Aït Ahmed, qui n'a jamais souhaité que du bien à son pays, sent le moment favorable pour déclencher une série de renoncements. Il y a eu les législatives du 30 mai dernier et les résultats que l'on sait. Auparavant, dans une déclaration prononcée ex cathedra par le chef d'état-major des armées, le général major Mohamed Lamari, le peuple algérien apprenait, pour la première fois, d'un des représentants les plus autorisés de la «grande muette», que l'armée algérienne ne décidait de rien politiquement, mais que son rôle se limitait aux prescriptions - la concernant - de la Constitution. Clarification indispensable et utile qui mettait enfin un terme à un imbroglio d'interprétations à partir duquel les références au républicanisme de l'armée n'avaient servi pour certaines tendances de l'opinion, qu'à rendre un peu plus confuse la relation existant entre le Président de la République et l'ANP. D'où les montagnes de spéculations souvent peu réalistes à propos de la «mésentente» de l'armée avec le chef de l'Etat. La clarification de Lamari ne pouvait passer inaperçue. A-t-elle eu les mêmes effets sur Aït Ahmed, le leader du FFS, que sur le reste de la classe politique? Tout cela reste à démontrer, mais en attendant d'y parvenir et sans être affirmatif à 100% nous serions quand même proche de la réalité en disant qu'en la personne d'Aït Ahmed, le chef d'état-major de l'ANP a trouvé un homme disposé à l'écoute et un analyste qui ne laisse rien passer, même la nuance la plus insignifiante dans un discours. Cela étant dit, depuis le mois d'avril 2002 où, dans une démonstration politique magistrale, Aït Ahmed était arrivé à la conclusion selon laquelle «les ârchs sont manipulés», il n'a rien prononcé d'aussi sévère pour marquer son expectative par rapport à une situation kabyle où la confusion entretenue de longue main par les semeurs de troubles donnait lieu à toutes sortes de surenchères, pour la plupart destinées à jeter de l'huile sur le feu pour en tirer le maximum de dividendes. Aït Ahmed a-t-il trouvé consistante l'intervention du chef d'état-major? Sans doute. Les législatives arrivent. Ses militants ne votent pas. Mais comme on l'apprendra plus tard, le boycott n'a pu revêtir la puissance d'un argument suffisamment rédhibitoire pour discréditer le scrutin et ceux qui l'ont organisé. Depuis quelques mois toutefois, quelque chose s'était mis à bouger en Algérie et Aït Ahmed, qui n'a jamais souhaité que du bien à son pays, sent le moment favorable pour déclencher une série de renoncements. Les principaux visant son affranchissement de cette idée que les Algériens ont toujours trouvé irréaliste, à savoir «le retour à une Assemblée constituante» dont pourtant il savait qu'elle n'aurait pas lieu sans renouvellement complet du régime en place. Ou sans...coup...d'Etat! Il n'en reste pourtant pas là. En effet, sans que son entourage l'ait publiquement rejeté, Aït Ahmed, directement ou par truchement de l'un de ses porte-parole, n'exige plus de conférence internationale pour effectuer un profond audimat politique et imposer le type de gouvernement qu'il faut pour sortir l'Algérie de l'épreuve qu'elle endure depuis 10 ans. Dernier renoncement, et non des moindres: sa décision de claquer la porte de l'Internationale socialiste dont il savait pourtant depuis longtemps qu'elle ne sert, depuis sa création, que les intérêts d'Israël. Voilà un homme qui, sans s'enfermer dans une autarcie intellectuelle et politique inhibante, ne s'est jamais retranché de la réalité. Durant sa longue carrière d'opposant à la politique issue du 19 juin 1965, il a usé de toutes les formes de pression possibles pour pousser les régimes politiques qui se sont succédé en Algérie, à s'ouvrir à la vraie démocratie. Pressions qui ont pris chez lui l'allure d'engagements publics que ce soit dans l'Internationale socialiste ou à exiger une commission internationale, etc. En réalité Aït Ahmed qui, aujourd'hui, n'est pas loin des 80 printemps, n'exige désormais rien qui puisse détourner son énergie de l'objectif cardinal qui a d'ailleurs toujours été le sien, à savoir: l'Algérie d'abord.