Aucune peine n'a été cependant prononcée contre le ministre français de l'Intérieur. Le verdict a été mis en délibéré pour le 4 juin. Sale temps pour l'ex-ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale, même s'il devrait s'en sortir plutôt à bon compte. Une contravention... peut-être. Les propos du locataire de la place Beauvau, adressés au jeune militant UMP d'origine maghrébine au mois de septembre de l'année dernière (voir L'Expression du 12 septembre), ont été passés au crible par la 17e chambre du Tribunal de Grande instance de Paris. Il est toutefois très probable que Brice Hortefeux n'écope le 4 juin 2010 que d'une simple amende à défaut d'un non-lieu qu'il doit appeler de tous ses voeux. Le procureur, qui devait requérir dans cette affaire qui a été examinée sous toutes ses coutures vendredi, devant la chambre correctionnelle de la capitale française, a, en effet, souligné lors de son intervention que la responsabilité pénale de l'accusé ne pouvait être retenue en raison du doute qui entourait le caractère public de ses déclarations. En d'autres termes, Brice Hortefeux qui participait à l'université d'été du parti de la majorité, l'UMP, au mois de septembre 2009 à Seignosses dans les Landes, ne se savait pas filmé par une caméra de télévision. «Les débats ne rapportent pas la preuve qu'il savait qu'il était enregistré et la jurisprudence est extrêmement rigoureuse sur ce point», a expliqué le procureur. Brice Hortefeux sera-t-il sauvé par la loi qui semble être très pointilleuse sur le caractère diffamatoire de tels propos, quand bien même seraient-ils jugés racistes? «C'est un procès étrange et virtuel, aucun témoin direct n'est là. Que nous reste-t-il? Une vidéo, alors que nous ne sommes pas saisis d'une diffusion publique d'injures racistes», a fait remarquer le représentant du ministère public. Le ministre de l'Intérieur ne s'en sortira cependant pas sans quelques coups de griffes. Le 5 septembre, Brice Hortefeux à qui on venait de présenter un jeune militant issu de l'immigration qui souhaitait prendre une photo avec lui avait dit de ce dernier: «Il ne correspond pas du tout au prototype. Quand il y en a un ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes.» Faisait-il allusion aux origines maghrébines du jeune Amine Benalia-Brouch? Comment François Cordier, procureur adjoint et expert, reconnu du droit de la presse a-t-il jugé de tels propos? «Il ne correspond pas du tout au prototype» est «une opinion choquante, éminemment critiquable, mais qui ne dépasse peut-être pas l'opinion admissible». La seconde phrase incriminée est «un propos outrageant, méprisant», a souligné le magistrat. Du coup, «le délit d'injure raciale» apparaît comme incontestable. Son caractère public n'étant pas établi, il ne représente qu'une infraction au Code pénal français. Elle ne risque par conséquent de n'être sanctionné que par une simple contravention. L'avocat, Henri Braun, condamne sans appel le ministre de l'Intérieur et ne se pose même pas de question: «Que M.Hortefeux soit raciste résulte de l'évidence même. Il y a pour lui une essence de l'Arabe, qui ne changera pas, comme on a son bon juif.» Il faut dire que le ministre de Nicolas Sarkozy ne fait pas dans la dentelle lorsqu'il est pris dans le tourbillon des démons de l'identité française, dans laquelle se sont enracinées la xénophobie et la stigmatisation de la religion musulmane. En janvier 2009, en parlant de Fadéla Amara, Brice Hortefeux avait dit d'elle...«une compatriote», avant de souligner: «Comme ce n'est pas forcément évident, je le précise.». La secrétaire d'Etat à la Ville d'origine algérienne a, depuis, passé l'éponge. Solidarité gouvernementale oblige. L'ex-garde des Sceaux, Rachida Dati, n'a pas hésité quant à elle à le qualifier devant certains ministres de «gros porc». Son meilleur défenseur demeure paradoxalement sa victime. Le jeune Amine, militant de l'UMP, avoue n'avoir pas été offensé par le ministre français de l'Intérieur. La vidéo diffusée le 10 septembre 2009 sur le site du quotidien Le Monde prouve pourtant tout le contraire. Le procureur qui l'a visionnée vendredi a qualifié les propos tenus par Brice Hortefeux d'outrageants et de méprisants. La justice tranchera le 4 juin.