La pauvreté est une réalité en Algérie. Cependant, chaque institution y va de sa propre appréciation. Le ministre de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Communauté nationale à l'étranger, Djamal Ould Abbès, a estimé, lundi dernier à Aïn Defla, que le taux de pauvreté en Algérie avait reculé passant de 12% de la population vers la fin des années 1990 à 5% actuellement, soit près de 2 millions d'Algériens. Ces chiffres reflètent-ils vraiment la réalité? En effet, selon les dernières estimations des programmes des Nations unies pour le développement (Pnud) et de la Banque mondiale, rendues publiques en 2009, le taux des personnes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, est estimé à plus de 20%, soit 6,5 millions d'Algériens. C'est également l'avis de M.Farès Mesdour, expert international en économie islamique. Dans une déclaration à L'Expression, il a indiqué qu'«en 2010, plus de 25% des Algériens vivent encore en-dessous du seuil de pauvreté», se référant à des études menées dans le cadre de la distribution de l'argent de la Zakat. Selon des observateurs de la scène socioéconomique nationale, le niveau social d'une grande catégorie d'Algériens n'a pas vraiment changé, suite au partage inéquitable des richesses et des revenus. Selon le rapport du Pnud publié fin 2009, moins de 20% de la population détiennent un peu plus de 50% des richesses du pays. Des institutions internationales ont abondé dans le même sens. Selon elles, une partie de la classe moyenne a même commencé à disparaître graduellement et à rejoindre la classe des déshérités. Sur un autre sujet, le ministre de la Solidarité nationale a indiqué que le taux de chômage en Algérie estimé à 30,03% en 1999 est tombé à 10,8% en 2009. L'Office national des statistiques (ONS), lui, a estimé que le taux de chômage se situe à 10,2% contre 11,3%, soit une baisse de 1,1%. Qui croire? le ministre ou l'ONS? L'étude de l'ONS prend en compte les enfants âgés de 15ans! Mais pourquoi l'ONS prend en compte les personnes de plus de 15 ans, alors que l'âge de travail exigé par la loi est de plus de 16 ans? Le chômage touche beaucoup plus la frange juvénile. 21,3% des chômeurs ont moins de 25 ans, près de trois chômeurs sur quatre (73,4%) sont âgés de moins de 30 ans et 86,7% ne dépassent pas 35 ans. Loin des discours laudatifs, une réalité saute aux yeux: le chômage en Algérie touche la frange de la société la plus importante:la jeunesse! Pour sa part, M.Mesdour a signalé que plus de 25% de la population majeure algérienne sont au chômage, soit le taux le plus élevé de la région du Maghreb. «Même les différentes formules mises en place par l'Etat n'ont pas réussi à absorber ce taux», a-t-il indiqué. Sinon, comment expliquer les proportions alarmantes des phénomènes de la harga, la criminalité, la prostitution et la fuite des cerveaux? Aussi, quel meilleur indicateur d'un niveau de vie bas, que les grèves qui émaillent plusieurs secteurs depuis quelque temps? «Il n'y a aucune compatibilité entre les salaires et le taux d'inflation», a renseigné M.Mesdour. Selon lui, «alors que la Banque d'Alglérie a estimé le taux d'inflation à 4%, il est en réalité à plus de 12%, en témoignent les envolées des prix de différents produits alimentaires».