Ce sont quelque 260.000 quintaux d'orge qui seront exportés à partir de ce 31 mai 2010, alors que la récolte de céréales a atteint pour l'année 2009, deux millions de quintaux toutes espèces confondues. L'orge produite essentiellement dans la wilaya de Batna est de qualité supérieure et ne devrait rencontrer aucune contrainte non tarifaire pour accéder aux marchés extérieurs. Cela fait plus de 43 ans que l'Algérie n'a pas exporté d'orge alors qu'elle en était un gros importateur. Le pays dispose même d'un excédent de trois années en orge et tous les moyens ont été mobilisés dans le cadre du plan quinquennal (2010-2014) pour que notre pays demeure à long terme un exportateur net d'orge. Il faut savoir qu'avant que l'Algérie ne s'engage à exporter ses excédents d'orge, la production annoncée pour 2009 (soit 24 millions de quintaux) a permis de répondre à la demande intérieure évaluée à 8, 5 millions de quintaux au cours de la période qui va de septembre 2009 à mai 2010. Par ailleurs, le cheptel ovin algérien, qui est en augmentation, est gros consommateur de fourrages dont une partie significative est constituée d'orge qui requiert des modes de faire-valoir à la fois simples et peu onéreux. A cet effet, le ministère de l'Agriculture a rétrocédé une partie de la production à l'Onab ainsi qu'aux coopératives d'élevage et à un grand nombre de transformateurs privés autant que publics. A l'heure où nous mettons sous presse, 100.000 quintaux d'orge sont enfouis dans les silos du port d'Alger en partance pour la France, les Etats-Unis, le Canada, l'Argentine, le Chili, etc. Non seulement l'Algérie est devenue un pays exportateur d'orge mais elle a toutes les chances, étant parvenue à l' autosuffisance en blé dur en 2010, d'exporter également des quantités importantes de blé dur, alors qu'elle en a importé 400.000 tonnes en 2009, chiffre déjà en nette régression par rapport à celui des années 1990 qui atteignait en moyenne les deux millions de tonnes/ an. La récolte céréalière de la campagne moisson-battage pour 2009 a atteint 61,2 millions de quintaux (24 millions d'orge, 24,3 millions de blé dur et 11, 3 millions de blé tendre). Une conjonction de facteurs explique le caractère exceptionnel de cette récolte. Ils sont au nombre de six: une bonne pluviométrie, une maîtrise remarquable par les paysans des nouvelles techniques de culture céréalière, l'introduction de méthodes d'irrigation plus fines, la disponibilité des intrants à des prix accessibles pour les producteurs, l'octroi de crédits sans intérêts et enfin une bonification des prix d'achat à la charge de l'Oaic. Il faut également savoir que la surface agricole utile consacrée aux céréales est passée de trois millions d'hectares à environ 3,4 millions, cependant que de plus en plus d'agriculteurs se spécialisent dans les cultures céréalières. Et tous les éléments dont dispose le ministère de l'Agriculture donnent à penser que la récolte pour 2010 sera supérieure à celle de 2009, permettant ainsi une augmentation significative des stocks de blé dur dont une partie sera destinée à l'exportation, dès lors que la demande intérieure sera largement satisfaite. Pour les prochaines années, la situation céréalière de l'Algérie devrait connaître de prodigieux bonds en avant en raison du développement significatif des infrastructures de stockage. 33 milliards de DA ont été alloués par la Badr pour la densification et la réhabilitation du réseau de stockage des céréales, lequel n'a pas bénéficié d'investissements depuis plus de 25 ans. De nombreuses facilités de paiement seront accordées aux coopératives de céréales et légumes secs (Ccls), l'institution d'agences bancaires en lieu et place des guichets traditionnels, ce qui permettra l'ouverture de comptes bancaires au profit des agriculteurs (raccourcissement des délais de paiement des agriculteurs). Enfin, l'accord conclu entre la Badr et la SGP Proda vise la fin des projets d'entrepôts pour la chaîne du froid et des complexes de battage (cette opération consiste à séparer les grains de leurs épis) dans les zones de production. Les incertitudes du marché mondial des céréales Pour 2010, il y aura une baisse de la consommation d'orge dans le monde (de l'ordre de 7%), cependant que certains pays tels la Russie, l'Ukraine ou le Kazakhstan verront leur production et leurs exportations baisser. S'agissant de l'orge fourrager, la production mondiale chutera de 5% alors que des pays comme les Etats-Unis, l'UE, la Russie réajusteront à la baisse leur production à cause du manque d'eau. Mais l'offre globale sera compensée par l'Australie, le Moyen-Orient et l'Afrique (dont l'Algérie). Selon le DG de l'Oaic, la circonstance que l'Algérie ne sera plus un des plus grands importateurs de blé dur du monde aura pour conséquence de faire baisser sensiblement les cours mondiaux. En revanche, on ne s'attend pas à une augmentation significative des cours mondiaux du blé tendre dont l'Algérie dépend fortement. (Cf. Conseil international des céréales, 20 mai 2010). Ceci dit, il est devenu impératif que les pouvoirs publics viennent fournir à l'Oaic toute l'assistance financière et matérielle dont celle-ci a d'ores et déjà besoin pour que notre pays réduise sa dépendance à l'égard des importations de blé tendre et accroisse ses exportations d'orge fourrager. (*) Professeur en droit des affaires [email protected]