La Palestine a été au coeur de la journée du samedi, sans oublier le thème du voile dans la société arabe, un sujet très délicat... La Cité sociale de Fameck (France), fréquentée par de nombreuses communautés qui viennent ici manger en toute convivialité, mais aussi regarder des films, continue à drainer du monde chaque jour. Le week-end en France est une occasion de plus pour sortir. Samedi, le public a eu droit, entre autres, à la projection de trois longs métrages, dont le fameux Le Temps qu'il reste d'Elia Suleiman, là encore, laissant l'assistance comme à Alger, bizarrement sur sa faim. D'aucuns le trouvaient en deçà des attentes et moins virulent que son premier film Intervention divine. Un autre film, par contre, qui a suscité un grand engouement est Amours voilées du réalisateur marocain Aziz Salmy. Film au titre évocateur et à l'affiche incongrue (une femme voilée embrassant un homme), cela suffit pour attiser la curiosité. Le public, qui ne s'est pas fait prier, nombreux était venu découvrir cette anomalie pas très commode dans les sociétés arabo-musulmanes a fortiori, à visage découvert.. Car c'est bien là ou le bât blesse. Le film a le mérite de «dévoiler» l'hypocrisie de la société arabe qui se prétend puritaine et chaste alors qu'elle est comme partout dans le monde. Une société qui vit, qui s'amuse, qui aime...mais en cachette, veillant à ne pas porter atteinte à son fameux «honneur». Batoul, une jeune femme de 28 ans, médecin, découvre l'amour pour la seconde fois. Elle porte en elle une grande cicatrice, celle du décès 10 ans auparavant, du garçon qu'elle avait aimé mais hélas! décédé alors qu'il se dirigeait vers sa maison. Batoul est élevée dans un milieu bourgeois, mais conservateur où il n'est pas question de fréquenter un homme avant le mariage. Le jour où elle rencontre Hamza, elle se laisse aller à la passion dévastatrice et transgresse tous les principes qu'elle a toujours revendiqués pour se donner à l'homme qui la fascine. Le mois de Ramadhan approche, elle met le voile, elle est aussi demandée en mariage par un de ses proches assez conservateur. Celui qu'elle aime, refuse de l'épouser et critique son «déguisement» (le voile). Complexe, ce film met en scène les tiraillements de cette femme et les contradictions qui l'habitent. Le voile ici, se veut un fond protecteur contre le danger. Une sorte de repli sur soi pour se réfugier de nouveau dans la repentance, à chaque fois qu'un nouveau drame arrive. «Toute cette histoire aurait pu se terminer rapidement et convenablement parce que, les héros classiques des histoires d'amour sont en place, si le port du foulard ne s'est pas glissé entre les deux protagonistes.» lit-on dans le synopsis. Vraiment ambigü comme histoire. Le film faut-il le noter a suscité de grandes polémiques au sein des milieux conservateurs marocains. Le réalisateur d'ailleurs refuse souvent de le montrer dans les pays arabes, craignant subir encore une fois la foudre des islamistes. Décrivant les rapports complexes qui unissent l'homme à la femme, sans oublier la forte fraternité qui lie Batoul à ses copines, c'est d'abord le «côté humain» qui a intéressé le réalisateur, a-t-il souligné, sans vouloir dénoncer quoi que ce soit. Pour lui, le voile est courant dans la société arabe et ne doit pas être un frein dans notre vie de tous les jours. Interprétée par une comédienne algérienne vivant en France, Amours voilées semble plaider le courage de la femme et son émancipation. A noter que le réalisateur Aziz Salmy a présenté dans la matinée le film dans des lycées de Fameck et animé avec eux un débat. Ceci fait partie des actions de la Ligue de l'enseignement en ce qui concerne son rôle didactique pour le rapprochement des cultures dans la ville. Dans un autre registre, moins à l'eau de rose, est Amreeka de Cherien Dabis. Le film raconte les péripéties de Mouna, divorcée et mère d'un adolescent vivant au ceur des territoires occupés, en Palestine. Ayant marre du quotidien éprouvant qu'elle mène, elle décide de partir aux USA chez sa soeur installée au fin fond de l'Illilois depuis 15 ans. Les événements du 11 septembre vont créer la suspicion envers les Arabes de toutes nationalités. Même s'ils ne sont pas musulmans, Mouna et son fils vont subir moult humiliations aux USA. Traité de terroriste, son fils sera amené à apprendre à se défendre contre son gré, pour défendre aussi l'honneur de sa mère, de son pays et de tous les Arabes. Trop lourd à supporter. D'énormes tensions s'abattent sur la famille. Mouna rencontre l'enseignant de son fils, un juif polonais, né au USA. Faisant partie des minorités comme elle. Il prend en sympathie cette famille, car il partage sa détresse. Mouna et son fils Fadi vont devoir trouver leur place. Aussi, les USA sont partis en guerre contre Saddam Hussein. Qu'à cela ne tienne, Mouna n'est pas près de rendre les armes... Film très émouvant et profondément réaliste, Amreeka découvre la face hideuse d'une Amérique elle-même pratiquant une autre forme de terreur et de racisme envers une partie de sa population. Comédie pertinente, Amreeka rend compte de ces différentes cultures et leur tentative d'adaptation dans un pays étranger. La notion du retour est omniprésente. La Palestine est dans cette maison, au moment où l'on traverse sa porte. Comme quoi, comme dirait Mahmoud Darwich, «la Palestine est là partout, elle m'accompagne où je vais». Très touchante est cette réplique dite par Mouna au guichetier de l'aéroport: «Je n'ai pas de nationalité car pas de pays. Il est occupé depuis 40 ans...». Très beau film, découvert au Festival de Cannes cette année.