La seule sanction prononcée: interdiction de prêche pour une durée indéterminée. Des imams ont refusé de se lever pour saluer l'hymne national. Et au moment où l'on s'attendait à des sanctions, le ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, Bouabdallah Ghlamallah, dans une déclaration faite, jeudi, à Alger, a défendu ses hommes de culte. Devant le Conseil scientifique, ces imams «se sont expliqué sur ce comportement qui n'émanait ni d'une désobéissance ni du non-respect des symboles de l'Etat algérien (...) et ont présenté des excuses», a déclaré le ministre. Suffit-il de s'excuser pour être pardonné? Pourtant le jour où a eu lieu cet «incident», le 27 juin 2010, le ministre a tenu un autre langage. Il avait alors dénoncé «ce genre de comportement qui n'a rien à voir avec les valeurs et les préceptes de l'Islam». Et de regretter que «les symboles de la nation ne soient pas appréhendés à leur juste signification». Interpellé, jeudi, par un sénateur sur les mesures coercitives devant être prises, le ministre a précisé que la commission paritaire a adopté les recommandations du Conseil scientifique. La seule mesure prise à l'encontre des imams concernés est l'interdiction de prêche pour une durée indéterminée. Selon Ghlamallah, la sanction administrative est la seule à être appliquée. «Je ne peux pas faire plus», a-t-il répondu au représentant du Sénat. Bien que l'incident soit «limité dans le temps et l'espace», a ajouté le ministre. Plus loin encore, il a souligné que des actes plus graves ont été commis, sans qu'il y ait de sanctions. Cependant, des adolescents ayant commis des «bourdes» ont été lourdement punis. Ce qui n'aurait pu être qu'une simple «erreur» de jeunesse s'était révélé fatal pour les cinq élèves du lycée Okba-Ibn Nafaâ de Bab El Oued. Verdict: un an de prison ferme assorti d'une amende de 500.000 Da chacun. Chef d'inculpation: profanation de l'emblème national. Les faits remontent au 7 décembre 2008. Les jeunes élèves avaient ôté l'emblème et dessiné, à l'aide de feutres, le drapeau français. Le ministre de l'Education nationale, Boubekeur Benbouzid, était alors formel: «Ce sont là des comportements que nous ne tolérerons jamais.» Une décision très critiquée par les hommes de loi. «Au lieu de leur donner une chance de finir leurs études, ils les poussent à la délinquance. Ecroués pour ce qui n'est qu'une erreur de jeunesse, ils ressortiront de prison plus délinquants qu'à leur entrée», s'indignait maître Mokrane Aït Larbi. Réagissant à ce comportement des hommes du culte, les députés ont relevé la nécessité de saisir d'autres départements, entre autres celui de la justice. Contactée, hier, par L'Expression, Maître Fatma-Zohra Benbraham a affirmé, tout de go, qu'il n'y a aucun texte de loi qui peut infliger une sanction quelconque à ces imams. Ce phénomène, dit-elle, est lié à un autre: le nationalisme. Pourquoi ces gens ont refusé de saluer l'hymne national? Sont-ils antinationaux? s'est-elle interrogée. Allant plus loin dans son intervention, l'avocate pointe du doigt le niveau d'instruction de nombre d'imams. En témoignent les prêches extrémistes, qui résonnent dans les haut- parleurs des mosquées. «Les bons imams, doctorants et progressistes, sont remplacés par d'autres qui sont de mauvais augure», tonne Me. Benbraham. Dans la même optique, elle estime qu'il faut bannir toute idée obscurantiste au profit d'une religion de paix et d'ouverture.