Les dix pays de l'Asie du Sud-Est (Asean) retrouvent aujourd'hui les grandes puissances régionales pour le sommet d'Asie de l'Est, un forum créé en 2005 et qui semble prendre de l'ampleur en proportion des ambitions de Pékin. Les dirigeants asiatiques s'apprêtent à inviter formellement les Etats-Unis et la Russie à rejoindre leur sommet régional à partir de 2011, dans ce que les experts décrivent comme un coup dur pour la diplomatie chinoise, sanctionnant une agressivité excessive. Les dix pays de l'Asie du sud-est (Asean) retrouvent aujourd'hui les grandes puissances régionales (Chine, Japon, Corée du Sud, Inde, Australie, Nouvelle-Zélande) pour le sommet d'Asie de l'Est, un forum créé en 2005 et qui semble prendre de l'ampleur en proportion des ambitions de Pékin. La Chine sera «très mal à l'aise» face à la présence des Etats-Unis, estime John Lee, un expert basé en Australie. «C'est un coup dur pour la stratégie diplomatique de la Chine en Asie, dont l'objectif est de pousser progressivement les Etats-Unis hors de la zone». Pékin suscite de vives inquiétudes avec ses revendications territoriales en mers de Chine méridionale et orientale, et au vu de sa gestion intransigeante de la querelle avec Tokyo, après l'arraisonnement en septembre d'un chalutier chinois par les garde-côtes japonais dans des eaux disputées. «La diplomatie chinoise a été terrible ces dernières années», ajoute John Lee. «En conséquence, les nations asiatiques sont plus que disposées à voir les Etats-Unis rejoindre le sommet d'Asie de l'Est, alors que certaines réticences existaient auparavant». Washington et l'Asean (Birmanie, Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande et Vietnam) partagent aujourd'hui la volonté d'aborder les questions territoriales de façon multilatérale et non dans de seules négociations bilatérales comme les envisagent les Chinois. En juillet, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton avait exaspéré Pékin en affirmant que le règlement des différends en mer de Chine du sud était «essentiel» à la stabilité régionale. Pour autant, chacun ménage les autres en pesant avec soin son vocabulaire. «Il y en a certains dans nos deux pays qui croient que les intérêts des Chinois et les nôtres sont fondamentalement opposés. Comme si notre relation était un calcul à la petite semaine dont la logique voudrait que quand l'un réussit, l'autre doit échouer», a déclaré jeudi Mme Clinton. «Mais ce n'est pas notre vision, a-t-elle assuré en préconisant des relations fondées sur la coopération. Côté asiatique, on évite aussi d'aller trop loin face à Pékin. «Nous utilisons le terme d'équilibre dynamique», souligne le patron de la diplomatie indonésienne Marty Natalegawa, refusant d'évoquer le terme de «contrepoids» au pouvoir chinois. «Nous ne nous laisserons pas piéger dans une logique de type guerre froide». Quant à la Russie, son influence dans la région est plus limitée. Mais elle est incontournable dans le domaine de la sécurité énergétique et pèsera dans le forum de par son statut de membre permanent du Conseil de sécurité, relève Carl Thayer, de l'Australian defence force academy de Canberra. «L'admission groupée des Etats-Unis et de la Russie donne au sommet d'Asie de l'Est un parfum plus multipolaire», estime-t-il. «Du point de vue de l'Asean, (sa présence) évite que la rivalité sino-américaine domine» le forum. L'invitation formelle aux deux grandes puissances est prévue aujourd'hui. En 2011, les présidents américains Barack Obama et russe Dmitri Medvedev devraient donc se joindre à leurs homologues asiatiques en Indonésie.