La protestation peut reprendre à n'importe quel moment car aucune revendication n'est satisfaite. Le ministre de la Santé, Saïd Barkat, a déployé un arsenal répressif contre les médecins. Le constat est de Mohamed Yousfi, président du Syndicat national des praticiens spécialistes (Snpssp). Il s'exprimait hier lors d'une conférence de presse à Alger. Par la même occasion, il a annoncé le gel de la grève enclenchée il y quatre mois avec le Syndicat national des praticiens du secteur public (Snpsp). Les conseils nationaux des deux syndicats n'ont décidé, avant-hier, le gel de leur grève que suite à ce qui est qualifié de lourdes mesures répressives brandies par le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Saïd Barkat. Le président du Snpssp fait état d'autres paramètres, à l'instar du silence total de toutes les institutions et des pouvoirs publics vis-à-vis de la plate-forme de revendications. Le président du syndicat, des praticiens spécialistes n'a pas épargné le ministre de tutelle. «Il est en train d'agir en gladiateur. Qu'il gère correctement son secteur au lieu de faire dans la diffamation pure et simple. Il a déclaré lui-même que son département est hors circuit», a déploré le président du Snpssp. Ce dernier souligne que des assemblées générales étaient tenues au niveau local. C'est suite à cela que les conseils nationaux des deux syndicats ont procédé à l'évaluation de la grève qui a duré plus de 4 mois. Le gel de la grève avec la possibilité de renouer avec la protestation est la première décision soumise au vote à bulletin secret lors des réunions des conseils nationaux. La seconde décision est le boycott du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière. Pas de contact, pas de réunion de conciliation tant qu'aucune mesure concrète n'est proposée par les pouvoirs publics. S'en est suivie la décision de la tenue de rassemblements dont le premier se déroulera le 3 avril prochain devant le CHU Mustapha-Pacha. La quatrième résolution est relative à la saisine avec dépôt de plainte au niveau des organisations internationales comme l'OIT et le BIT pour protester contre la transgression du droit de grève et des libertés syndicales par les pouvoirs publics. Les praticiens ont décidé de faire appel à la solidarité syndicale en tenant des actions communes avec les autres syndicats autonomes. Autre moyen de protestation symbolique: tous les praticiens vont porter, à partir d'aujourd'hui, des brassards noirs. Le tout, pour exprimer tout le mal qu'ils pensent de M.Barkat. Le président du Snpsp, Lyès Merabet, a de son côté exprimé des regrets sur le fait que son mouvement soit passé de revendication de droits sociaux à un débat sur la situation globale du pays. Il veut replacer le débat dans son vrai contexte et en finir avec le pluralisme syndical de façade, a indiqué le même orateur. Celui-ci s'est montré menaçant. «Le ministre n'a rien fait. Rien n'a été fait puisqu'on est au point de départ. Nous pouvons revenir à la protestation à n'importe quel moment», poursuit-il. «Nous constatons que les institutions de notre pays font dans la léthargie, l'expectative et la passivité», s'indigne-t-il. «Nous n'avons plus droit à la dignité. Nous n'avons pas le droit d'exercer notre droit de grève», déplore quant à lui, le Dr Yousfi. Et d'ajouter: «Nous étions blessés dans notre amour-propre à travers la démarche du gouvernement. Malheureusement, le ministre de la Santé tourne autour du pot.» «Le Premier ministre cite le Canada pour nous montrer la porte de sortie», assène encore l'orateur. «Le constat auquel on est arrivés est qu'on est face à deux Algéries: l'Algérie utile ou des privilégiés et celle du savoir qui est méprisée», fulmine le Dr Yousfi. Il dénonce une tentative de mise à mort du système de santé publique. Pour lui, le gouvernement a décidé la destruction des syndicats autonomes et le ministre n'est que l'exécutant des instructions reçues. «Pour nous, cette halte n'est qu'une étape dans notre combat pour la santé publique», fait savoir le Dr Lyès Merabet. «Le ministre n'est pas à une contradiction près. A popos du privé, il est de sa responsabilité d'établir un équilibre avec le secteur public. Cela prouve qu'il n'est pas capable de gérer son secteur. S'il a un problème avec les lobbies qu'il n'arrive pas à citer, qu'il le dise», a tenu à dénoncer le président de Snpsp. A propos des logements, il faut savoir que les syndicats n'ont jamais parlé de la cessibilité. Cependant, en tant que fonctionnaires, «on a le droit à un quota de logements de fonction», poursuit-il. Selon les représentant des médecins, «le ministre est en train de faire dans l'amalgame de manière délibérée. Concrètement, la gestion de la santé publique est un fiasco. On est carrément dans le saupoudrage. La communication est catastrophique. L'organisation, la concertation et la démarche du département de Barkat le sont également. Après tout ce parcours catastrophique, le minimum qu'il doit faire est de démissionner», dit-il. Quatre mois de grève, c'est pratiquement la moitié d'une année d'activité dans ce secteur. Par ailleurs, l'Intersyndicale de la santé publique a réitéré encore une fois son appel au président de la République pour qu'il intervienne.