Le court métrage BEO-16007, réalisé dans le cadre de cet échange, vient d'être récompensé lors du Festival Génération Courts, en France. La coopération entre l'association l'Omja d'Aubervilliers et de Bab El Oued fonctionne depuis trois ans. Le travail entrepris dans son volet cinéma vient d'être couronné avec succès d'un prix, une Mention spéciale du jury lors de la 5e édition du Festival Génération Courts. On vous a déjà parlé du projet le mois de juillet dernier. Durant plus de dix jours des jeunes de Bab El Oued mais aussi d'Aubervilliers, aidés par les encadreurs de l'association Omja de cette ville de France, se sont attelés à réaliser un film sur la jeunesse de Bab El Oued placé sous le thème «Le cinéma dans la ville». «L'idée consiste à accompagner ces jeunes qui évoluent dans certains milieux défavorisés ou qui n'ont pas accès à la culture, à l'instar d'autres quartiers. On essaye de leur apporter des outils pédagogiques et techniques, pour qu'ils puissent réaliser leur rêve. On les accompagne vraiment depuis le développement de leurs idées jusqu'à la projection de leurs films. Ces derniers voyagent après», nous avait déclaré, dès lors, un des encadreurs de cette formation, Hakim Zouani. Aussi, ce travail collectif porte aujourd'hui ses fruits par l'obtention de ce prix lors du festival qui, faut-il le souligner, est parrainé par le grand réalisateur Luc Besson. Intitulé BEO-16007, ce court métrage allie fiction, documentaire et photo. Il se veut original, décalé, instructif sur la région de Bab El Oued, bref, imaginatif alliant création et performances technique et artistique. L'histoire est tournée en plein Bab El Oued. 80% de sa population est jeune nous apprend-on. Elle s'habille chic, boit du goudron (café serré) et mange de la karantita. C'est la génération qui se plaît à «naviguer», au gré du vent, via le système D. A Bab El Oued règnent générosité, chômage et le hitanisme, la science des porteurs de «hit» (le mur). Heureusement qu'il y a la plage, la pêche, entre jeunes et vieux nostalgiques. L'ambiance est vivante, car ici c'est un quartier populaire qui accueille tout le monde, avec ou sans argent. Ambiance entre animation et agression, à Bab El Oued ça grouille de monde, de marchés à la sauvette et par ricochet, de moustiques. A Bab El Oued nous apprend-on encore, 20% des jeunes ne savent pas ce qu'est une fille; pourtant ils n'arrêtent pas de faire des efforts, la jeunesse ici surfe sur Internet, va parfois à la mosquée et est un tantinet misogyne. Elle a aussi une dent contre son pays. Intelligents et dynamiques, ces jeunes voient leur rêve s'anéantir, ployant sous le poids de la monotonie, quémandant plus d'ouverture sur le monde. Ils voyagent sur le Net, en attendant des jours meilleurs. La vie se décline entre débrouille et rêve de harga mais aussi...les magouilles. Il faut bien vivre. Un film plein d'humour, réalisé par des jeunes qui se tournent en dérision tout en posant un regard acéré et objectif sur leur univers pas facile. Un film touchant car plein de sensibilité. Un travail formidable, constitué de photos, de témoignages vivants captant le pouls de ce légendaire quartier qui en a connu des malheurs. «Bab El Oued connaît le monde et le monde connaît Bab El Oued». C'est sur cette note d'humour un peu prétentieuse, rehaussée d'un extrait musical joué par un groupe du même quartier que s'achève ce court métrage bien original, de douze minutes. Distingué le 15 octobre dernier, BEO-16007 concourait aux côtés d'autres films venus de plusieurs pays dans le monde. Outre Bab el Oued, ils ont été tournés à Rio de Janeiro (Brésil), à Dakar (Sénégal) à Johannesburg (Afrique du Sud), Bamako (Mali) ou Wenzhou (Chine). Né il y a quatre ans, le Festival Génération Courts a pour ambition de se développer et de travailler sur l'accompagnement de jeunes réalisateurs (âgés de 15 à 25 ans) ainsi que de créer et de pérenniser des structures de création et de diffusion artistiques dans le monde. Au cours de ces quatre années, Génération Courts a vu se réaliser 30 courts métrages qui ont été diffusés aux quatre coins du monde, réunissant plus de cinq mille spectateurs par an. Le festival a également permis de former plus de cent-cinquante jeunes au métier du cinéma, en France et dans différents pays. Evoquant ce film, BEO-16007, Nasser, le président de l'association SOS Bab El Oued, qui n'hésite jamais à rendre visite à notre rédaction pour nous informer de l'évolution de ses actions, tient à rendre hommage à tous ces jeunes et de déclarer: «Il faut rendre hommage aux jeunes qui ont cru jusqu'au bout à ce projet, que ce soit ceux d'ici ou ceux de là-bas. Ils ont les mêmes capacités, il suffit juste de les aider et de leur donner les moyens. On a signé une convention avec Aubervilliers pour trois ans (2011 à 2013). On recevra des jeunes d'Aubervilliers au mois de juillet. D'autres vont monter en décembre 2011 à Paris. Ça discute en ce moment pour tracer les grands axes de travail. Pour le mois de juillet, le programme est déjà arrêté. Les jeunes vont travailler autour du Slam, la musique et la conception d'un court métrage. Notre objectif est d'ouvrir le quartier, à ramener des jeunes d'ailleurs. Habituer les gens à venir à a Bab El Oued. C'est un quartier parmi tant d'autres.» Notons que ce projet culturel qui se poursuit n'a pu se concrétiser sans l'aide de la mairie d'Aubervilliers, l'ambassade de France, et la Commission européenne.