L'Otan a entamé hier à Lisbonne un sommet de deux jours qui annonce d'importantes décisions stratégiques: sortir d'Afghanistan sans l'abandonner, protéger l'Europe des missiles, coopération avec la Russie, adapter l'alliance aux menaces actuelles. Alors que l'ouverture du sommet était prévue hier vers 16h30 (locales et GMT), le président Barack Obama est arrivé en fin de matinée pour des entretiens et un déjeuner avec les dirigeants portugais, au milieu d'un dispositif policier exceptionnel. Avant son arrivée, le président américain dans une tribune de presse publiée notamment par le quotidien portugais Publico, avait déjà donné le ton: il s'agit pour les 28 pays alliés et leurs 20 partenaires de l'Isaf, la force internationale sous commandement de l'Otan, de passer le relais aux troupes afghanes d'ici à 2014, mais pas d'abandonner l'Afghanistan à son sort. «A Lisbonne, nous allons harmoniser notre approche de manière à pouvoir lancer la période de transition devant conduire les Afghans à prendre au début de l'an prochain la responsabilité de leur propre sécurité à travers le pays, et adopter l'objectif du président Hamid Karzaï (que ce processus s'achève) avant la fin 2014», a-t-il indiqué. «Et même si les réductions de troupes et la transition en question commencent en juillet prochain, a-t-il assuré, l'Otan comme les Etats-Unis vont pouvoir forger un partenariat durable avec l'Afghanistan de façon à ce qu'il soit clair qu'au moment où les Afghans prendront en main les opérations, ils ne seront pas abandonnés à eux-mêmes.» Les chefs d'Etat et de gouvernement alliés doivent se pencher sur ces sujets aujourd'hui, au second jour de leur réunion. Hier, les débats étaient consacrés au projet de bouclier antimissile, à la rénovation de l'Otan, notamment un allègement de ses structures, et à un nouveau «concept stratégique», texte qui doit servir de référence à son action pour les 10 prochaines années. La France et l'Allemagne devaient encore confirmer qu'ils avaient dissipé leur différend sur les rôles respectifs de la dissuasion nucléaire et des systèmes antimissile dans la défense collective, fondement de l'Otan depuis 1949. Paris insistait sur le caractère complémentaire du bouclier antimissile tandis que Berlin souhaitait que l'Otan s'engage plus franchement dans le désarmement nucléaire. Sur ce point, M.Obama, bien qu'avocat de l'«option zéro» à terme, a été très clair: les Etats-Unis eux-mêmes conserveront des armes nucléaires aussi longtemps qu'il y en aura d'autres dans le monde. Evoquant le sommet Otan-Russie, qui doit avoir lieu aujourd'hui également après deux ans d'interruption due au conflit russo-géorgien, M.Obama estime possible d'«approfondir notre coopération sur l'Afghanistan, la lutte contre le trafic de drogue et les défis du XXIe siècle - de la prolifération d'armes nucléaires à la montée de l'extrémisme violent». «Et, en avançant» éventuellement avec Moscou «dans une collaboration sur le système de défense antimissile, nous pouvons transformer ce qui était une source de tension par le passé en une source de coopération contre une menace commune», a-t-il espéré. Le site du sommet, situé dans le quartier ultramoderne du parc des Nations en bordure du Tage, a été entièrement bouclé par la police, sur les dents pour empêcher la répétition des violences qui ont marqué le précédent sommet de l'Otan à Strasbourg-Kehl, en avril 2009. Aucun incident n'a été signalé. Une cinquantaine de pacifistes tenaient hier un «contre-sommet» dans un lycée huppé du centre de Lisbonne. Aujourd'hui, une grande manifestation pacifique est prévue au coeur de la capitale portugaise, à l'appel d'une centaine d'associations, syndicats de gauche et du Parti communiste portugais.