais où on sent une note d'optimisme, où on entrevoit une lueur d'espoir qui jaillit de l'horizon. La montagne de Baya, réédité par les éditions ANEP mériterait sûrement une première lecture pour ceux qui ne connaissent pas encore l'histoire de cette légende, ou même une seconde lecture de la part de ceux qui connaissent déjà Baya, mais sans la nouvelle tenue que lui fait porter l'ANEP grâce à une couverture imprégnée de beauté, de nostalgie et d'espoir en des jours meilleurs.