Les embarcations de fortune utilisées par les harraga ne seraient qu'un mauvais souvenir si le Schengen méditerranéen voyait le jour. L'Institut de prospective économique du monde méditerranéen (Ipemed) ne veut pas que l'Europe et le Maghreb continuent de voir leur poids diminuer sur la scène internationale face à des géants américains ou asiatiques. Il avance des propositions pour favoriser la création d'un espace économique et financier commun qui englobera un milliard d'individus aboutissant à un bloc capable de peser face aux autres regroupements régionaux. Tout en espérant que le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union pour la Méditerranée, qui finira bien par se tenir peut-être dès le mois de novembre, tienne compte de ces réflexions. Comme l'explique Radhi Meddeb, nouveau président d'Ipemed, il s'agit d'agiter des idées avec comme seule ambition de participer à lever les obstacles à la construction de la région. Ces propositions placent les entreprises au coeur des projets, aux côtés des décideurs publics tout en appelant à la création d'instances qui recevraient des Etats et des régions une délégation de compétences importantes. L'une des idées a trait à une meilleure intégration de l'espace financier régional censé faciliter pour les entreprises du sud et de l'est de la Méditerranée l'accès aux financements des investissements pour les infrastructures. Les besoins sont de 40 milliards d'euros par an. La création d'une Banque de développement en Méditerranée est un axe important de cette future politique. Le président français, Nicolas Sarkozy, ayant déjà demandé un rapport sur le chapitre financier. Des Algériens, comme Hadj Nacer, ancien gouverneur de la Banque d'Algérie fait partie de la commission chargée du dossier. L'énergie est une autre priorité étant donné que ce secteur est celui où l'interdépendance des pays méditerranéens est la plus stratégique. Les enjeux sont tels que cela exige des membres de l'UPM qu'ils fassent de l'énergie la première politique euro-méditerranéenne commune, selon Ipemed. Pour lui, cela passe d'abord par la prise de plusieurs décisions, notamment la sécurisation sur le long terme des achats comme des ventes d'énergie, dont la plus importante est l'association des pays du sud et de l'est de la Méditerranée aux réflexions stratégiques européennes dès l'amont des discussions, sans préalable ni conditions. La sécurité alimentaire est un autre axe défini par l'Ipemed en soulignant que l'Union européenne doit innover en proposant une nouvelle politique agricole et alimentaire méditerranéenne. Cela passe par la mise en place de mécanismes pour favoriser l'augmentation de la production alimentaire locale par un investissement significatif, la formation et la mise en place d'institutions structurant les filières de type organisation commune de marché. Arrive ensuite la libre circulation des personnes dans l'espace de l'UPM et le développement de réseaux économiques. Car il est estimé que l'espace euroméditerranéen ne peut se résumer à des échanges de marchandises et à des flux financiers. La question des hommes est fondamentale, selon l'Ipemed. Il propose la mise en place d'une politique commune fondée sur la coresponsabilité des Etats et leur entière liberté d'y participer. L'objectif est d'établir progressivement la libre circulation des personnes dans l'espace de l'UPM. Cela commencerait par la facilitation des mobilités d'un nombre croissant de professionnels, en l'élargissant ensuite à une libre circulation générale pour aller à terme à l'extension aux pays méditerranéens d'un équivalent de l'espace Schengen. «Cette approche novatrice pourrait bénéficier d'une autre proposition concernant le soutien et le développement des réseaux économiques professionnels transméditerranéens», selon la même source. La création d'une Agence méditerranéenne de l'eau, la mise en place d'une réflexion prospective méditerranéenne commune, Méditerranée 2030, et la création d'un Conseil euroméditerranéen d'entreprises sont d'autres propositions de ce centre de réflexion.