Ces accès de fièvre estivale peuvent-ils prétexter une rigoureuse répression? La nuit commence à être acculée par les PV de gendarmerie.Un peu partout dans l'Algérois, les brigades ont redoublé les contrôles dans les cabarets et autres antres de la nuit. «Sur les 74 établissements contrôlés, nous en avons proposé trois à la fermeture pour la fréquence des incidents, les mauvaises moeurs et le non-respect des cahiers des charges», indique le commandant Mendil du groupement d'Alger. «Ce n'est qu'un bilan provisoire, les opérations de contrôle se poursuivent toujours», précise-t-il en ajoutant que «ces contrôles font partie des missions de routine de la gendarmerie, mais nous avons demandé à nos hommes de les intensifier». L'attaque des cabarets de Bordj El-Kiffan par des jeunes à la suite de l'assassinat d'un gardien de parking il y a presque un mois, ainsi que l'incendie des dancings «tolérés» à El-Kala et à Skikda ont focalisé l'attention nationale sur ces milieux. Alcool, filles, «rechkate» et coups de poing dans les pires gueules de bois d'après minuit constituent le quotidien nocturne de ces zones brumeuses. Les cabarets sont tolérés par les autorités à condition de ne pas franchir la ligne rouge: l'exploitation des mineures, le tapage nocturne, la consommation de la drogue et, accessoirement, le meurtre. L'activité des cabarets est réglementée par les textes de commerce. Ces établissements travaillent sous autorisation de la wilaya. Récemment, le wali d'Alger a souhaité faire du «ménage» dans la sphère éthylique des boîtes de nuit. Les affaires de meurtre connaissent une certaine croissance aux abords et au sein de quelques-uns de ces établissements. Citons ici l'assassinat de l'attaché sécuritaire de l'ambassade de Tunisie au début du mois près d'un «bar-restaurant» à Ryadh El-Feth, le meurtre d'un ex-officier de la police près d'une discothèque à Chéraga, sans parler des vols, viols et autres larcins du genre. Ça trafique ferme aussi. Le cahier des charges est parfois largement dépassé. Le patron d'un cabaret sur la côte ouest d'Alger a subi l'ire des riverains qui sont allés jusqu'à l'ester en justice. Le patron avait construit des chambres près du cabaret pour permettre aux «clients» d'emmener «les filles». Cette maison close tournait de jour comme de nuit et jouxtait une cité d'habitations. Tout près, à Chéraga, les autorités locales ont cédé à un prix dérisoire une partie de terrain communal, transaction illégale, au gérant d'une boîte de nuit pour réaliser des extensions. Ces accès de fièvre estivale peuvent-ils prétexter une rigoureuse répression? Et quelle est la part de la moralité et de la loi dans le traitement de ce phénomène? «Le contrôle de ces établissements est une mission routinière», insiste la gendarmerie. Mais la fermeture de plusieurs cabarets avant le déclenchement même de ces opérations impose questions et hypothèses. El-Bahdja et Yasmine de Chéraga, le Miami Beach d'Azur-Plage à Zéralda, le G3 de Cavaignac à Alger, Les Dunes qui a changé de vocation et devient un restaurant familial, etc., autant d'établissements qui ont baissé rideau. Les raisons restent diluées dans des considérations mystérieuses.Concurrence déloyale, nouvelles délimitations des zones d'influence, affaires d'Etat maquillées en rixes de bas-fonds, etc., toutes les pistes sont envisageables. Les opérations des services de sécurité se poursuivront et permettront d'établir une cartographie plus ou moins précise de ce monde de la nuit. En attendant, minuit verra toujours ses adeptes fidèles au rendez-vous.