La chari'â, deviendra «l'unique source de la Constitution» du Soudan «en cas de sécession» du sud du pays à l'issue du référendum de janvier prochain, a déclaré hier le président soudanais Omar El Bechir. «En cas de sécession du Sud-Soudan, nous allons changer la Constitution. Il ne sera plus question de diversité culturelle ou ethnique, la seule source de la Constitution sera la chari'â et l'arabe sera la seule langue officielle», a affirmé le raïs soudanais lors d'un discours dans l'Etat de Gedaref (est du pays), retransmis à la télévision nationale. Les Sud-Soudanais doivent choisir entre le maintien de l'unité avec le reste du Soudan ou la sécession lors d'un référendum prévu le 9 janvier prochain. Ce scrutin est le point-clé de l'accord de paix ayant mis fin en 2005 à plus de deux décennies de guerre civile sanglante entre le Nord, musulman, et le Sud, en grande partie chrétien. Les analystes pronostiquent un triomphe de l'option indépendantiste. A l'issue de la guerre civile, le parti du Congrès national (NCP) du président Bechir et les ex-rebelles sudistes du Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM) avaient promulgué une Constitution intérimaire, valide jusqu'en juillet 2011. Cette Constitution reconnaît le caractère «multiethnique», «multiculturel», et «multireligieux» de l'Etat soudanais et se fonde à la fois sur la loi islamique (chari'â) et le «consensus» de la population. Elle fait aussi de l'anglais et de l'arabe les deux langues officielles du plus grand pays d'Afrique, anciennement sous influence britannique et égyptienne. Dans un discours ponctué de nombreuses références religieuses, le raïs soudanais, arrivé au pouvoir en juin 1989 à la faveur d'un coup d'Etat soutenu par les islamistes, a commenté le cas d'une jeune femme fouettée violemment par des policiers et dont les images ont fait le tour du monde via le site YouTube. Le pouvoir judiciaire soudanais a ordonné la semaine dernière l'ouverture d'une enquête sur cette affaire, mais la police a par la suite arrêté une cinquantaine de personnes manifestant leur appui à la victime. Des responsables politiques à Khartoum avaient indiqué que la jeune femme avait été condamnée en vertu de la chari'â, mais que l'application brutale de la peine n'était pas conforme au droit musulman. «Il y a des personnes qui disent avoir honte de cette sentence. Elles devraient revoir leur interprétation de l'islam parce que la chari'â a toujours stipulé qu'il faut fouetter, couper (la main, Ndlr), voire tuer», a affirmé Omar El Bechir. Différents articles du Code pénal soudanais de 1991, imposé deux ans après le coup d'Etat d'Omar El Bechir, prévoient des coups de fouet contre les comportements jugés «indécents», et même la pendaison dans le cas d'homicides. Plusieurs activistes au Soudan ont tenté de contester au cours des dernières années la constitutionnalité du code criminel soudanais, affirmant qu'il contrevenait à des articles de la Constitution intérimaire.