Le projet en cours de création de la zone de libre-échange maghrébine dépendra de la volonté du gouvernement de chaque pays. Beaucoup reste à faire pour que la sécurité alimentaire de 100 millions d'habitants que comptent les 5 pays maghrébins soit effective et palpable. En considérant le volet des échanges commerciaux intermaghrébins, on déchante immédiatement. «Ils ne sont pas au niveau souhaité», a affirmé hier, le ministre de l'Agriculture, Rachid Benaïssa, en marge des travaux de la 16e session de la Commission ministérielle maghrébine spécialisée chargée de la sécurité alimentaire. Néanmoins, une commission mise en place à cet effet, travaille pour l'amélioration des échanges entre les 5 pays maghrébins. «La sécurité alimentaire s'impose de plus en plus et les pays maghrébins ont pris la mesure de cela», estime le ministre. Dans ce contexte, le secrétaire général de l'Union du Maghreb arabe (UMA), Lahbib Benyahia, a indiqué à Alger que «la zone de libre-échange à l'échelle maghrébine est fin prête». «Les échanges seront meilleurs pour peu que les ministres du Commerce puis ceux des Affaires étrangères acceptent d'y adhérer», souligne M.Benyahia. Les pays maghrébins étaient parvenus à un accord sur la création en 2011 d'une zone maghrébine de libre-échange. «Nous sommes parvenus à un consensus quant à la création d'une zone de libre-échange qui sera lancée en 2011», a-t-il ajouté. «La convention portant création de cette zone est prête et sera signée par les ministres du Commerce des pays de l'UMA avant de la soumettre prochainement au Conseil des ministres des Affaires étrangères», a-t-il précisé. M.Benyahia a également rappelé que la convention «a fait l'objet d'âpres négociations entre spécialistes et prend en considération les intérêts de chaque pays», rappelant que le projet avait déjà été adopté en 1991. Toutefois, il faut savoir qu'une des problématiques de la politique de sécurité alimentaire au Maghreb réside dans le fait qu'«en cas de déficit, on recourt automatiquement à l'importation pour compléter la production nationale», avait souligné récemment à Alger Ahmed Belhamed, expert marocain en économie agricole. «La sécurité alimentaire relève-t-elle d'un droit, autrement dit un enjeu politique ou d'un objectif économique?», s'est-il interrogé avant de souligner qu'«elle est un droit selon les dispositions afférentes de la Déclaration universelle des droits de l'homme». Selon cet intervenant, «la sécurité alimentaire ne doit pas obéir aux lois du marché ou être intégrée à l'OMC». Or, sur le plan de la cohérence politique, le Maghreb est à la traîne. Une fois extraite du joug du commerce, la sécurité alimentaire devra impliquer d'autres rapports de partenariat avec les pays les plus avancés. Ce partenariat devra être axé sur le développement du secteur agricole au Maghreb. Or, ces pays développés sont excédentaires en produits agricoles, notamment en matière de céréales, et le partenariat n'est pas leur priorité. Cet état des lieux a amené l'expert marocain à préconiser d'«inscrire les politiques des 5 pays maghrébins dans le cadre de la souveraineté alimentaire». A titre d'exemple, les pays de l'Ocde accordent à leurs paysans des subventions colossales estimées à plus d'un milliard de dollars sachant que l'agriculture ne représente pas un grand apport dans ces pays. Quand ces subventions sont contestées, des échappatoires camouflées sont vite trouvées. Ainsi, un décalage institutionnel énorme sépare les paysans des deux hémisphères.