Après les propos «inappropriés» du général McChrystal, commandant des forces alliées de l'OTAN en Afghanistan, c'est un autre général «super-galonné», David Petraeus qui prend la relève. Vingt-quatre heures après le remplacement express du général McChrystal par David Petraeus à la tête des forces alliées en Afghanistan, les Etats-Unis clamaient jeudi haut et fort qu'ils n'étaient «pas embourbés» dans une guerre que beaucoup croient impossible à gagner si rien ne change. «Je ne pense pas que nous soyons embourbés» en Afghanistan, a lancé le secrétaire à la Défense Robert Gates, au cours d'une conférence de presse. Au contraire, a-t-il fait valoir, «je crois que nous enregistrons des progrès (...). Nous avançons». Le général Petraeus, a insisté M.Gates, aura toute latitude «pour apporter des changements tactiques (...), mais la stratégie globale reste la même». M.Gates ne faisait que réaffirmer ce que le président Obama avait pris soin d'expliquer, mercredi, lorsqu'il a annoncé le remplacement de Stanley McChrystal par David Petraeus: la face du commandement militaire a beau changer, la stratégie américaine reste la même. Rebelote jeudi. A l'occasion d'un point de presse avec son homologue russe, Dmitri Medvedev, à Washington, Barack Obama a jugé que le général Petraeus serait «extraordinaire» à la tête des troupes de l'Otan et expliqué que les Etats-Unis maintiendraient le cap en Afghanistan. Les troupes américaines devraient donc commencer à lever le camp à partir de juillet 2011, comme prévu. Oublié donc, l'incident de parcours provoqué par le général McChrystal. Dans un article publié par le magazine Rolling Stone, le général se moquait du vice-président Joe Biden et d'une bonne partie de l'exécutif américain. «Personne -ennemis, amis, et nos soldats en particulier- ne doit interpréter ce changement de personnes comme le signe d'un relâchement de l'engagement de (notre) mission en Afghanistan», a martelé Robert Gates. Le défi est pourtant de taille. Militairement d'abord: les plus sceptiques estiment que l'offensive de Marjah (sud) contre les taliban au printemps a échoué. Et la charge pour reprendre Kandahar (sud) aux insurgés semble prendre du retard. Sur le plan civil ensuite, la corruption gangrène l'administration du président Hamid Karzaï, soutenu à bout de bras par Washington. Mais pour le Pentagone, la partie n'est pas perdue. Citant le général Petraeus, M.Gates a qualifié jeudi la mission de «difficile mais pas impossible». De leur côté, ils ont beau jurer faire bloc derrière le Pentagone, les sceptiques, nombreux au Congrès américain, montrent du doigt le fardeau que représente, selon eux, la diplomatie américaine sur le terrain. En cause, l'ambassadeur américain à Kaboul, Karl Eikenberry, et Richard Holbrooke, émissaire de M.Obama dans la région, soit très exactement deux hommes qu'avait ciblés le général McChrystal dans l'article de Rolling Stone. «La composante civile (de la présence américaine en Afghanistan), est à mon avis complètement dysfonctionnelle», a asséné mercredi le sénateur Lindsey Graham: «Et si cela ne change pas rapidement, nous allons perdre une guerre que nous ne pouvons pas nous permettre de perdre». Le lendemain, le sénateur John McCain a certes apporté son soutien au général Petraeus. Mais «il nous faut une nouvelle équipe là-bas, peut-être à l'ambassade et ailleurs», a-t-il déclaré. MM.Holbrooke et Eikenberry ont eu des relations difficiles avec le président afghan. D'après certains observateurs, leurs critiques passées, contre la corruption notamment, les privent aujourd'hui d'influence auprès d'Hamid Karzaï. Ce dernier entretenait au contraire de bonnes relations avec le général McChrystal, dont il a publiquement regretté le départ.