L'Algérie est l'un des rares pays au monde où les hold-up sont commis de l'intérieur d'une banque. Plus de mille milliards de dollars s'évaporent chaque année sous forme de pot-de-vin, selon les recherches en cours à l'institut de la Banque mondiale, est-il relevé hier lors d'une conférence, première d'une série de rencontres entrant dans le cadre d'un colloque portant intitulé: Comment mettre votre entreprise à l'abri de la corruption, sous le thème, «Lutter efficacement contre la corruption» organisée à la Maison de la presse de Kouba. Ce chiffre ne comprend pas les détournement de fonds publics ou le vol de biens publics. Toutefois, peu nombreux sont ceux qui ont une idée précise de l'ampleur économique de ce fléau et de ses conséquences dramatiques. Ce phénomène, ou gangrène dévastatrice, est un frein majeur à la réduction de la pauvreté, des inégalités et de la moralité dans les économies en développement. Concernant l'Algérie, classée chaque année au hit-parade de la liste des pays les plus corrompus au monde, elle «est l'un des rares pays au monde où les hold-up se commettent de l'intérieur d'une banque», estime Gérard Lambert, dirigeant de l'entreprise Sociad, spécialisée dans des activités d'aides aux investisseurs étrangers en Algérie et des missions de conseil. Le conférencier a regretté que «les entreprises du secteur public soient réfractaires au principes de transparence». Une spécificité typiquement algérienne. Autrement dit, nos entreprises sont récalcitrantes quant à la traçabilité de leurs transactions. Le conférencier, qui a eu à effectuer quelques missions auprès des entreprises publiques pour mettre en place un mécanisme de prévention contre la corruption, a évoqué «des résistances insurmontables affichées par ces entités contre l'intégration des méthodes et procédures anti-corruption». «Globalement le secteur public en Algérie est de tradition administrative tandis que le secteur privé se scinde en entreprises de type familial totalement déconnectées et accusant un retard en matière d'organisation économique et des entreprises moyennes plutôt dynamiques et conscientes des enjeux de management moderne», a indiqué le même intervenant. Quoi qu'il en soit, «il y a une fragilité structurelle des entreprises économiques, notamment en matière de ressources humaines, qui sont autant d'obstacles contre la meilleure performance des entreprises», a fait remarquer le conférencier. Citant l'exemple des transferts illicites de devises, M.Gérard Lambert souligne que tant que les officines officieuses ne sont pas fermées, on aura beau voter toutes les lois du monde, l'argent partira. Peut-on vraiment empêcher la corruption dans un pays où un ministre a déclaré récemment qu'elle «est inévitable»? Dans ce contexte, l'intervenant a souligné que «lutter contre la corruption signifie souvent développer un arsenal répressif pour sanctionner lourdement les corrompus et les prévaricateurs. Mais il existe des solutions techniques à mettre en oeuvre au sein des entreprises, aussi bien pour éviter les tentations des uns que pour réparer les conséquences néfastes d'une corruption subie». A ce propos, les experts du monde entier admettent que la corruption peut avoir des effets désastreux sur les économies en difficulté, à l'image de l'économie algérienne. Selon la Banque mondiale, la corruption peut réduire le taux de croissance d'un pays de 0,5 à 1% par an. Les investissements à long terme, les plus intéressants pour un pays, deviennent ainsi risqués et peu probables. La même institution a indiqué que le coût élevé de la corruption des fonctionnaires encourage de nombreuses entreprises à réduire leurs obligations fiscales en ne déclarant pas la totalité de leur vente, coût et masse salariale. Par ailleurs, la corruption qui est plus apparente dans les pays du Sud, fait que même les grandes entreprises généralement plus verrouillées à ce fléau à travers le monde sont touchées de plein fouet par ce phénomène, à l'exemple de la Sonatrach.