L'auteur revient sur les luttes acharnées dans la Wilaya III ayant valu à la région l'opération «Jumelles», qui fut «le dernier espoir de De Gaulle». La guerre d'Algérie continue d'alimenter les bibliothèques et les librairies. Les témoignages autour de cette page très importante et glorieuse de notre histoire, se succèdent et ne se ressemblent pas. Des livres, écrits directement par des témoins oculaires, sont devenus légion ces derniers temps. Amar Azouaoui, ancien combattant dans l'Armée de libération nationale, a publié la semaine écoulée son deuxième livre. Il s'agit de Jumelles, le déluge en Kabylie. Sur plus de trois cents pages, l'auteur narre des pages importantes d'histoire, notamment des épisodes inédits sur des combats de Krim, Mohammedi, Amirouche et Mohand Oulhadj. Amar Azouaoui revient sur les luttes acharnées dans la Wilaya III historique ayant valu à la région l'opération Jumelles, qui fut «le dernier espoir de De Gaulle». L'auteur s'est intéressé plus, dans son ouvrage, à la période de 1959 à 1962 dans la Wilaya III qui s'étendait de Boumerdès à Sétif. Une période qualifiée d'«années de braises». Amar Azouaoui rappelle que ces quatre années étaient les dernières de la guerre de Libération nationale et c'était la période durant laquelle la France y engagea tous les moyens, y compris ceux de l'Otan, pour tenter de venir à bout de cette guerre d'usure et tenter d'anéantir par les armes, l'Armée de libération nationale. Amar Azouaoui remonte jusqu'à 1947 avec les premières actions de Krim Belkacem contre le colonialisme. L'auteur rappelle que Krim avait des préoccupations à caractère national pour le déclenchement et l'organisation de la lutte. Et de rappeler que Krim n'a pas tardé à asseoir convenablement les bases d'une insurrection révolutionnaire solide et efficace au niveau de la Zone III (la Kabylie) pour faire de cette région, le fer de lance de la Révolution. Krim Belkacem était assisté, dès le départ, de Amar Ouamrane, compagnon de maquis et de Mohammedi Saïd. Puis Krim Belkacem a rejoint très vite la capitale pour remplacer Rabah Bitat, chef de la Zone IV, qui avait été arrêté par l'ennemi. L'ouvrage de Amar Azouaoui est aussi un récapitulatif presque exhaustif des actions importantes menées par l'ALN dans la Wilaya III. Parmi les opérations les plus connues, l'auteur revient sur «l'Oiseau Bleu» et rappelle que dès le début des hostilités, les services secrets français se proposaient d'ériger un contre-maquis, par une force d'indigènes algériens, rémunérés et armés par la France aux fins d'éradiquer le conflit. Informé, le comité de l'Armée de libération nationale de la Zone 3 (future Wilaya III), où l'action devait prendre forme et avoir lieu, décidait de relever le défi. Il prenait en charge dans la discrétion totale l'aspect humain qu'il se proposait de fournir, qui sera composé de militants du Front de libération nationale, agissant à son profit. Ces militants seront prélevés de la région nord de la Kabylie (Tigzirt, Aghrib, Azzeffoun, Iflissen, Beni Zmenzer etc.). L'objectif était de constituer l'ensemble du corps progressivement appelé opération «Oiseau Bleu», recevoir des armes, de l'argent et le détourner plus tard de sa destination privilégiée, témoigne Amar Azouaoui. Ce dernier précise que le contre-maquis d'éléments algériens de Robert Lacoste (composé principalement de militants de la cause nationale), initiés, armés et payés par les services français, étaient détournés au profit de l'Armée de libération nationale grâce à la vigilance du comité de la Zone 3, sous l'égide de Krim Belkacem. A la fin du mois de septembre 1956, l'Armée de libération nationale, à travers le Congrès de la Soummam, qui se tenait à Ifri, avait jugé qu'il y avait le risque désormais de faire découvrir ces militants de la cause nationale (opérant sous l'étiquette de l'«Oiseau bleu»), avait décidé de mettre un terme au complot et inviter ces militants à rejoindre l'Armée de libération nationale. Amar Azouaoui revient également sur les chefs qui se sont succédé à la tête de la wilaya III, Krim Belkacem, Mohammedi Saïd, Amirouche. En effet, c'est en juin 1957 que le colonel Amirouche prit les rênes de la Wilaya III et poursuivit directement le travail commencé alors qu'il était en Zone 2. Il s'est occupé de l'action militaire émanant des résolutions du Congrès de la Soummam, laissant l'aspect politique entre les bonnes mains du commandant Mohand Oulhadj. Amar Azouaoui témoigne que Amirouche désigna à la tête des bataillons des officiers courageux et dynamiques. Des bataillons qui étaient, entre 1957 et 1958, sous le commandement respectif de Slimani Si Moh Ouali, Chaïb Si Mohand Ourabah, Sedik Oumahfir, Aïssa Boudaoui, Bariki, Lahlou, Si Mohamed et Amira Bouaouina. Le colonel Amirouche répartit ses bataillons entre les différentes zones et régions et impulsa lui-même leurs combats sur le terrain en collaboration avec les chefs des zones et des régions. Parmi les plus grandes opérations menées sous l'égide du colonel Amirouche, l'auteur cite celle de Tikarien Boudjellil (Béjaïa). Cette opération coïncidait avec le troisième anniversaire du déclenchement de la guerre de Libération. Une compagnie constituée de plus de cent cinquante djounoud s'était accrochée durant toute la journée avec l'adversaire, au cours d'un ratissage regroupant plus d'un millier de soldats français, appuyés énergiquement par l'aviation. «C'était l'anarchie et l'enfer», décrit l'auteur. Et d'ajouter que l'ennemi, par manque d'expérience, avait perdu plus d'une centaine de soldats et de nombreux blessés ont été enregistrés. Trois avions avaient été abattus et un officier prisonnier. De son côté, l'ALN avait déploré quatorze chahids. L'ouvrage se poursuit ainsi sur la description des différentes opérations menées par l'ALN dans différents maquis de la Kabylie ainsi que des autres opérations psychologiques comme la célèbre bleuite. Ceci avant d'entamer les chapitres inhérents à l'opération Jumelles dans ses différentes phases. Le livre de Amar Azouaoui a la spécificité d'être illustré par des photos vraiment inédites, notamment celles de figures de proue de la guerre d'indépendance. Ainsi, le lecteur découvrira dans ce livre des photos jamais publiées auparavant de Abane Ramdane, Krim Belkacem, Amirouche, Mira, etc. Le livre est sorti aux Editions «El Amel» de Tizi Ouzou. Pour rappel, cette maison d'édition a publié plusieurs témoignages sur la guerre d'Algérie dont un premier livre du même auteur, deux livres de Salah Mekacher, ancien secrétaire de Amirouche, un livre de Mehena Merakeb, intitulé Les points du 20 Août.