C'est encore là une preuve, qu'en Algérie, un mouvement social se développe en dehors des partis politiques et des syndicats traditionnels. Ce qui est loin d'honorer l'idéal de paix et de démocratie. Face au manque de moyens les plus élémentaires, les citoyens recourent aux protestations de rue. Ce scénario semble se répéter de manière implacable jusque dans les contrées les plus reculées du pays. Distribution contestée de logements, manque d'eau potable ou d'électricité...les ingrédients de ces poussées de fièvre sociale, quasi régulières sont nombreuses, mais ô combien significatives. Elles rendent compte d'une rupture du contrat de confiance entre les citoyens et leurs élus; elle même résultant de l'érosion des moyens de communication, mais également du manque de moyens qui pénalise parfois les communes. Cette fois, un cri de détresse nous parvient de Frikat, une paisible bourgade qui surplombe la ville de Drâa-El Mizan, daïra distante de quelque 45 km au sud de Tizi Ouzou. Dans cet énième scénario de la «manif», les habitants de Frikat nous apprennent qu'ils ont soif. Qu'ils doivent encore faire avec les moyens du bord pour s'approvisionner en eau potable et en gaz butane. Des corvées, où sont asservis mulets et progéniture, contraints d'acheminer ces précieuses denrées en arpentant plusieurs kilomètres de chemins qui montent. Munis de banderoles sur lesquelles on peut lire: «Nous avons soif» plusieurs dizaines de citoyens, relevant du village Imazgharen de la commune de Frikat, ont donc procédé, hier matin, à la fermeture du siège de l'APC...Ils étaient environ 300 personnes à investir ce dernier dès les premières lueurs de l'aube, empêchant, dans une action pacifique, les fonctionnaires de rejoindre leurs postes de travail. Les deux principales revendications exposées par les protestants ont ainsi trait à l'alimentation en eau potable et au raccordement de leurs foyers en gaz de ville. En montant au créneau, ils demandent surtout la satisfaction urgente de ces doléances, faute de quoi, ils menacent de bloquer le siège de la daïra dans les prochains jours. L'on souligne, en outre, que le village en question manque de presque toutes les commodités d'une vie décente comme l'assainissement, un stade de football, et les routes praticables...,a priori, le barrage de Taksebt bien que mis en service, a encore de la peine à irriguer Frikat, l'oubliée. Mais le calvaire s'est fait ressentir en ces journées de canicule. Frikat aura pourtant connu bien des couleurs politiques. Elle a notamment jugé de la gestion du RCD puis de celle du FFS. Cependant, la population de Frikat a depuis longtemps compris que les élus tournent le dos au peuple et que le gouvernement brille par son immobilisme. Les citoyens ne prétendent pas vouloir daller les chemins vicinaux de Frikat, encore moins travestir leur hameau en ville moderne. Ils espèrent seulement profiter des programmes d'équipement et d'alimentation tous azimuts que mettrait en branle l'Etat. Un pipe-line passe à quelques encablures de Frikat.