Le projet tant controversé a été remis en selle, au cours d'une rencontre au siège du FLN, quarante-huit heures avant que le ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements ne soit auditionné par le président de la République. Comme timing millimétré, le secrétaire général de l'instance du Front de libération nationale qui a présidé la réunion de mardi dernier, ne pouvait faire mieux. Le coup semble plutôt réussi. Simple solidarité partisane ou coup de canif porté à la sacro-sainte Alliance présidentielle? La question ne se serait pas posée si «l'événement» n'était survenu quelque six mois à peine après que le Premier ministre, chef du gouvernement à l'époque, n'ait dévoilé que la stratégie industrielle «version Temmar» ne fut jamais avalisée en Conseil des ministres. «Pour cette stratégie industrielle, je vais être brutal. Elle a fait beaucoup plus l'objet de communications que d'actions. Elle n'a jamais été adoptée en Conseil des ministres», avait déclaré le 11 mars 2009 sur les ondes de la Radio nationale, Ahmed Ouyahia. «Nous avons présenté au gouvernement un projet sur la stratégie industrielle, dont le cadre a été approuvé. Nous allons nous rencontrer chaque semaine pour approfondir le dialogue sur le sujet point par point», avait pourtant annoncé de son côté vers la fin de l'année 2006, Abdelhamid Temmar. Le Premier ministre s'est exprimé plus de deux années après les déclarations du ministre de l'Industrie. Le projet venait tout juste de prendre corps et son initiateur lui prédisait déjà un rôle de premier ordre. Et pour cause. L'objectif étant de préparer l'économie nationale à l'après-pétrole et de réduire par conséquent sa dépendance par rapport aux hydrocarbures. Et l'on commença à sérieusement croire que les jalons d'une économie productive étaient définitivement posés. L'euphorie allait trop vite retomber. Il faut reconnaître toutefois que le ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements est revenu, depuis la tenue des Assises nationales de l'industrie, qui ont servi d'antichambre à celles de la stratégie industrielle, à beaucoup moins d'ambition pour son projet. «Ces assises ont dépassé toutes nos attentes, avec la participation de 900 personnes, parmi elles plus de 600 ont travaillé au niveau des commissions pendant trois jours d'affilée», avait affirmé Abdelhamid Temmar à la fin du mois de février 2007, visiblement très satisfait du pas qui venait d'être franchi. Cet optimisme allait toutefois baisser d'intensité au fil du temps qui passait. La plus spectaculaire et sans doute la plus inattendue des sorties médiatiques du ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements qui allait dérouter l'opinion publique a eu lieu au mois de décembre 2007, à l'occasion d'une rencontre nationale organisée à Alger, à l'hôtel Aurassi, par l'Union nationale des entrepreneurs algériens, l'Unep. «Nous n'avons pas de grande stratégie industrielle», avait avoué ce jour-là le ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements. La tribune que vient de lui offrir Abdelaziz Belkhadem à l'occasion de la rencontre organisée le 15 septembre au siège du Front de libération nationale lui a permis de revoir sa copie. De passer l'éponge sur les tâtonnements et les errements passés qui ont conduit l'économie algérienne droit dans le mur, sans nous préciser pour autant s'il avait abdiqué lui aussi. «Il faut totalement oublier l'industrie "industrialisante", l'industrie légère et lourde...Maintenant nous démarrons avec une base solide, nous avons la stabilité, nous avons l'argent ainsi que les cadres et les compétences.» Son plus fervent supporter durant cette soirée ramadhanesque, aura été sans aucun doute le président-directeur général d'Air Algérie. «Mais qui est donc l'auteur des freins de la mise en oeuvre de la stratégie industrielle?» s'est demandé Abdelwahid Bouabdallah. Cette rencontre, qui s'est déroulée dans un cadre informel, concerne des choix stratégiques qui doivent mettre sur les rails une économie productrice de richesses, renforce encore un peu plus les observations du Premier ministre au sujet du projet de stratégie industrielle qui a été proposé voilà maintenant près de trois ans. Des communications. Sans plus. Elles ont connu leur prolongement au siège du parti majoritaire à l'Assemblée nationale sous la houlette de l'ex-chef du gouvernement. La donne, quant à elle, a changé de main. «La stratégie industrielle doit désormais être adaptée au papier millimétrique que sont les mesures prises par le chef de l'Etat et que j'ai commencé à mettre en oeuvre», avait tenu à préciser Ahmed Ouyahia au mois de mars 2009. Abdelaziz Bouteflika en a dessiné les contours lors de l'audition du ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements.