La salle Cosmos a abrité jeudi dernier un concert de musique au carrefour des métissages entre musique orientale et tzigane. D'emblée, l'intro musicale nous emmène en voyage spatio-temporel et nous croyons atterrir en plein Moyen Age. Titi Robin jouera des compostions originales, mêlant de savantes sonorités diverses, alliant les sons orientaux à la musique gitane. En 30 ans de carrière, Titi a donné de nombreux concerts, en Afrique australe, au Moyen-Orient et en France. Sa musique est imprégné de colorations des pays de l'Est jusqu'aux confins des pays arabes. Titi Robin excelle sur la guitare manouche, le oud et le bouzouk, il est accompagné ici d'un accordéoniste et d'un jeune percussionniste qui nous rappellera étrangement Faycal Salhi avec sa manière de jouer sur une jarre sans doute, au nom assez bizarre... Le son pur qui s'élève emplit la salle Cosmos de Riad El Feth. Au milieu du public, on aperçoit deux grands interprètes algériens, Reda Doumaz et Mohamed Rouane. Titi Robin alias Thierry joue Ton doux visage et La famille notamment. Un des premiers morceaux qu'il composera dans la cuisine de ses parents au milieu de ses frères et soeurs, se rappelle-t-il. «Ce sentiment se mélange ici, le fait de jouer avec des musiciens, ce sont aussi ma famille et le fait d'être devant un auditoire, vous êtes par conséquent aussi ma famille. J'espère que vous appréciez ce parfum qui vient de la cuisine», a déclaré Titi qui fera l'effort par moments de parler en arabe. Charmant. S'ensuit une amusante joute entre accordéon et guitare. La musique s'emballe et la percussion se veut plus ample, plus généreuse. Entre Pépito, originaire de Malaga, qui nous transportera rapidement dans les terres d'Espagne. Avec sa voix rocailleuse, il interprétera des morceaux de flamenco au grand bonheur du public. Les musiciens battent la mesure avec les mains et certains dans la salle essaient de les imiter. Nous l'avons découvert en 2004 à Constantine avec le groupe d'Alain Winsberg. Il revient avec la formation de Titi Robin qui flaire le bon son et le métissage des couleurs. La voix de Pepito n'a pas pris une ride. Elle s'est encore bonifiée avec le temps. L'accordéoniste laisse échapper quelques notes de La bohème d'Aznavour sous l'acclamation du public avant de lui servir un morceau des plus entraînants. Le concert se termine en beauté avec l'arrivée de l'autre surprise de la soirée. L'interprète de musique andalou, Nouredine Saoudi au mandole. Entre lui et Titi c'est à qui joue le mieux un accord mélodique. Histoire d'amuser l'assistance. Puis l'artiste entonne: Kalbi chaâlet nar min ferarkom ya ahbab, et Pépito de reprendre en espagnol. Un duo sans faute dont chacun laissera une forte impression sur le public par sa belle démonstration vocale. Un autre morceau encore plus rythmé avant de prendre congé du public sous des salves d'applaudissements bien nourris. «On retrouve les mêmes modes que ce soit au flamenco, dans la musique arabe ou dans les chants orientaux, ce n'est pas par hasard que les Arabes ont occupé pendant sept siècles l'Espagne. Ils ont laissé quand même des traces. C'est pourquoi finalement toutes les vocalises on les retrouve dans la musique andalouse de Nouredine Saoudi. On a travaillé hier soir un peu et cela a marché tout de suite. Car on a les mêmes modes, la même façon de placer la voix. C'est une nouvelle expérience pour moi. Khaléo, c'est une fusion jazz avec musique indienne et le flamenco, mais là c'est autre chose. Ce n'est pas du jazz c'est particulier, c'est la musique de Titi Robin qui peut être orientale et des pays de l'Est, en même temps, moi j'amène une note flamenco dans cette musique qui est très personnelle», nous a confié Pepito à la fin du concert. Et Nouredine Saoudi de souligner: «C'était vraiment du plaisir. On s'est rencontré et on a décidé très rapidement de faire un petit boeuf ensemble. La musique andalouse est vraiment un carrefour musical, à partir de là on peut faire énormément de choses...» Pour sa part, Titi Robin nous a déclaré: «Je définirais ma musique comme étant méditerranéenne. Elle s'inspire vraiment de la culture méditerranéenne telle qu'elle a pu l'être dans l'ancien temps. Aujourd'hui, on oppose toujours le nord au sud, l'est à l'ouest, politiquement et socialement, mais à une époque, il y avait toute une communauté de pensée, de musique et de science qui cohabitait. Il y avait beaucoup d'échanges et de points communs et ma musique s'inspire de ce qui reste de cette grande culture méditerranéenne. C'est pour cela qu'entre la musique gitane du sud de la France, la musique arabo-andalouse, jusqu'au Moyen-Orient, tout cela fait partie de la même famille comme un arbre avec ses différentes branches mais le tronc est le même à l'origine et ces compositions que je joue prennent racine dans cette grande culture méditerranéenne.»