Le directeur du journal, Ali Fodhil, a dédié le succès de sa publication à toute la corporation. La presse algérienne vient de se distinguer avec la performance réalisée par le quotidien arabophone Ec Chourouk en atteignant un tirage de 820.000 exemplaires par jour. Cela fait de lui le premier quotidien dans le monde arabe détrônant par la même occasion l'égyptien Al Ahram, descendu à moins de 500.000 exemplaires par jour. Le directeur du journal, Ali Fodhil, ne compte pas s'arrêter en si bon chemin. Les perspectives? Il en parle. Il est prêt à diffuser un million d'exemplaires si les imprimeries arrivent à répondre à cette demande. Ce qui n'est pas du tout acquis à l'heure actuelle. Les imprimeries du Centre, de l'Est et de l'Ouest ne peuvent pas répondre à cette exigence car leurs engagements avec d'autres journaux ne leur laissent guère de plage horaire suffisante pour augmenter le tirage du quotidien. La solution? Elle semble toute trouvée. Le directeur songe déjà à acquérir une imprimerie pour dépasser cet obstacle technique qui entrave l'expansion de la publication et la prive de nouveaux lecteurs. Mais quelle a été la recette de l'équipe rédactionnelle pour attirer tant d'inconditionnels? Ali Fodhil répond en soulignant que la rédaction a tout le temps innové en publiant des informations de proximité qui intéressent le citoyen et reflétant le vécu de son quotidien. En collant si près au lecteur, le journal ne risque-t-il pas de sombrer dans le conformisme, voire dans le conservatisme? L'accusation est rejetée en bloc par le directeur selon lequel les articles ne font que refléter l'état de la société. Notre interlocuteur n'entend nullement bousculer les moeurs de la collectivité. Il donne des exemples en disant que la rédaction ne peut pas dénoncer ce qui est jugé comme des comportements portant atteinte à la religion. Il minimise même le penchant de la presse en langue arabe à réserver la part du lion dans ses pages à des sujets consensuels ou en tout cas moins provocateurs. Ali Fodhil estime que ces tares pouvaient être associées à cette presse dans les années 1990. Par contre, à l'heure actuelle, ses acteurs ne sont plus complexés par ce genre de réflexions car il pense que les journaux ayant choisi le mode d'expression en arabe ont conquis un large lectorat justement parce qu'ils ont su diversifier leurs thèmes et ne plus rester prisonniers d'un certain carcan. Pour preuve de l'évolution thématique d' Ec Chourouk, c'est le site de la publication qui est cité comme référence. Ec Chourouk online existe en français et en anglais pour toucher un lectorat international. Les informations qui y sont disponibles traitent en particulier de l'économie et de la situation sécuritaire. A terme, la rédaction du site sera entièrement indépendante et pourra ainsi mettre à la disposition des internautes des informations qui ne sont pas nécessairement accessibles sur la version en papier. Cette version ne compte d'ailleurs pas faire des petits. Il n'y aura pas de suppléments indépendants pour le sport ou pour d'autres thèmes. Comme il n'y aura pas, non plus, d'édition en français sous format tabloïd. Les suppléments d'Ec Chourouk se déclinent plutôt sous forme de cahiers. Il y a ainsi deux ou trois pages qui sont consacrées à chacune des régions d'Algérie pour rapporter davantage d'informations de proximité. La Kabylie, l'Est et l'Ouest ont leurs pages spécifiques. Cette manière de faire sera affinée. Ainsi, pour l'Ouest, par exemple, chaque groupe de wilayas ou de régions aura sa propre édition comme ce sera le cas pour Mostaganem et Maghnia et ce dès 2010. Pour rassembler des informations dans cette surface rédactionnelle, le journal a recruté pas mal de correspondants. A Tizi Ouzou et à Béjaïa, il y a respectivement 8 et 4 correspondants. A la rédaction d'Alger, ce sont environ 40 journalistes qui veillent à informer le lecteur. En tout, le journal emploie quelque 300 travailleurs. Car en plus de la rédaction, la publication a son propre réseau de distribution dans certaines régions comme le Centre puisque disposant d'une flotte de fourgons. A signaler que Ali Fodhil a débuté sa carrière en 1980 à Ec Chaâb avant de rejoindre El Massa en 1985. Quelques années après vint le 5 octobre 1988 suivi de l'ouverture du champ médiatique au privé. Il y eut d'abord la création d'Ec Chourouk Hebdo avant que le directeur actuel ne participe à la création d'un quotidien qui a traversé moult péripéties avant d'acquérir une notoriété dans le paysage médiatique algérien, ce dont il est très fier. Il y voit même des motifs de fierté pour l'ensemble de la corporation et même du pays, car ce n'est pas rien que de décrocher le titre de «premier journal du monde arabe» et en arabe. Paradoxalement, Ali Fodhil n'attribue pas le succès du journal uniquement à la seule arabisation croissante de l'enseignement qui lui fournit une masse importante de lecteurs. Son argument est simple. Il y a plus de cinquante quotidiens arabophones et tous n'ont pas l'aura d'Ec Chourouk, ce qui lui fait dire qu'il y a incontestablement une touche indéniable d'innovation. Il regrette que certains confrères ne fassent pas preuve de fair-play pour lui reconnaître le savoir-faire et le talent et qu'ils versent plutôt dans le dénigrement en l'accusant implicitement d'avoir gonflé les chiffres du tirage.