Le passe-droit est le premier raccourci, dans les étroits sentiers de la corruption. Définir clairement les responsabilités pénales de l'agent de l'Etat ainsi que celles du magistrat semble être pour le gouvernement de Benflis, la première pierre pour l'édification d'un Etat de droit. C'est du moins ce qui ressort de la nouvelle disposition qui sera soumise demain à l'appréciation du Parlement. En effet, le projet de programme gouvernemental prévoit de renforcer le rôle de la justice dans la protection de la société, par la mise en place d'un dispositif juridique visant à «incriminer le favoritisme et les passe-droits». Cette mesure, qui vient en adéquation avec le rôle de la protection de la société reconnu à la justice par la Constitution, sera poursuivie par l'élaboration d'un dispositif juridique tendant à «préciser les règles de déontologie judiciaire et à mieux cerner la responsabilité personnelle du magistrat», précise le document qui sera soumis à débat demain à l'APN. Le projet de programme du gouvernement de M.Ali Benflis souligne, à ce titre, que «la moralisation des services publics, commence par la justice». Aussi est-on amené à penser que cette disposition est, peut-être, le premier pas vers une batterie de textes de lois réprimant la corruption à travers notamment la définition claire des responsabilités pénales, pour les agents économiques administratifs ainsi que ceux de la justice. Outre le recours à la formation de magistrats spécialisés pour mieux accompagner les mutations économiques et sociales, la priorité du gouvernement consiste à donner plus de rigueur à l'action de la justice, pour permettre une bonne flexibilité des mécanismes juridiques et réglementaires afin de consacrer la souveraineté et l'indépendance de la justice. Cela se traduira par le nouveau Code de magistrature et le Conseil supérieur de la magistrature qui connaîtront une profonde révision, à même de faire aboutir le plan d'urgence adopté en octobre 2000. Tous les textes juridiques seront passés au peigne fin dans le cadre d'un plan complémentaire à celui de 2000. La nouvelle disposition en question est censée donner les qualifications juridiques précises des différentes pratiques caractérisant le passe-droit et le favoritisme. Ainsi, la priorité est de combler les lacunes soulevées par les deux commissions en charge de la réforme de la justice et de l'Etat. Dans ce contexte, un organisme exécutif sera spécialement créé au cabinet du ministre de la Justice, garde des Sceaux, sera chargé de surveiller la bonne marche de ces réformes et la détection de toutes les anomalies liées au passe-droit et à la mauvaise application de la loi. N'y a-t-il pas là les prémices d'une guerre contre la corruption ? La nouvelle disposition semble être une première vers d'autres textes relatifs à la corruption. La question s'impose dans les milieux de la justice qui n'écartent pas l'éventualité de voir un jour des magistrats enquêteurs chargés de guetter les traces des dossiers noirs.