Après l'attaque de jeudi à Lahore qui s'est soldée par une trentaine de morts, il y eut hier un double attentat-suicide, dont l'un par une kamikaze, occasionnant une dizaine de morts. Au moins 11 personnes ont été tuées hier dans un double attentat-suicide visant la police à Peshawar, dans le nord-ouest du Pakistan, nouvel épisode d'une série d'attaques très meurtrières revendiquées pour la plupart par les taliban liés à Al Qaîda. Fait extrêmement rare, l'un des deux kamikazes était une femme. Cet attentat est le sixième en 12 jours également marqués par deux séries d'assauts spectaculaires contre le QG de l'armée près d'Islamabad et trois installations de la police à Lahore, dans l'est, démontrant l'impuissance des forces de sécurité à endiguer la détermination de kamikazes de plus en plus aguerris. Cette série d'attaques, pour l'essentiel revendiquées par les taliban, a fait 176 morts. La dernière vague marque l'intensification et l'expansion jusque dans les grandes villes d'une véritable guérilla que livrent depuis plus de deux ans les extrémistes islamistes au gouvernement et à l'armée, accusés par les taliban et Al Qaîda de s'être alliés à Washington dans sa «guerre contre le terrorisme» depuis fin 2001. Hier matin, des policiers ont essayé de stopper un homme et une femme à moto, mais cette dernière a déclenché immédiatement la bombe qu'elle portait sur elle à proximité du bâtiment de l'Agence Centrale d'Investigations (CIA), la police criminelle, à Peshawar, selon le récit des policiers. Quelques instants après, un second kamikaze faisait exploser sa voiture piégée contre l'immeuble, en plein quartier militaire de cette capitale de la province du nord-ouest, qui compte plus de 2,5 millions d'habitants. Onze personnes ont été tuées, dont trois policiers, deux femmes et un enfant, selon la police. Le grand immeuble de briques rouges de deux étages de la CIA était complètement éventré au milieu d'un ballet d'ambulances dans lesquelles des policiers et des soldats chargeaient des blessés, certains les jambes entravées par des chaînes, des détenus manifestement. Jeudi déjà, au moins une dizaine d'hommes armés de fusils-mitrailleurs, de grenades et équipés de vestes bourrées d'explosifs avaient attaqué quasi-simultanément à Lahore le siège de la police criminelle, une école de police et le centre d'entraînement des commandos de la police. Les combats pour les repousser ont duré jusqu'à quatre heures dans le cas du centre d'entraînement et se sont soldés par un bilan très lourd: 28 morts dont 16 policiers, trois civils et neuf assaillants. Les assauts n'ont pas été formellement revendiqués mais ils s'inscrivent dans la continuité des attaques et des attentats-suicides perpétrés par des kamikazes taliban et qui ont fait près de 2300 morts dans tout le pays en un peu plus de deux ans. Jeudi également, un attentat-suicide à la voiture piégée visant un poste de police à Kohat, dans le nord-ouest, avait tué 11 personnes, dont huit civils et, dans la soirée, une voiture piégée explosait entre deux immeubles habités par des employés du gouvernement à Peshawar, tuant un enfant de 5 ans. L'attaque la plus audacieuse et la plus embarrassante pour les forces de sécurité date de samedi et dimanche: un commando de 10 taliban déguisés en soldats avait pris d'assaut le quartier général de l'armée à Rawalpindi, près d'Islamabad, puis pris en otage pendant plus de 20 heures, 42 militaires et des civils employés par l'armée. Onze militaires au total ont été tués, dont un général, ainsi que trois otages et neuf assaillants. Le Mouvement des taliban du Pakistan (TTP) a revendiqué la plupart des attentats et attaques récents. Ce mouvement, qui a fait allégeance à Al Qaîda, a promis de «venger» la mort de son chef et fondateur, Baïtullah Mehsud, tué le 5 août par un des innombrables missiles que les drones de l'armée américaine, basée en Afghanistan, tirent régulièrement sur les zones tribales.